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Rome
[TV : HBO - BBC]
(Michael Apted, Allen Coulter, Julian Farino, etc. -
EU-GB, 2005)

(page 3/18)

 

Pages précédentes :

Rome, unique objet de mon assentiment...

INTRODUCTION

I. PAVÉS MOUILLÉS, RUELLES INTERLOPES...

1. Une saga historique & des séries noires

2. La série TV de la fin de la république

II. QUELQUES THÈMES À LA LOUPE

3. Les esclaves et les affranchis

4. Les gladiateurs

5. La religion

Appendice : Familles patriciennes & plébéiennes (par Gricca)

Sur cette page :

6. Les Thermes

7. Sex in the Eternal City

7.1. Kama Sutra romain
7.2. Mariage exige virginité
7.3. Graffiti obscènes

III. NAISSANCE D'UN EMPIRE

IV. LE TRIOMPHE

V. LA LÉGION

8. La légion au combat

9. Une légion engloutie ?

VI. UN PEU D'EXOTISME : L'ÉGYPTE GRECQUE

Pages suivantes :

Ô ROME ET CÆTERA... LES PERSONNAGES

DEUX DE LA XIIIe LÉGION : LUCIUS VORENUS - TITUS PULLO

AUTRES PERSONNAGES DE FICTION

LES PROTAGONISTES HISTORIQUES

APPENDICES : CLODIA & CLODIUS

Fiche technique

Résumés de la première saison

BIBLIOGRAPHIE

 

Forum consacré à la série Rome

6. LES THERMES

Assez curieusement, l'unique scène se passant dans les bains publics (lorsque Vorenus veut emprunter de l'argent à Erastes Fulmen) s'abstient de scènes dénudées (ép. 5). Dans les villes qui en avaient les moyens, les thermes des femmes étaient séparés de ceux des hommes, ou ouverts à des heures différentes pour l'un ou l'autre sexe. La mixité n'était pas évidente, fonction des époques. Par exemple, on imagine assez mal qu'ils fussent mixtes sous le prude Auguste. Pourtant, si de nombreux établissements offraient des installations séparées pour les hommes et les femmes (deux sur quatre à Pompéi), il est certain que sous les Flaviens et sous Trajan, peut-être même pendant les règnes précédents, les thermes étaient mixtes. L'Histoire Auguste (Hadrien, 18) nous apprend qu'Hadrien «sépara les sexes dans les thermes», et que cette interdiction se perpétua jusqu'au règne prodigieux d'Elagabal, mais fut remise en vigueur par son successeur, Alexandre Sévère.

Dans les thermes, cela va de soi, la nudité intégrale est de rigueur. Les Anciens n'avaient bien évidement pas les préoccupations et encore moins les connaissances des hygiénistes modernes (empêchant une sudation normale, les étoffes sont des pièges à toxines, qui se transforment en bactéries) mais, s'agissant de se baigner, c'était une simple évidence. Pourtant les Romains avaient des pudeurs étonnantes : ainsi Caton l'Ancien ne se baigna jamais en présence de son gendre. «Il semble que c'[était] là une coutume générale chez les Romains : les beaux-pères en effet se gardaient de se baigner en compagnie de leurs gendres, gênés de se déshabiller et de se dénuder devant eux, raille le Grec Plutarque. Ensuite pourtant, ayant appris des Grecs à se mettre nus, ils ont en retour communiqué aux Grecs le vice de le faire aussi avec des femmes» (PLUT., Caton, XLI). Mais Caton était un cas un peu à part, on pourrait presque dire : une caricature de Romain. Cicéron, en tout cas, avertit que les bains publics ne sont pas l'endroit de rendez-vous rêvé pour ceux qui tiennent à conserver toge et sandales (CIC., Pro Cælio, 62). Martial rappelle à une jeune femme, Læcania, que «c'est tout nus que des hommes jeunes et des vieillards se baignent avec toi...» (MART., 7, 35) et d'une autre, Saufia, le même poète : «Tu ne veux pas aller aux bains avec moi ? Je soupçonne je ne sais quelle énorme tare : soit tes seins pendent sur ta poitrine comme des chiffons, soit tu crains de montrer étant nue les vergetures de ton ventre... Mais il n'en est rien, j'en suis sûr, tu es très belle toute nue» (MART., 3, 72). Tout cela se pratique en tout bien tout honneur, et Ovide, le poète des amours, ne recense pas les bains publics parmi les endroits de «drague» dont il énumère la liste (OV., Art d'aimer).

7. SEX IN THE ETERNAL CITY

Que l'omniprésence de la représentation du phallus, dans le monde gréco-romain, ne nous trompe pas. Elle n'a rien d'érotique : le phallus représente la procréation, donc la fertilité et l'abondance. C'est un symbole prophylactique qui éloigne le mauvais œil et, donc, porte chance. Rien à voir avec la sexualité-plaisir. Les Romains étaient prudes, bien davantage que les Grecs - qui s'adonnaient aux compétitions sportives complètement nus. Les gladiateurs romains gardaient un subligaculum, un «pagne». Dans Rome (HBO), la sexualité et la nudité tiennent une place de choix : scène de bain, ébats de lupanar, amants-maîtresses-épouses, saphisme, inceste... et graffiti obscènes.

7.1. Kama Sutra romain

Ne nous fions pas aux lestes scènes d'accouplement qui font la fierté du «Cabinet secret» du Musée de Naples : ces fresques ont été trouvées dans des lupanars de Pompéi ou d'Herculanum, lieux de transgression et de libertinage où elles avaient leur place naturelle. «A Rome comme en Grèce, en effet, faire l'amour complètement nus n'est pas, précisément, une pratique banale», note Michel Dubuisson (1). Il semblerait qu'à Athènes, une femme honnête ne montrait pas ses seins à son mari lorsqu'ils s'accouplaient.
Ne perdons jamais de vue que si la puritanissime Angleterre victorienne se défoulait à travers des œuvres aux prétextes historico-biblico-mythologiques, alibis rassurants (2), les bons chrétiens perpétuaient l'espèce en robe de nuit, couverts du cou à la cheville, avec juste une petite ouverture où il fallait. N'est-ce pas à la reine Victoria que l'on prête d'avoir déclaré qu'une «honnête femme ne connaissait pas l'orgasme» ? Il en allait de même à l'autre bout de la planète, en Inde, où les licencieuses Apsaras aux formes rebondies qui couvraient l'extérieur du temple de Khajurâho de leurs mille positions et autres jeux sexuels à deux, à plusieurs, solitaires ou avec des animaux, debout, assis, allongés ou inversés, et par tous les orifices, avaient pour principale fonction de repousser les influences mauvaises, loin de fidèles foncièrement pudiques (3). Il n'est pas évident - pour nous - d'admettre que des femmes qui vont la taille et le ventre dénudés sous le sari, mettent toute leur vigilance à dissimuler leurs pieds, symbole érotique majeur...

Autres lieux, autres temps, autres valeurs. Le Grec «Aristophane, pour ne citer que lui, est volontiers salace. Mais il est vrai que les Romains parlent beaucoup de ces choses, et en termes souvent plus crus que les Grecs» (4). Un Romain honorable n'a d'autre possibilité sexuelle qu'avec sa femme. Dans les premiers temps de la République (jusqu'à la fin de la seconde Guerre punique), séduire une jeune fille ou une femme mariée de naissance libre était un crime abominable, mais il était permis au mâle romain de libérer ses pulsions en compagnie de «sous-individus» tels les esclaves ou des non-citoyens des deux sexes. L'homosexualité (le mot n'apparaît pas avant 1890) est un concept parfaitement étranger aux Romains, naturellement bisexuels. Bien que n'ayant pas la même valeur que chez les Grecs - chez qui la pédérastie semble avoir fait partie du système éducatif - ce que nous nommons les pratiques homosexuelles, sont permises et normales, à condition que le citoyen romain en conserve l'initiative et qu'il ait le rôle actif. En fait, en ce qui concerne les gens de sa condition, le Romain ne peut - nous l'avons dit - faire l'amour qu'avec son épouse. En dehors de sa condition, tout lui est permis et avec n'importe quel sexe, à condition de rester l'élément dominateur (fututor) : honte donc sur le fellator «suceur de nœuds» (verpa), le cunnilicteur (cunnilinctor), le sodomisé (cinædus, cinædulus)... honte aussi sur celui qui, un peu trop porté sur les plaisirs, y dilapide son patrimoine !

 

roma amor - levrette

La levrette, fresque Musée de Naples - extrait de J. MARCADÉ, Roma Amor, 1968, Nagel, p. 90

 

roma amor - cheval d'hector

Le «cheval d'Hector», fresque Musée de Naples (Maison du Centenaire) -
extrait de J. MARCADÉ, Roma Amor, 1968, Nagel, p. 79.

Plusieurs siècles se sont écoulés depuis la fondation de la république, et les mœurs romaines ont évolué au contact des Empires hellénistiques que les Romains ont subjugués et incorporés. Le désastre démographique que fut la Seconde Guerre punique a émancipé les femmes, dans la gestion du patrimoine familial contraintes de remplacer leurs époux défunts ou absents. Leur statut a évolué. Jules César, Marc Antoine seront connus pour leurs aventures amoureuses, leurs nombreuses maîtresses... Aussi bien, depuis longtemps on ne tue plus les femmes adultères.
En revanche Vorenus est, lui, clairement un Romain «à l'ancienne» - «a Catonian stonewall», comme dit Marc Antoine qui a le sens de la formule (5) -, qui n'oublie aucune prescription ou purification rituelles, et qui est doublement indigné quand Cléopâtre l'invite à la pénétrer. Comment une femme étrangère peut-elle être assez effrontée pour ainsi ordonner à un Romain de «s'exécuter»; du reste on ne s'accouple que pour faire des enfants (tel était bien l'objectif de Cléopâtre, mais assurément, pour Vorenus, faire des enfants avec une autre femme que la sienne, non-citoyenne de surcroît, n'a aucun sens).

7.2. Mariage exige virginité

Sans façons, Marc Antoine prend son plaisir avec une bergère, au bord de la voie romaine, sans même une parole. Ses bourses vidées, il repart plus léger; de son côté la bergère se rajuste et court recompter ses moutons (ép. 2). Heureuse époque où l'on peut disposer des inférieurs sans que l'on crie au viol ! La scène pourrait paraître incongrue, mais elle achève de camper le portrait de Marc Antoine, jouisseur, paillard autant qu'intrépide soldat. Mais qui en aurait douté ?

Le retour d'Ulysse en Ithaque se fit avec pertes et fracas comme on pouvait s'y attendre de la part d'un glorieux héros d'Homère, que guidait la déesse Athéna en personne.
Celui de Vorenus à Rome est plus feutré. La conversation chez Atia soulève un coin du voile sur la situation du peuple à Rome. La guerre n'a profité qu'aux possédants, et ruiné les petites gens. La cerise sur le gâteau, c'est ce petit Lucius junior, ce bâtard que son épouse Niobé tient dans ses bras. Comment ? Une de ses filles s'est laissée engrosser sans qu'on lui demande son avis, à lui le pater familias ? Et par ce jeune blanc bec de Criton, le fils d'un bouvier «qui n'a pas eu d'ancêtres qui combattirent à Magnésie et à Zama ?» O Mos Maiorum ! Vorenus convoque le jeune homme dans sa cuisine minable, assis dans un fauteuil tel un magistrat sur son siège curule. «Tu as engrossé ma fille sans ma permission. Je suis en droit de te tuer !» Le jeune homme lui explique qu'il appartient à une grande famille d'Ostie, qui possède une grande et belle maison sur la route de Capoue. Cinq mille têtes de bétail passent chez eux chaque semaine. Et il sera majeur dans un mois. «Tu peux épouser ma fille, consent Vorenus à regret. Sa dot sera à la hauteur.» «Tu devrais te réjouir», lui dit Niobé en aparté. «Et comment donc ?, grogne-t-il. Ma fille a été déflorée ! Et par un prolo répugnant !» (ép. 2).
Vorenus n'a trouvé chez lui qu'un accueil gêné. Ses filles ne se souvenaient même plus de ce père qui, tout d'un coup, ressurgit, juge et condamne. Et la nourriture est trop salée. Le Pater familias mange en premier, pendant que les femmes, debout derrière lui, attendent (ép. 2). Il avait tant attendu ce retour en ses foyers, Vorenus ! «On t'avait dit mort.» «Comment as-tu fait sans argent ?» «Ma sœur Lydé et son mari m'ont aidés...» «Tu n'auras plus besoin d'eux.» Il ouvre sa bourse qui ne contient que quelque maigre monnaie et le sexe desséché d'un Suève qu'il a tué et mutilé quelque part en Germanie. Trophée de guerre (ép. 2). «Avec ma part de butin j'ai acheté des esclaves. J'espère en tirer 10.000 deniers.»

Dans un bouge, le dos encore meurtri par le fouet légionnaire, Pullo - pour sa part - s'adonne aux amours mercenaires, arrosant de vin blanc le corps de sa partenaire. Mais pour autant, il n'est pas le plus mal partagé ! La nuit de son retour, Vorenus ne possède qu'une Niobé frigide, tandis que Marc Antoine s'ébat joyeusement avec sa maîtresse Atia. Même dans l'intimité de l'alcôve, selon qu'ils sont puissants ou misérables les Romains ne sont pas égaux. Pas de surprise du côté de l'austère Romain Vorenus qui, pour sa part, préfère évidemment «le missionnaire»... missus propagandæ Christianæ doctrinæ causa legatus ! Notons que la série-TV montre diverses positions amoureuses, avec une prédilection archéologique pour «la levrette». «La levrette, par contre (quadrupes, more peculum «à la manière des bêtes»), n'avait, semble-t-il, rien de très excitant en soi. Si Lucrèce recommande cette position, c'est qu'il la croit idéale pour la conception; Ovide, lui, la conseille aux femmes qui ont le ventre ridé, ou, de façon plus positive, à celles qui ont avantage à se montrer de dos (spectentur tergo quis sua terga placent). Auguste et Livie l'adoptèrent systématiquement dans les premiers temps de leur mariage - mais c'est que Livie, comme on sait, était enceinte...» (6). C'est ainsi que l'on on verra - plus loin - Octavia «remariée à l'essai» avec le vieux Pompée, se faire dévêtir par une esclave et se mettre docilement à quatre pattes sur le lit (ép. 1).

Bien évidemment, Rome (HBO) n'est pas un hardcore, et le spectateur restera dans l'ignorance de celle des deux options qui, s'offrant à Pompée, recueillit sa préférence. Le téléspectateur frotté de Martial, se rappelle que «la femme a deux cons» (teque puta cunnos, uxo, habere duos) et que, aux termes d'un burlesque argumentaire pseudo-historique du poète latin, la fille du grand César, Julia ne refusait pas à Pompée la voie réputée impénétrable :

Vxor, uade foras aut moribus utere nostris (...)
pedicare negas : dabat hoc Cornelia Graccho,
Iulia Pompeio, Porcia, Brute, tibi.

Ma femme, prends la porte ou plie-toi à mes goûts (...)
Tu refuses l'enculade : Cornelia la donnait à Gracchus
Julie à Pompée, et Porcia à toi, Brutus
(MART., Epigr., XI, 104 [7]).

Les Romains étaient des gens prudes. Grecque ou romaine, une honnête femme ne serait jamais sortie dans la rue sans se couvrir la tête d'un pan de sa palla, ni se faire accompagner de serviteurs si elle en a. A la ville, la Romaine porte trois vêtements superposés : à même la peau une très stricte tunica et dessus la stola largement échancrée sur la gorge et les côtés. Enfin, par-dessus tout, la palla : un châle qui tient lieu de manteau. Pourtant, dans l'intimité de leur maison ou aux thermes les Romaines et les Romains ne se gênent pas. Nous avons vu Atia-Polly Walker s'ébattre avec son amant au déni de ses serviteurs. Mais nous savons par Suétone que la véritable Atia cessa de fréquenter les bains publics à cause d'une marque sur son corps, survenue lorsqu'elle était enceinte d'Octave (SUÉT., Aug., 94). Avec le plus grand naturel, Atia-Polly Walker sort nue (8) de son bain en présence de son fils (ép. 1), que quelques épisodes plus loin elle fera conduire au bordel par Pullo, car décidément Octave est trop sérieux (ép. 6). La caméra détaille les charmes d'Atia avec une insistante complaisance (9). Il est vrai qu'Atia est spécialement dévergondée, au point de supporter impassible les sarcasmes de sa fille Octavia laquelle pour l'humilier, au cours d'un repas avec Antoine, demande à celui-ci «si les cris de ma mère, lorsqu'elle fait l'amour, l'irritent autant qu'ils m'irritent moi». Et de la mimer. Aucune matrone romaine n'aurait sans doute supporté l'impertinence de la jeune femme («Pourquoi tant de mépris ? Tu te fais honte à toi-même...»). Toutefois Atia est un femme moderne, libérée. Le scénario essaie de prendre en compte le fait que les Romains avaient vis-à-vis du sexe une liberté que nous n'imaginons même pas, et aussi des tabous plus grands encore. Particulièrement dans cette république agonisante. Il est toutefois difficile, dans une série qui se veut aussi réaliste historiquement que Rome (HBO) de faire la part des choses quand, depuis des décennies, le cinéma s'est ingénié à colporter l'image érotisée de la Romaine en stola... mais sans tunica..., qui correspond mieux à nos conceptions modernes du glamour. Lorsqu'elle organise chez elle une réception en l'honneur de César, l'aguichante Atia porte une robe très sexy, quoique d'un modèle impensable dans l'Antiquité romaine. Noire, très découpée, avec les broderies sur les avant-bras... qui ne sont que des entrelacs sans tissu, et la gorge largement échancrée. En fait, cette robe se compose d'une brassière et d'un jupe. La jupe se rattache à la partie supérieure par une agrafe devant et un seconde dans le dos, qui dévoilent partiellement la taille, les reins et le ventre... (ép. 4). Impensable dans sa conception, car les robes romaines étaient ni cousues, ni découpées (10). Elles consistaient en un simple rectangle d'étoffe de plus ou moins grande valeur, plus ou moins savamment drapé, fixé par des fibules et tenu au corps par des rubans et ceintures qui cernaient les formes de celle qui la portait. Heureusement pour la crédibilité de la série-TV, toutes les autres femmes présentes portent des robes normalement agencées. Bref, crédibles et... décentes (ép. 4).

7.3. Graffiti obscènes (11)

On trouve énormément de graffiti en tous genres dans Rome (HBO) : obscènes, politiques ou les deux, et d'autres encore. Rien que le générique en est un florilège (12).

Ainsi, par exemple, dans le cinquième épisode peut-on admirer une série de trois graffiti exécutés par les hommes de main d'Atia, visant à faire connaître à Calpurnia son infortune conjugale et à Rome tout entière pourquoi César n'est pas pressé de régler son compte à Pompée : SERVILIA CÆSARIS FELLAT - CÆS SERVILIA CINÆD - CÆSARI FUTA SERVILIA. Le cadrage de la camera ne laisse pas toujours voir les inscriptions complètes, du reste composées dans un latin du genre de celui qu'inventent, pour rire, les cancres - du type dont feu Jean Yanne parsema ses Deux Heures moins le Quart avant Jésus-Christ ou encore certaine publicité Renault pour la «Campus» («Luxus pas cherum» !).

Pour le fun, essayons de les reconstituer :
1) SERVILIA CÆSARIS FELLAT[RIX]
Servilia suce César
Il y a probablement ici une astuce anglo-latine, dans la mesure où l'on pourrait comprendre la phrase de la façon suivante : Servilia [sous-entendu classique : «meuf de...»] César, sucks, c'est-à-dire fellat(ionne), certes; mais aussi «ne vaut pas un clou».
 
2) CÆS[ARI] SERVILIA CINÆD[ATUR]
César utilise Servilia comme un homme, ou
César est utilisé par Servilia comme un inverti
Le numéro deux est plus énigmatique, parce qu'il manque beaucoup de choses, y compris en latin un verbe attesté sur la racine cinæd (sans parler du fait qu'elle concerne normalement des rapports entre messieurs uniquement [13]). On trouve sur cette racine des noms et des adjectifs, mais point de verbe attesté. Mais comme le besoin d'un tel verbe se faisait sentir depuis longtemps, risquons de le créer, et complétons la phrase de la manière suivante : «Cæsari (datif d'agent) Servilia cinædatur.» Ce qui donnerait, en gros : «Pour/par César, Servilia est utilisée comme un homme.»
Reste une chaste interprétation (allons donc !), si l'on admet que cinæd est l'abréviation de cinædia, mot qui désigne une pierre précieuse : «Pour César, Servilia est un diamant.» Beau ça, non ?
 
3) CÆSARI FUTA[TUR] SERVILIA
César fout Servilia
Quant au numéro trois, s'il faut donc un sens global, nous aurons à peu près la même chose que pour la phrase deux, étant entendu que les pratiques sont ici plus conformes à la nature. Mais, répétons-le, dans du latin de cuisine : «Cæsari futatur (= futuitur) Servilia.»
D'autres que nous se sont interrogés sur le sens et la valeur des graffiti de Rome (HBO) comme les «Cinæd», «Atia amat omnes» et «Atia fellat» dans le troisième épisode. Voyez le site anglophone Glaukôpidos.

III. NAISSANCE D'UN EMPIRE

Qui donc est ce César, en qui un lieu commun persistant dans le grand public, veut voir le fondateur de l'Empire romain, ou son premier empereur - ce qu'il ne fut jamais ! Consul, proconsul, dictateur... Il fut, comme avant lui Marius, Sylla ou Pompée un chef de guerre. Un seigneur de la guerre défiant la légalité grâce au poids de ses légions jetées dans la balance.

César roule... pour César, bien entendu. Il s'estime au-dessus des lois, car il a su se rendre populaire - comme avant lui Pompée. César envoie à Rome esclaves et butin razziés en Gaule. Il fait tourner le commerce. Certes le décès de sa fille Julia l'affecte en tant que père. Mais elle l'affecte encore plus comme politicien, car cette union consacrait son alliance avec Pompée. Lorsque Marc Antoine lui présente ses condoléances et s'enquiert de la santé de l'enfant, il répond avec un brin d'agacement «une fille, mort-née». Un nouveau-né n'est pas mariable, est dénué d'intérêt. Julia était sa fille unique; or il lui faut remarier Pompée avec une Julii pour maintenir celui-ci dans son alliance.

En mars 44, quand César est assassiné, Rome n'est pas encore une monarchie. Elle le deviendra... avec le temps. Vainqueur de Pompée, le proconsul César va se faire nommer dictateur par ses partisans au Sénat.
Dictateur, à Rome, ce n'est pas l'horreur que nous imaginons aujourd'hui. C'est une magistrature tout à fait légale, quoique exceptionnelle. On est nommé dictateur pour six mois quand la république vit une situation désespérée (Hannibal aux portes de Rome, p. ex.). Le dictateur cumule les fonctions des deux consuls, et n'a aucun compte à rendre au Sénat (les consuls, eux, ont toujours des comptes à rendre, en sortant de leur charge, qui dure un an). César sera nommé dictateur pour un an, prorogé pour trois ans, puis à vie, mais il sera assassiné avant d'en avoir profité.

Après la dictature de César, le Principat ! Octave-Auguste va ainsi maintenir la fiction de la République. Officiellement, il est le Princeps Senatus, le premier des sénateurs. Mais il cumule d'autres fonctions (consul, tribun de la plèbe, prêtre d'Apollon, Pontifex Maximus, Imperator etc.) ce qui le fait détenir, en réalité, tous les pouvoirs. Pourtant, ce n'est toujours pas une monarchie. Comme Jules César, Auguste est divinisé à sa mort.
Vient ensuite Tibère, qui conserve le modèle augustéen dans les grandes lignes, sauf qu'il refuse d'être divinisé.

Ensuite c'est Caligula, qui descend à la fois d'Auguste et de Marc Antoine. Ce dernier, comme mari de Cléopâtre, a été pharaon d'Egypte. Caligula, qui s'en souvient, va donc jouer la carte de la royauté théocratique hellénistique, à l'exemple de ces Etats gréco-orientaux issus de l'Empire d'Alexandre le Grand.
Ne croyons ce que raconte le film La Tunique, où l'on voit un Caligula complètement dément, qui se croit un dieu et se pose en rival du Christ, capable comme lui de ressusciter des morts. En réalité, Caligula essaya d'imposer un modèle politique importé d'Orient. Ce qui, bien entendu, n'allait pas plaire aux patriciens du Sénat ! Ils le lui firent bien voir.

Après Caligula, Claude va mettre la veilleuse. On prétend qu'il aurait voulu restaurer le Sénat. Sic. En réalité, les responsabilités passent désormais aux mains... de ses affranchis.

Puis vient Néron, un artiste, certes pas un administrateur ! Et toujours ses affranchis. A la fin de son règne, deux ans d'anarchie : Othon, Galba, Vitellius... Des généraux ambitieux.

Le pouvoir passe alors aux Flaviens : d'abord Vespasien, bon administrateur, puis son fils Titus, «les délices du genre humain», et enfin, le second fils, Domitien, qui se déclarera «dominus et deus» (maître et dieu). Et après Domitien, les Antonins, considérés comme l'âge d'or de l'Empire romain (IIe s. de n.E.)...

IV. LE TRIOMPHE

Les péplums abondent en défilés triomphaux, mais les reconstitutions du Triomphe romain sont rares. Celui de César dans Rome (HBO) est particulièrement réussi - on y voit notamment exhibé le roi ennemi vaincu - même si les moyens télévisuels appellent à la sobriété.

 

julius caesar - triomphe

Le cortège triomphal de César, celui-ci sur un quadrige attelé de chevaux blancs,
traverse le Forum Romanum pour se diriger vers le Capitole.

 

Le cortège du triomphe commence par le défilé des membres du Sénat, suivis du butin chargé sur des chars (œuvres d'art, monnaies et armes placés sur des brancards (fercula) et des tableaux (tituli) évoquant les péripéties et lieux de la guerre - pour le quadruple Triomphe de Jules César : le Rhin, le Rhône, l'Océan pour la Gaule, le Nil, le Phare pour l'Egypte). «Les ornements étaient en bois de thuya pour la Gaule, de mimosa pour le Pont, en écaille de tortue pour Alexandrie, en ivoire pour l'Afrique, en argent poli pour l'Espagne. La somme provenant du butin s'éleva à un peu plus de six cents millions de sesterces» (VELLEIUS PATERCULUS, II, 56). «Chacun [de ses triomphes] comportant un appareil et des accessoires différents. Le jour de son triomphe sur les Gaules (...) il monta au Capitole la lumière des flambeaux que portaient dans des candélabres quarante éléphants, à sa droite et à sa gauche. Pour son triomphe sur le Pont, entre autres objets présentés dans le cortège, il fit porter devant lui un écriteau avec ses trois mots : «Veni, Vidi Vici» soulignant ainsi la rapidité de cette campagne» (SUÉT., Cæs., XXXVII). Puis viennent des taureaux blancs aux cornes dorées, victimes destinées au sacrifice qu'entourent victimaires et camilles; ensuite viennent les chefs vaincus et leur famille, qui ne monteront pas au Capitole mais, arrivés à la hauteur de la Curie, bifurqueront à droite - vers la Mamertine où ils seront étranglés le cas échéant. Lors du quadruple triomphe de César, défilèrent ainsi le premier jour Vercingétorix, le second Arsinoé (14) sœur et rivale de Cléopâtre, le quatrième le jeune Juba - le futur Juba II -, âgé de cinq ans, fils du roi Juba de Maurétanie (PLUT., Cæs., 55, 2-3).

Le défilé se poursuit avec le char triomphal (currus), tiré par quatre chevaux blancs, sur lequel a pris place le général vainqueur (imperator), entouré de ses plus jeunes fils (ce qui ne fut pas le cas de César qui n'en avait pas; mais nous savons que lors de son triomphe ex Hispania, Marc Antoine et Decimus Junius Brutus (15) prirent place à ses côtés dans son char). A l'image de Jupiter Capitolin, le triomphateur porte l'ornatus Jovis, c'est-à-dire qu'il est coiffé d'une couronne de laurier, attribut des anciens rois; dans une main il brandit une rameau de laurier, dans l'autre un sceptre. Il a revêtu la pourpre tunica palmata et, par-dessus, la toga picta semée d'étoiles (s'agit-il du propre vêtement parant la statue du dieu dans la cella de son temple, ou d'une copie destinée à cet usage, on ne sait). Le visage et les bras du triomphateur sont peints en rouge, comme la statue du dieu. Attelé de chevaux blancs, le quadrige est orné d'un phallus (fascinus) et de divers symboles prophylactiques; il est entouré d'acteurs vêtus à la mode étrusque (ludiones) qui se livrent à des danses comiques.

Le char passe au milieu des acclamations du public, suivi par des citoyens qui, ayant été capturés par l'ennemi, ont été libérés : leur tête est rasée et ils portent de bonnet des affranchis. Arrivent enfin, précédés de leurs officiers, les légionnaires qui marchent sans armes puisque le défilé a lieu à l'intérieur du pomœrium. Couronnés de lauriers et de feuilles de chêne, ils sont identifiables à leurs chaussures (caligæ) et au cingulum, le ceinturon militaire qu'ils ont conservé sur leur tunique de soldats. Ils chantent le Io triumphe et, pour détourner la malignité des dieux jaloux, entonnent des refrains paillards ou satiriques brocardant l'imperator. A propos du triomphe de Jules César, Suétone nous conservé quelques spécimens de l'humour troupier :

Gallias Cæsar subegit, Nicomedes Cæsarem :
Ecce Cæsar nunc triumphat qui subegit Gallias,
Nicomedes non triumphat qui subegit Cæsarem !

César a soumis les Gaules, Nicomède a soumis César :
Vous voyez aujourd'hui triompher César qui a soumis les Gaules,
Mais non point Nicomède qui a soumis César ! (SUÉT., Cæs., XLIX, 8).

Vrbani, seruate uxores : moechum caluom adducimus;
Aurum in Gallia effutuisti, hic sumpsisti mutuum.

Citadins, surveillez vos femmes : nous amenons le séducteur chauve;
Tu as forniqué en Gaule avec l'or emprunté [à Rome] (SUÉT., Cæs., LI, 1).

Le triomphe a pour but de célébrer le retour de la paix. Les troupes sont rentrées, et campent sur le Champ de Mars, sous les murs de la Ville, et les légionnaires libérés réintègrent la vie civile. Tout est mis en œuvre, en effet, pour rappeler à la fois : au soldat vainqueur, qu'il revient à l'anonymat du citoyen ordinaire et, à la Ville, qu'elle a conforté sa puissance. L'esclave qui a pris place dans le char, derrière le triomphateur et qui tient au-dessus de sa tête la couronne de laurier, lui répète en boucle des formules l'appelant à la modestie comme caue ne cadas, «prends garde de ne pas tomber !» ou memento mori, «souviens-toi que tu es mortel». Les citoyens assistant au triomphe étaient tenus de porter la toge, afin de conférer plus de solennité à cette cérémonie.

 

serie rome - jules cesar

César triomphe enfin, tout rouge de plaisir !

 

Dans la série-TV, la séquence du triomphe de César a requis 40 chevaux et plus de 750 figurants. Rome (HBO) n'a pas cru devoir reconstituer en détail les quatre Triomphes de César, même en les ramenant à un seul. Les éléphants sont mentionnés dans la conversation, mais on ne les voit pas, pas plus que les girafes auxquelles il a été ailleurs fait verbalement allusion dans le précédent épisode (ép. 9). Rome a beau être le téléfilm le plus cher, les budgets de la télévision restent serrés. On regrette de ne pas entendre l'esclave susurrer à César ses conseils de modestie, ni d'entendre les lazzis des légionnaires - qui ont cru devoir conserver leurs armes pour défiler dans le pomœrium, chose impensable (ép. 10) ! Mais le téléspectateur peut-il seulement imaginer le légionnaire romain sans son casque et sa cuirasse ?, semblent s'être demandé les concepteurs. Un bon point pour le visage de César peint en rouge, audace qu'aucun péplum n'avait jusqu'alors osé (il paraît que Tibère - qui mieux que quiconque savait n'être qu'un homme - refusa ce grimage censé l'apparenter à Jupiter Très Bon et Très Grand). Octave, chef des augures, barbouille du sang des victimes sacrifiées le visage de César. On ne sait trop quelle substance fournissait cette couleur rouge - on a parlé de minium, en fait on n'en sait rien - mais utiliser le sang d'une victime n'était pas une mauvaise idée cinématographiquement parlant : ceci permet de rappeler le caractère violent de la célébration, tout en autorisant l'économie d'une scène d'immolation avec des bœufs, sans doute pas facile à tourner. L'exécution publique de Vercingétorix, avec un garrot, au pied du tribunal de César fait également partie de la dramatisation, et permet un raccourci (en évitant de filmer le retour à la Mamertine, etc.).

 

mort de vercingetorix

A demi-impotent après avoir été enfermé sept ans dans un cul de basse-fosse,
Vercingétorix est promené dans un chariot, où il subira le supplice du garrot.

V. LA LÉGION

8. La légion au combat

Pour la première fois à l'écran, les légionnaires de Jules César portent une panoplie à peu près conforme à leur époque, en l'occurrence une chemise de mailles, la lorica hamata. C'est un bon point. En fait, la panoplie de Vorenus avec les deux bandes d'écailles de bronze de part et d'autre du cou s'inspire largement d'un modèle exposé au Museo della Civiltà Romana, à l'EUR, une hypothétique reconstitution des années '30 du légionnaire républicain, largement inspiré de l'autel d'Ahenobarbus. Normalement, les légionnaires auraient également dû porter des casques en «toque de jockey» (type «Montefortino») ou des modèles étrusco-attiques : sans être tout-à-fait concordants, ceux que l'on voit ici leur sont, néanmoins, vaguement apparentés; voilà qui nous change agréablement du type «impérial gaulois» à large couvre-nuque, bien postérieur, qui à l'échelon troupe prévaut généralement dans les péplums - notamment dans Spartacus (1960).

 
legionnaire romain legionnaire romain

Type hypothétique de légionnaire romain inspiré par l'autel d'Ahenobarbus (16), reconstitué par des archéologues italiens (Museo della Civiltà romana, salle VII, 61).
Notez le bouclier trop plat, avec la spina et l'umbo peu saillants...

La crista transversa du centurion est peut-être quelque peu prématurée. Le bouclier que tient Vorenus sur la photo ci-dessous est un clipeus, le grand bouclier ovale de l'époque républicaine. Excellente chose. Dommage qu'il soit ici réservé aux seuls officiers, car les légionnaires de la série-TV portent l'éternel, l'incontournable scutum quadrangulaire, plus tardif. Souci d'économie ou convention ? Certes beaucoup de matériels ont été récupérés de productions antérieures (les pila à section carrée déjà vus dans Spartacus, Cléopâtre, Masada...), mais il faut tenir compte d'une certaine obstination à suivre les clichés. Le scénariste de Væ Victis, Simon Rocca [Georges Ramaïoli], eut beau mettre sous le nez de son dessinateur les Osprey consacrés aux légionnaires de la république, rien n'y fit. Jean-Yves Mitton préférait les dessiner «comme dans Ben Hur, puisque c'était ça que les lecteurs s'attendaient à voir, en fait de Romains...»
Autre anachronisme : les dragons de cavalerie, modèle d'étendards que les Romains emprunteront aux Parthes, mais beaucoup plus tard.

 

vorenus - lorica hamata

Dans Rome, les légionnaires de César portent la chemise de mailles (lorica hamata), louable souci de précision archéologique qui jusqu'ici n'avait guère préoccupé les costumiers de cinéma.

 

Quoique filmé en plans très rapprochés - on est dans une série-TV, avec seulement 65 figurants - la bataille contre les Gaulois est une pure beauté pour ceux qui s'intéressent aux reconstitutions militaires et aux techniques d'escrime. On sent ici l'influence de l'archéologie expérimentale et de gens comme Ars Dimicandi (Italie) ou ACTA Expérimentation (France). Le légionnaire Pullo résume, dans le Making of : «Toutes les trente secondes, au coup de sifflet du centurion, on change de rang, on repart à l'arrière, boire un coup, se trouver une autre épée etc.» Evitant les risques inutiles, les légionnaires romains restent en formation serrée, retranchés derrière les boucliers parfaitement alignés, sur lesquels la rage des barbares vient désespérément se briser. Parfois le mur de bois et de cuir s'entrouvre, le temps pour un glaive romain d'aller, derrière le genou d'un adversaire trop avancé, trancher les tendons (dans l'épisode 6, Pullo, devenu le professeur d'escrime du jeune Octave, lui enseignera ce coup : le bord inférieur du bouclier est utilisé comme une arme offensive, qui percute l'adversaire, tandis que le glaive acéré passe par en bas).

 

romains et barbares

A l'assaut des barbares...

Chaque légionnaire tient par son ceinturon le camarade qui le précède. Au coup de sifflet de Vorenus, les files s'entrouvrent, le temps d'aspirer celui qui se bat au premier rang, lequel passe à l'arrière se reposer quelques minutes cependant que le camarde qui le suivait l'a remplacé (la caméra filme ce mouvement d'en haut et le capte parfaitement). Et déjà le rang suivant est en action.
Une stricte discipline régit le rouleau compresseur de la cohorte, où toute initiative individuelle est bannie. Un infrangible mur de boucliers, où il est impossible de s'infiltrer. Mais la tension des hommes des deux premiers rangs est insoutenable, car ils doivent non seulement tenir leur créneau personnel, mais aussi veiller sur leur voisin de droite et celui de gauche, et aussi écouter les différentes sonneries du sifflet (avancez, reculez, conversion à droite ou à gauche), malgré la cohue, les cris. C'est pour cela que les files forment la chaîne, les hommes se tenant par le ceinturon. Dès lors, on aura compris que l'initiative irréfléchie de l'inconscient Pullo se devait d'être sévèrement punie par son supérieur.

Après le petit topo introductif et une première séquence où apparaît Pompée, cette séquence guerrière nous en dit long sur les Romains. Rome est une machine de guerre impitoyable et méthodique, qui ne laisse rien au hasard, réprime les initiatives individuelles, et exige de ses soldats, mais aussi (on le verra plus loin) de ses citoyens, une discipline aveugle. Une totale soumission à l'Etat. C'est-à-dire au Sénat. A moins que ce ne soit à quelqu'ambitieux magistrat dévoyé, qui fait la guerre pour son compte. «Il faut rappeler César à Rome, et le juger pour guerre illégale», réclame le sénateur Caton.

Un ancien «marine» britannique, Billy Budd (quinze ans de service dans le Royal Marines Corps de Sa Gracieuse Majesté), a entraîné militairement les figurants légionnaires romains. On l'a déjà vu à l'œuvre avec les phalangites d'Alexandre (Oliver Stone) et entre les deux saisons de Rome, il reprit du service dans La dernière légion de Doug Lefler. «Nous avons travaillé avec un archéologue spécialiste de l'armée romaine, raconte-t-il. Nous avons étudié la colonne de Trajan, qui montre bien comment l'armée était organisée. C'était la plus importante force militaire du monde. Et ça fonctionnait non sur la brutalité, mais sur la discipline.»
Pour ces scènes, Billy Budd a formé une équipe relativement réduite (on est à la télévision), qui alla jusqu'à 200 personnes, principalement des Italiens, des étudiants. «Je les entraîne au moins pendant trois jours pour qu'ils tiennent leur barda correctement, pour marcher correctement, pour tenir correctement bouclier et armes. Puis, on fait de l'exercice chaque jour, avec des compétitions. L'équipe qui gagne reçoit un verre de vin. Il faut de la discipline dans cette équipe, savoir porter l'uniforme, avoir l'esprit «Band of Brothers», savoir marcher. Et alors, on peut avoir le sentiment d'être vraiment devant l'armée romaine» (17).

9. Une légion engloutie ?

La XIIIe fut-elle engloutie en traversant la mer, entre Brundisium (Italie) et Palæste (Grèce) ? Considérons ceci comme une licence poétique. Pas un seul «légo» se noya même en vomissant par-dessus la rambarde ! En revanche, il est vrai que les effectifs de César avaient... fondus. Des douze légions césariennes convoquées à Brundisium pour poursuivre Pompée, cinq seulement furent au rendez-vous, et encore en sous-effectif (désertions, maladies).
Arrivé à Brundisium à la mauvaise saison - le 22 décembre 49 selon le calendrier préjulien (soit le 17 novembre 49 [Le Verrier] ou le 26 octobre 49 [Groebe] dans notre calendrier julien - merci Jules !) -, César attendit bien sagement que la tempête s'apaise.

Voici ce qu'écrit Eberhard Horst : «Le 4 janvier 48, la mer étant un peu plus calme, César donna l'ordre d'appareiller. Seuls 21.000 hommes se trouvaient péniblement entassés à bord des rares transports disponibles. Ils débarquèrent près de Palæste (Palasa) sur la côte de l'Epire au sud de Valona, l'actuelle Vlorë en Albanie. Cette traversée de l'Adriatique avec des forces si réduites représentait un risque énorme. Que César l'eût assumé ne peut s'expliquer que par sa volonté de ne jamais laisser à l'ennemi le temps de se ressaisir, et de toujours garder l'initiative.
L'effet de surprise réussit, bien que 600 navires pompéiens environ eussent surveillé la mer. Personne ne s'attendait, en cette saison, à un débarquement venant de l'[ou]est, ni Pompée qui conduisait lentement son armée sur la côte, ni le commandant de sa flotte, Bibulus, qui croisait au large de Corcyre (Corfou) avec 110 bateaux. Ce dernier manqua l'occasion de mettre fin rapidement à l'entreprise de son ancien coconsul haï. Seuls les transports qui repartaient à vide chercher le reste des légions à Brundisium tombèrent entre ses mains; il en coula trente avec leur équipage»
(18).

Pompée non plus n'essuya pas de pertes. Dix mois plus tôt (19), il avait en deux fois fait franchir le canal d'Otrante à ses troupes : le 4 mars 49, les deux consuls et trente cohortes avaient embarqué pour Dyrrachium; le 17 mars [26 janvier, calendrier julien], le proconsul Pompée et la vingtaine de cohortes demeurées en Italie traversèrent la mer à leur tour (20).

Il faut accepter que dans un (télé)film certains détails soient montés en épingle, modifiés, transposés ou exagérés pour rendre l'histoire plus intéressante. Bref, transformer en véritable intrigue une sèche énumération de faits. Cette tempête, c'est César lui-même qui l'a essuyée dans une barque de pêcheur, quelques semaines plus tard lorsque encerclé par les Pompéiens en Grèce, il tenta de rentrer seul en Italie pour aller chercher des renforts («Que crains-tu ? Tu portes César et la fortune de César !», aurait-il dit - superbe - au pauvre nautonier effrayé).
En ces circonstances, son questeur Marc Antoine, demeuré en Italie, après avoir chassé des côtes de Brundisium les navires pompéiens de Libon qui le surveillaient, prit l'initiative de lui amener des renforts (quatre légions et 800 cavaliers). Antoine manœuvra brillamment pour duper la vigilance des Pompéiens en débarquant à Lissos, puis fit sa jonction avec César en infligeant à ses ennemis une cuisante défaite dans Dyrrachium assiégée (avril-juillet 48) (21).
(Ce détail n'a pas été mis en valeur dans Rome, qui du reste télescope le siège de Dyrrachium et la bataille de Pharsale.)

VI. UN PEU D'EXOTISME : L'ÉGYPTE GRECQUE

Dans sa biographie de Méhémet-Ali, Le dernier pharaon, l'écrivain franco-égyptien Gilbert Sinoué conte l'extraordinaire destin de ce mercenaire albanais illettré, au service du Sultan ottoman Sélim III, qui du joug turc libéra l'Egypte... pour s'en instaurer roi. Méhémet-Ali (1770-1849) se tourna vers les puissances occidentales, en particulier la France et l'Angleterre, pour moderniser son pays d'adoption. L'histoire ne se répète pas, mais elle bégaye, dit-on. Le nouveau maître de l'Egypte était né à Kavalla, en Macédoine, cette Macédoine d'où était sorti deux mille ans plus tôt l'aïeul des Lagides, Ptolémée Ier Sôter, compagnon et général d'Alexandre le Grand.
Depuis la plus haute antiquité, il y avait toujours eu une importante communauté grecque dans le delta du Nil. Celle-ci ne se dispersa que sous le régime du colonel Nasser, lorsque celui-ci rompit avec l'Occident suite à l'occupation du Canal de Suez par les franco-britanniques (22). Dans cette biographie, Sinoué montre bien dans quelle sujétion les Ottomans, et avant eux les Perses achéménides, les Gréco-Macédoniens, puis les Romains avaient tenu les autochtones. Les Egyptiens n'avaient jusqu'alors plus eu la moindre responsabilité dans la gestion de leur pays, le fellah étant considéré comme juste bon à cultiver la terre et produire du blé, richesse de la vallée du Nil, fond de commerce d'Alexandrie, à l'autre bout des marais du Delta - une cité résolument tournée vers la Méditerranée. Les Grecs, puis les Romains étaient bien trop infatués de la supériorité de leur civilisation pour se soucier d'intégrer quoi que ce soit de ce peuple misérable, né pour obéir, qui adorait de ridicules dieux à têtes d'animaux.
Et qui avait connu son heure de gloire... il y a si longtemps !

Les Perses, puis les Macédoniens, avaient même interposé entre eux et les Egyptiens un tampon de fonctionnaires juifs, qui étaient leurs véritables interlocuteurs. On a souvenance d'incidents survenus, au temps des Perses, entre la population d'Assouan et la garnison de mercenaires juifs, qui sacrifiaient des agneaux à la Pâque, alors que ce nome était consacré à Khnoum, le dieu-bélier sous la sandale duquel jaillissaient les sources du Nil. L'épisode biblique de Joseph vendu par ses frères et qui devient vizir de pharaon, fait plus sûrement référence à cette réalité qu'à un lointain souvenir d'une invasion par les Hyksos sémites, à la fin du Moyen Empire.

Ce long préambule pour appuyer les dires d'Arthur Weigall, ex-inspecteur général des Antiquités du gouvernement égyptien, dans sa biographie de Cléopâtre, sa vie et son temps, traduite en français chez Payot en cette cruciale année 1952 qui vit Gamal Abdel Nasser déposer le roi Farouk, le descendant de Méhémet-Ali. Weigall rappelle abondamment que pas plus que les protecteurs britanniques aux XIXe-XXe s., les Macédoniens conquérants ne s'étaient mêlés aux Egyptiens.
Les représentations de Cléopâtre (comme plus tard des Empereurs romains) en costume traditionnel égyptien n'étaient qu'apparences politiques. L'Egypte de l'Age du Bronze, celle des Sésostris et des Ramsès avait vécu. Les récentes fouilles d'Yves Empereur à Alexandrie, montrent que la nouvelle capitale de l'Egypte était emplie de monuments et statues pharaoniques de toutes époques, prélevés dans l'arrière-pays et incorporés dans l'architecture et l'art grecs, ingrédient exotique rappelant un passé qui n'était plus, mais qui, tout de même, n'était pas si mal... pour des barbares. Mais de là à parler leur langue ou s'habiller comme eux, il y avait une marge !

Les mythographes alexandrins qui travaillaient à la Grande Bibliothèque s'ingénièrent à composer une religion syncrétique où chaque dieu égyptien se voyait substituer un homologue hellène. Et au synode de Canope, le clergé égyptien décida d'introduire dans ses temples le culte des «dieux évergètes», en l'occurrence le «pharaon» Ptolémée III et sa reine Bérénice (en 238). L'emprise grecque était totale.

Le 23 juin 217, à Raphia près de Gaza, Ptolémée IV Philopator (222-205) réussit à repousser le Séleucide Antiochos III en mobilisant dans sa phalange 20.000 fellahs égyptiens. Contre toute attente, les «amateurs» se battirent bravement aux côtés les «pros», les Grecs qui, eux, constituaient l'aile gauche. L'une des conséquences de cette victoire sera que - jusque-là tenue à l'écart - la paysannerie indigène, qui venait de faire ses preuves, revendiqua la révision de ses statuts. Ptolémée IV consentit à quelques concessions, mais son successeur Ptolémée V Epiphane (204-180) répondra aux troubles sociaux par une répression cruelle contre le peuple. Epiphane s'était néanmoins fait couronner à Memphis selon le rite égyptien, en 197; et l'année suivante, le clergé réunit en synode obtint du roi de nombreux privilèges (décret trilingue grec-hiéroglyphique-démotique, consigné sur la fameuse «pierre de Rosette»).
On voit que la relation entre les rois macédoniens et leur peuple était ambiguë et de pure convenance. Alexandrie était grecque et cosmopolite, mais pas égyptienne.

Entre égyptologie et égyptomanie la flamboyante civilisation des Pharaons de l'Age du Bronze obsède romanciers, dessinateurs de BD et cinéastes. Il faut donner au public ce qu'il s'attend à voir. Nous n'en connaissons pas un seul qui ait renoncé à exhumer de la naphtaline ces oripeaux d'une époque révolue lorsqu'il s'agissait de camper l'Egypte ptolémaïque ou romaine. Ainsi, dans des aventures censées se passer au Ier s. av. n.E., Jacques Martin (Le Sphinx d'or) ou Vittorio Cottafavi (Les légions de Cléopâtre) coiffent les soldats égyptiens de pittoresques tiares... royales. Dans le film de Cottafavi, les guerriers égyptiens sont armés d'incroyables hallebardes bidentées qui sont, en réalité, des enseignes religieuses - avec des cornes hatoriques enserrant le disque lunaire. En réalité, l'armée égyptienne était alors essentiellement constituée de mercenaires grecs, italiques, celtes, juifs ou autres, équipés à la grecque - les méthodes de combat macédoniennes ayant fait leurs preuves, avant d'être supplantées par la tactique romaine.
Au prix d'un scénario ingénieux, Martin prendra prétexte de la civilisation de Méroé, en Nubie, pour ressusciter les fastes d'une Sakhara - à l'époque disparue depuis deux mille ans déjà - que va visiter son héros de papier, Alix, l'ami de Jules César (Le Prince du Nil). Quand à la Cléopâtre de Mankiewicz, elle affublera la reine grecque d'une coiffure inspirée des fresques de la Vallée des Rois. Depuis lors (mais déjà avant, ainsi Theda Bara dans la Cléopâtre de 1917 et Vivien Leigh dans le César et Cléopâtre de 1945), toutes le épiphanies celluloïds de la belle Cléo s'y réfèrent, quand elle ne la costument pas carrément en bayadère. Toutes ? Non, il faut quand même rendre grâces à Hildegard Neil qui, dans l'Antony and Cleopatra de 1972, campe aux côtés de Charlton Heston-Marc Antoine une reine blonde, coiffée en chignon, à la grecque, ce qui est déjà plus en conformité avec la tête présumée sienne, conservée au British Museum.

Rome (HBO) n'échappe pas au cliché oriental, bien au contraire, et met l'accent sur des maquillages de... euh... cannibales (23), dont on chercherait vainement l'équivalent tant dans les fresques pharaoniques que dans l'art grec ou hellénistique. Ptolémée XIII est un répugnant petit poussah, peinturluré comme un Comanche sur le sentier de la guerre. Et Cléopâtre, qui a les cheveux ras, nous apparaît telle une junkie qui, en public, porte sur le crâne une immonde choucroute argentée. Ce chapitre égyptien constitue sans doute l'unique faute de goût dans une série-TV par ailleurs exceptionnelle.

Suite…

NOTES :

(1) M. DUBUISSON, Lasciva Venus, op. cit., p. 17. - Retour texte

(2) Ainsi, au Salon de Paris, Napoléon III cingla de sa cravache les Baigneuses de Courbet, jugées triviales. Elles ne l'étaient pas plus qu'une «Diane et ses Nymphes au bain», simple question d'énoncé. - Retour texte

(3) Contra : Une autre interprétation veut que le temple de Khajurâho ait été le siège d'une secte tantrique. - Retour texte

(4) M. DUBUISSON, Lasciva Venus, op. cit., p. 1. - Retour texte

(5) Clin d'œil au général confédéré Thomas J. «Stonewall» Jackson, héros de l'Antietam ? - Retour texte

(6) M. DUBUISSON, Lasciva Venus, op. cit., p. 105. - Retour texte

(7) Martial, cité et traduit par M. DUBUISSON, Lasciva Venus, op. cit., p. 109 (l'édition Budé traduit prudemment - et même prudement - entre crochets Pedicare negas par [Avec toi point de fantaisie anormale] (!)). - Retour texte

(8) Dans les autres péplums, des servantes s'empresseraient avec un grand drap qui envahirait toute la largeur de l'écran et, au mieux, laisserait deviner sa silhouette à son visiteur... et aux spectateurs. - Retour texte

(9) Il n'y en a pas que pour les messieurs. Quelques épisodes plus loin (ép. 4), Vorenus - visitant Marc Antoine à la fin d'un exercice sportif - le trouve intégralement nu en train de se racler la peau avec un strigile. Vision aussi intéressante qu'ici celle d'Atia (pour les dames du moins; mais au moins ainsi tout le monde sera content !).- Retour texte

(10) «Etaient ni cousues ni découpées», entendons par-là qu'elles ne se composaient pas de pièces ajustées. Les tuniques étaient de grands sacs rectilignes : deux rectangles de tissu, cousus sur les côtés et à l'encolure. - Retour texte

(11) Ce qui suit doit beaucoup à FAL, qu'il soit ici remercié. - Retour texte

(12) Le générique parcourt une série de graffiti animés par l'infographie, d'abord un crâne humain en mosaïque, plus des gladiateurs - une scène de viol - des danseuses - des prostituées - un convoi de chariots - Achille traînant Hector derrière son char - des oies - des baigneuses - des danseuses encore - un phallus (inanimé lui, tiens, tiens) - une gorgone en graffito - un crucifié aux mains ensanglantées - un crâne éclatant pour permettre la naissance de Minerve (très gore) - le serpent des Lares, qui se faufile - la Louve romaine, qui montre ses crocs - un buffle - une seconde Gorgone (mais en mosaïque, dont les serpents se hérissent en 3D) ! - Retour texte

(13) En latin, cinædus ou impudicus désignent essentiellement l'homosexuel mâle passif. Pourquoi l'«homosexuel mâle» est-il seul susceptible de la réprobation générale ? Mais parce que dans ce genre de relation, au moins un des deux partenaires perd sa virilité. Quant aux relations homosexuelles féminines, elles ne méritent pas d'être prises en compte : qui s'en soucierait ? Les femmes se consolent entre elles comme elles peuvent, leurs ébats ne risquant en rien d'altérer la lignée. - Retour texte

(14) Après l'avoir fait figurer à son Triomphe, César renvoya en Orient l'ex-reine de Chypre. Plus tard, Antoine fera mourir Arsinoé pour être agréable à Cléopâtre. - Retour texte

(15) Ne confondons pas ce Decimus Brutus - un des légats favoris de César - avec son cousin Marcus Brutus, son assassin ! Pendant que César affrontait les Pompéiens à Ilerida, Decimus Brutus assurait ses arrières en assiégeant et prenant Marseille. - Retour texte

(16) Cnæus Domitius Ahenobarbus, consul en 122 av. n.E.; Musée du Louvre (Paris). - Retour texte

(17) D'après J.-Cl. VAN TROYEN, Le Soir. - Retour texte

(18) E. HORST, César. Une biographie, Fayard, 1981, p. 284. - Retour texte

(19) Entre-temps, César s'était occupé de liquider les Pompéiens d'Espagne (bataille d'Ilerida, 8 août 49). - Retour texte

(20) J. VAN OOTEGHEM, Pompée le Grand, bâtisseur d'Empire, Académie Royale de Belgique, 1954, pp. 551-552. - Retour texte

(21) F. CHAMOUX, Marc Antoine, dernier prince de l'Orient grec, Arthaud, 1986, pp. 65-70. - Retour texte

(22) «En 1954, Nasser avait signé un accord prévoyant l'évacuation des troupes britanniques du canal de Suez et leur départ définitif d'Egypte. En 1955, il décidait de la construction du Haut-Barrage - sa pyramide - à Assouan. Mais en 1956, les Etats-Unis, en accord avec les Européens, lui en refusaient le financement. La gifle était cinglante. La riposte ne se fit pas attendre. Une semaine plus tard, à Alexandrie, le 26 juillet très précisément, lors du quatrième anniversaire de la révolution, Nasser se dressa soudain contre l'Occident, en annonçant la nationalisation de la Compagnie du canal de Suez. Ainsi il allait pouvoir financer lui-même son barrage et sceller du même coup, pour la première fois, un pacte d'amour avec son peuple, celui des fellahs et des laissés pour compte. (...) [En 1957] Français et Anglais attaquaient l'Egypte pour reprendre le canal de Suez. Et, du jour au lendemain, tous les biens des étrangers furent confisqués. Français, Anglais, Italiens et Levantins sans discernement Juifs, Grecs ou Syriens, tous se retrouvaient brusquement étrangers dans un pays qui les avait adoptés...», Claudine LE TOURNEUR d'ISON, Une passion égyptienne : Jean-Philippe et Marguerite Lauer, Plon, 1996, pp. 213-214. - Retour texte

(23) Pour autant, nous n'ignorons pas que les maquillages étaient usités, y compris pour les hommes. Et a fortiori dans l'environnement d'eunuques qui entourait la jeune Ptolémée. Mais ceux de Federico Fellini dans son Satyricon nous semblent plus judicieux. Qui nous départagera ? - Retour texte