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Rome
[TV : HBO - BBC]
(Michael Apted, Allen Coulter, Julian Farino, etc. -
EU-GB, 2005)

(page 9/18)

 

Pages précédentes :

Rome, unique objet de mon assentiment...

INTRODUCTION

I. PAVÉS MOUILLÉS, RUELLES INTERLOPES...

II. QUELQUES THÈMES À LA LOUPE

III. NAISSANCE D'UN EMPIRE

IV. LE TRIOMPHE

V. LA LÉGION

VI. UN PEU D'EXOTISME : L'ÉGYPTE GRECQUE

Ô ROME ET CÆTERA...
LES PERSONNAGES

DEUX DE LA XIIIe LÉGION

LUCIUS VORENUS - TITUS PULLO

AUTRES PERSONNAGES DE FICTION

ERASTES FULMEN - GLABIUS - NIOBÉ
POSCA - QUINTUS POMPÉE - TIMON le JUIF

LES PROTAGONISTES HISTORIQUES

ANTOINE (James Purefoy)
ATIA (Polly Walker)
BRUTUS (Tobias Menzies)
CASSIUS (Guy Henri)
CATON D'UTIQUE (Karl Johnson)
CÉSAR (Ciaran Hinds)
CICÉRON (David Bamber)
CLÉOPÂTRE VII (Lyndsey Marshall)
METELLUS SCIPIO (Paul Jesson)
OCTAVE (Max Pirkis)
OCTAVIA (Kerry Condon)
POMPÉE (Kenneth Cranham)
PTOLÉMÉE XIII DIONYSIOS (Scott Chisholm)
SERVILIA (Lindsay Duncan)

Sur cette page :

APPENDICES : CLODIA & CLODIUS

CLODIA

Catulle et Lesbia

P. CLODIUS PULCHER

Le père Appius
Monsieur Claude...
... et ses «Claudettes»
Le tribun de la plèbe
Le frère incestueux
Chronologie de Clodius et Clodia

Le scandale des Mystères de la Bonne Déesse
Les dix Clodia lex

Pages suivantes :

Fiche technique

Résumés de la première saison

BIBLIOGRAPHIE

 

Forum consacré à la série Rome

APPENDICES : CLODIA & CLODIUS

Il y a un grand absent dans Rome (HBO) : P. Clodius Pulcher, le fameux chef de bande populiste. A vrai dire, il aurait difficilement pu y apparaître puisqu'il se fit tuer en janvier 52 par la bande rivale de T. Annius Milo, alors que la minisérie débute huit mois plus tard, à l'automne de la même année, au moment de la reddition d'Alésia. Toutefois, le personnage étant emblématique de son époque, sa personnalité transsude dans la minisérie directement à travers l'homme de main de César, Erastes Fulmen (et, dans la Deuxième Saison, son successeur, L. Vorenus, le «Fils d'Hadès»). Personnage de fiction, Fulmen est un Clodius au petit pied, mais résume admirablement cette période troublée. Indirectement, il se reflète encore à travers sa sœur Clodia qui servit de modèle aux scénaristes pour Atia.

Honneur aux dames, commençons par Clodia.

CLODIA
(Claudia Quarta Pulchra)
(née ca 94)
Clodia était l'épouse du consul de 60, Q. Cæcilius Metellus Celer, son cousin, qu'elle trompa avec M. Cælius Rufus, autre agitateur césarien comme son frère, mais de bien moins grande envergure.
Quintillien rapporte une rumeur insistante selon laquelle elle empoisonna en avril 59 son consul de mari
(1).

Clodia nous est surtout connue par le Pro Cælio de Cicéron, qui plaida la cause de Cælius (2), accusé d'avoir assassiné un créancier. Plus tard, en 48, César ayant pris Rome par le pronunciamiento que l'on sait et mis en place ses créatures, le dictateur qui ne le tenait pas en très haute estime ne le récompensa pas à sa «juste valeur». Alors Cælius tenta de fomenter de nouveaux troubles et finit par être mis à mort par des soldats qu'il avait tenté de débaucher (cette conspiration de Cælius est au centre du roman de Steven Saylor, La dernière prophétie, une enquête de Gordien le Limier).

A l'origine, elle portait semble-t-il le nom de Claudia Quarta, étant la quatrième des cinq filles d'Appius Claudius (les deux premières moururent en bas âge). Très proche de son frère Publius, elle le suivit dans sa fantaisie de modifier son nomen aristocratique de Claudius pour une orthographe populaire, «Clodius». Intelligente, cultivée, c'était une femme libre qui aimait s'entourer d'artistes, de libertins et... d'amoureux transis. Selon Plutarque, elle «était surnommée Quadrantaria, parce qu'un de ses amants avait mis dans une bourse des pièces de bronze et les lui avait envoyées au lieu d'argent (quadrans est le nom que donnent les Romains à la plus petite des pièces de monnaie de bronze). C'était surtout à propos de cette dernière sœur que de mauvais bruits couraient sur Clodius» (PLUT., Cicéron, 28).

Sa façon de vivre avait de quoi choquer le Romain le moins traditionaliste. C'était «une veuve qui a ouvert sa maison aux désirs de tout le monde et est ouvertement installée dans la vie de femme entretenue, qui assiste délibérément à des dîners avec des hommes dont elle n'est pas le moins du monde parente, le fait à Rome, dans ses jardins, ou au milieu de la bonne société de Baies, qui se comporte non seulement par sa démarche mais par sa toilette et son entourage, non seulement par le feu de ses regards, non seulement par la liberté de ses propos, mais aussi par ses étreintes, ses baisers, ses baignades, ses promenades en barque, ses soupers de telle sorte qu'on la prenne, je ne dis pas seulement pour une femme galante, mais une femme galante provocante et affriolante...» (CIC., Pro Cælio, 49). On le voit, Cicéron, qui avait des rapports conflictuels avec le frère de celle-ci, Clodius, ne la portait pas dans son cœur : «En ce qui me concerne, je la déteste : elle est à histoires, elle est en guerre avec son mari» (CIC., Ad Atticum, II, 1). Il avait circonscrit la légèreté de ses mœurs dans cette formule blessante : «Amica omnium potius quam cuiusdam inimica» («Amie de tous les hommes plutôt que ennemie d'un seul») (CIC, Pro Cælio, 32).

Selon Plutarque, cette animosité de Cicéron venait en fait de la jalousie de son épouse. «Terentia détestait Clodius parce qu'elle s'imaginait que sa sœur Clodia voulait épouser Cicéron et machinait ce mariage par l'entremise d'un certain Tullus de Tarente, un intime de Cicéron. Comme ce Tullus fréquentait assidûment chez Clodia, qui habitait dans son voisinage et qu'il était empressé auprès d'elle, il éveilla les soupçons de Terentia» (PLUT., Cicéron, 28).

Catulle et Lesbia
Aux alentours de 58, un certain M. Cælius Rufus, ami de Cicéron, avait succédé à Catulle dans l'affection de Clodia.
L'aimable poète Catulle, pauvre petit provincial à la santé fragile, fit de ses amours la grande affaire de sa jeunesse. Que fut-il exactement pour cette fille des Claudii, célèbres pour leur arrogance parmi les plus arrogants des patriciens romains, sinon un simple caprice, un amant d'une nuit ou d'un mois, d'une circonstance ou d'une autre ? Sans doute se décrit-il inconsciemment lui-même quand il évoque le moineau de Lesbia : «Car il était tout miel et connaissait sa maîtresse aussi bien qu'une enfant connaît sa mère; il ne s'écartait pas de son giron mais sautillant tantôt par-ci tantôt par-là, il pépiait sans cesse pour sa dame et pour elle seule.»

On comprend que, délaissé plutôt que trompé, le pauvre Catulle ait parfois poussé son chagrin et sa rancœur jusqu'à l'hyperbole :

«Cælius, ma Lesbia, notre Lesbia, cette Lesbia,
La Lesbia, celle que Catulle, et elle seule,
Celle que plus que lui-même, plus que les siens, celle qu'il a aimée plus que tous,
Aujourd'hui dans les carrefours et les culs-de-sac,
Elle écorce les descendants de Remus le magnanime !»
(CATULLE, LVIII, ad Marcum Cælium Rufum).

Dans sa maison du Palatin, que les archéologues ont identifié avec la «Maison des Griffons», elle entretenait autour d'elle un cercle d'amoureux transis, dont notre poète Catulle qui la célébra sous le pseudonyme de «Lesbia».

Erigée en génie du crime, Clodia a fait les délices du «polar-peplum», notamment Steven Saylor : 4. Un Egyptien dans la ville (The Venus Throw, 1993), en -56, Marcus Cælius est accusé du meurtre de Dion d'Alexandrie, en ambassade à Rome... quel rôle joue la sulfureuse Clodia et le poète Catulle (d'après le Pro Cælio de Cicéron); 5. Meurtre sur la voie Appia (A Murder on the Appian Way, 1996), en -52, l'assassinat du démagogue Clodius, frère de la précitée Clodia, et époux du «dragon» Fulvia (3)... (d'après le Pro Milone de Cicéron); et 8. La dernière prophétie (A Mist of Prophecies, 2002), en -48, César guerroie en Grèce à la poursuite de Pompée : quel rôle dans sa stratégie joue, à Rome, la prophétesse Cassandre morte empoisonnée, mais aux funérailles de laquelle ont assisté les sept plus puissantes femmes de Rome, qui se haïssent mutuellement - Terentia, femme de Cicéron, alors en Grèce avec Pompée; Antonia, cousine et épouse de Marc Antoine; Cythéris, actrice de pantomime et maîtresse de Marc Antoine; la deux fois veuve Fulvia (4)(de Clodius, puis de Curion); la fille de feu le dictateur Sylla, Fausta, épouse de l'agitateur Milon, présentement exilé à Marseille; Calpurnia, l'épouse de Jules César, ses yeux et oreilles; et... Clodia qui, à quarante-sept ans, a bien quelques fils gris dans sa chevelure mais de beaux restes encore. Le tout sur fond d'un complot ourdi par M. Cælius et... Milon (?). Clodia apparaît également dans Sacrilège à Rome (The Sacrilege, 1992) de John Maddox Roberts qui a pour thème la profanation des Mystères de la Bonne Déesse par P. Clodius Pulcher, en 62.
En 1936, dans
Le baiser de Lesbie, l'Italien Alfredo Panzini exprima le point de vue romantique du poète Catulle, le vilain petit canard dont ne voulaient point entendre parler les philologues «sérieux» d'avant-guerre qui n'en produisaient que des traductions expurgées (trad. fr. : Bruxelles, Office de Publicité, coll. «Traducta», 1943). Enfin, en pleine vogue des caligulades érotiques, Variety (5 novembre 1980) annonça le projet d'un film intitulé Clodia avec Olimpia Carlisi dans le rôle, qui devait être réalisé par Franco Brocani et produit par Teobaldo Cerullo pour Texas Film Corp. & Linea Cinematografica. Projet non abouti, à notre connaissance.

CLODIUS
(P. Clodius Pulcher)

(ca 92-janvier 52)
Sacrée famille que celle de Publius Clodius et de sa sœur Clodia. Originaires de la Sabine, les Claudii étaient très anciens, s'étant établis à Rome dès l'époque royale. C'est le consul M. Claudius Marcellus qui, après trois ans de siège, prit Syracuse défendue par Archimède (en 212). Les empereurs Tibère et Claude, qui se nommaient l'un et l'autre Tiberius Claudius Nero, en descendaient aussi, quoique appartenant à la branche des Nero; mais l'empereur Néron (L. Domitius Ahenobarbi) n'était un Nero qu'en vertu de son adoption par Claude.

La génération qui nous intéresse comptait au moins trois mâles : Appius Claudius Pulcher, Publius Clodius Pulcher et Sextus Clodius Pulcher : Publius était semble-t-il le puîné, car le prénom Appius - particulier aux Claudii - était forcément porté par l'aîné. Dans le bien comme dans le mal, les Claudii étaient de fortes personnalités. C'est un Appius Claudius Cæcus qui en 312 construisit à ses frais la voie Appienne, laquelle relie Rome à Capoue (plus tard, elle sera prolongée jusqu'à Brindisium). Et parmi d'autres, on se souvient encore d'un Appius Claudius Pulcher, consul en 249, qui pendant la Première Guerre punique perdit la flotte romaine en l'engageant dans une action malgré l'avis défavorable des... poulets sacrés. Comme ceux-ci manquaient d'appétit, le consul Claudius les avait fait jeter à la mer : «Qu'ils boivent, s'ils n'ont pas faim !» («Bibant, si edere nolunt !»). Le lendemain, le mécréant avait perdu toutes ses quinquérèmes...

Le père Appius
Le père de P. Clodius, Appius Claudius Pulcher (fils aîné du consul syllanien de 92) avait eu de son épouse Cæcilia Metella Balearica huit enfants. Les deux premiers étaient des filles, qui moururent en bas âge. Vinrent ensuite trois garçons et trois filles. Toutefois, la mort de son brillant cadet Caius sonna le tocsin pour le chef du clan : Appius-père dut restreindre son train de vie d'ancien préteur qui n'avait pas obtenu de province à piller. Chassé du Sénat, il abandonna sa maison du Palatin pour aller vivre à la campagne avec sa petite famille.
Pourtant, lorsque revint Sylla, Appius-père réintégra le Sénat et devint consul en 79. L'année suivante il obtint la Macédoine où il combattit victorieusement Thraces et Celtes. Mais, physiquement épuisé par la guerre, il mourut en rentrant en Italie.

Monsieur Claude...
Plutarque dit qu'en 63 - lorsqu'il profana les Mystères de la Bonne Déesse -, Clodius était encore imberbe. Et sans doute fallait-il qu'il le soit pour pouvoir se déguiser en joueuse de lyre. Naturellement, s'agissant d'un homme qui s'était déguisé en femme, il faut comme toujours être prudent avec les insinuations malveillantes de la rhétorique politique. Ainsi Cicéron, faisant un jeu de mot sur son cognomen Pulcher («Beau»), le qualifie de «beau mignon» (pulchellus) (CIC., Ad. Att., II, 1, 4).

... et ses «Claudettes»
Outre Appius, Publius et Sextus, il y avait encore trois filles. Trois Clodia qui, toutes les trois, se signalèrent par leur appétit de vivre. Leurs débauches, comme disent les esprits chagrins. L'aînée Claudia Tertia était la femme de Q. Marcius Rex (PLUT., Cic., 28-29); la puînée, Claudia Quarta (5) - notre Clodia - devint celle du consul de 60, Q. Metellus Celer (PLUT., Cic., 28 ou 29); quant à la cadette Quinta, elle épousa le grand général L. Licinius Lucullus (CIC., Pro Milone, 73).

Le tribun de la plèbe
Pour pouvoir devenir tribun de la plèbe, P. Claudius se fit, en 58, adopter par un plébéien plus jeune que lui nommé F. Fonteius et démocratisa l'orthographe de son nom en «Clodius» (SUÉT., Cæs., 20). Tout aussi excentrique, sa sœur Claudia Quarta suivit son exemple et devint «Clodia».
On imagine assez mal l'étendue de la puissance de ce personnage qui, dans la mouvance de Jules César, joua un rôle important quoique trouble dans la vie politique de la fin de la République. Qu'on se rappelle seulement que, le jour où il fut assassiné sur la voie Appienne, il se rendait à Lanuvium, petite ville dont il était le dictateur, pour procéder à l'élection d'un flamine.

Le frère incestueux
Avec beaucoup de tendresse, Florence Dupont expose le cas Clodius-Clodia, nous refaisant «Bonnie & Clyde» version œdipienne : «Clodius a toujours été beau. Il était le seul à mériter le surnom de Pulcher, avec ses traits purs, ses pommettes hautes, ses cheveux drus et noirs, ses grands yeux sombres, mais si mince et si timide que ses sœurs jouaient à le déguiser en fille. Les nuits d'orage ou de cauchemar, il se réfugiait dans leur lit pour se faire bercer comme une bébé. Adulte, il gardera avec ses sœurs cette complicité tendre qui le fera accuser d'inceste. (...) Les Romains ont une éducation trop stricte dès la petite enfance, pour jamais vivre innocemment leur sexe. Ils s'exaltent aux images interdites sans toucher jamais une jeune fille libre, fût-elle leur sœur. (...) Donc tandis que les autres Claudii devenaient des Romains bien conformes, Clodius et Clodia ne guérissaient pas de leur enfance. Ils restaient fidèles aux rêves puérils de luxe et de pouvoir. A partir de cette année 59, ils se sont tous les deux jetés tête baissée dans la modernité qui fait si peur aux Romains. Ils ont voulu tout, tout de suite. Ils ont nargué les traditionalistes nobles, ils ont choqué les simples plébéiens, provoqué l'opinion publique, lui avec ses extravagances politiques, elle avec ses plaisirs et ses amours tumultueuses. Puis d'excès en excès ils sont devenus bizarres; ils ont lassé leurs amis en refusant leurs conseils. Ils se sont enfermés dans une solitude orgueilleuse dont même leurs frères étaient exclus. Puis l'argent est venu à manquer. Du cynisme en paroles, ils sont passés à l'acte. Il y a eu des voisins spoliés, des meurtres étouffés, des scandales financiers, des chantages. Les jardins du Tibre reçurent des visiteurs étranges qui ont fait fuir les derniers habitués de la maison du rêve. Des vachers, des prostitués, des scribes et même des esclaves publics, amenés par Clodius, découvrent le luxe des grands et pour noyer leur timidité ingurgitent grossièrement des flots de vin épais qu'ils vomissent ensuite sur les coussins de pourpre. Devant le frère et la sœur il n'y a plus que la mort. Ils sont à bout de course» (6).

Soumis à un interrogatoire serré, les esclaves de Lucullus révéleront que leur maîtresse débauchée Claudia Quinta avait poussé le libertinage en commettant un inceste avec son frère. «L. Lucullus, sous la foi du serment, a déclaré que, par des interrogatoires d'esclaves, il avait acquis la certitude que Clodius avait commis un abominable inceste avec sa propre sœur» (CIC., Pro Milone, 73) et Plutarque de renchérir : «On croyait généralement aussi que Clodius avait eu des rapports avec ses deux autres sœurs, dont l'une, Tertia, était la femme de Marcius Rex et l'autre, Clodia, celle de Metellus Celer.» (PLUT., Cic., 28 et 29). Clodius aurait donc entretenu des relations incestueuses avec chacune de ses trois sœurs ! L'invective politique ne recule décidément devant rien. «Trompettes de la Renommée, vous êtes bien mal embouchées...»

Chronologie de Clodius et Clodia
 

74-66 (?)

Pendant que Claudia Quinta mène joyeuse vie à Rome, son plébéien mari L. Licinius Lucullus fait la guerre en Orient pour le compte de Sylla (Troisième Guerre contre Mithridate, 74-66 [7] ). Ce Lucullus fut certainement un des plus grands généraux de la fin de la République, probablement le plus intègre; mais le grand public se souviendra davantage du gastronome qu'il fut aussi («Ce soir, Lucullus dîne chez Lucullus !»), l'homme qui introduisit le cerisier en Italie.
Affectés à son état-major, P. Claudius Pulcher et son frère Sextus prennent part à la Troisième Guerre de Mithridate et font les quatre cents coups. S'estimant traité avec insuffisamment de considération, P. Claudius fomente une révolte des soldats.
68 [Clodius a 24 ans] Son autre beau-frère, Q. Marcius Rex, gouverneur de Cilicie, lui confie le commandement de sa flotte, mais P. Claudius est capturé et rançonné par les pirates (DION CASSIUS, XXXVIII, 30, 5). A propos de cette affaire, Cicéron mettra en cause sa moralité (CIC., De harusp. resp., 42).
Libéré, il reparaît en Syrie, où il manque de perdre la vie lors d'une mutinerie dont une fois de plus on le suspecta d'en avoir été à l'origine.
66 [Clodius a 26 ans] Première conjuration de Catilina. Cicéron préteur.
65 [Clodius a 27 ans] Rentré à Rome, P. Claudius entame une carrière politique. Il intente une action judiciaire contre Catilina pour extorsion de fonds, mais se laisse acheter contre un acquittement.
63 [Clodius a 29 ans] Seconde conjuration de Catilina. P. Claudius ne trempe probablement pas dedans, mais au contraire apporte son soutien à Cicéron dans cette affaire. Selon Plutarque (PLUT., Cic., 29), il figura parmi ses gardes du corps.
Le scandale des Mystères de la Bonne Déesse

62

 

(décembre) — [Clodius a 30 ans - Clodia en a 32] Tous les ans, les principales matrones romaines se réunissaient dans la demeure du Pontifex Maximus, pour célébrer les Mystères de Bona Dea. Les hommes n'étaient pas admis à cette célébration, qui était dirigée par l'épouse du Grand Pontife, en l'occurrence - cette année-là - Pompeia Sylla, femme de Jules César. «Etant épris de Pompeia, femme de César, il [Clodius] pénétra secrètement dans sa maison avec le costume et l'attirail d'une joueuse de lyre. Les femmes y célébraient le sacrifice secret dont la vue est interdite à l'autre sexe, et aucun homme ne se trouvait là. Mais Clodius, étant tout jeune et encore imberbe, espérait se glisser avec les femmes chez Pompeia sans être reconnu. Cependant, comme il était entré de nuit et que la maison était grande, il ne savait par où passer. Tandis qu'il errait ici et là, une servante d'Aurelia, mère de César, l'aperçut et lui demanda son nom. Contraint de parler, il dit qu'il cherchait une suivante de Pompeia, du nom d'Habra. La servante s'aperçut que sa voix n'était pas une voix féminine; elle poussa un cri et appela les femmes. Celles-ci ferment les portes, fouillent toute la maison et surprennent Clodius réfugié dans la chambre de la jeune esclave qui l'avait fait entrer. L'affaire s'ébruita; César répudia Pompeia, et Clodius se vit intenter une action d'impiété.
Cicéron était ami de Clodius, et dans l'affaire de Catilina il avait trouvé en lui un auxiliaire très zélé et un garde du corps. Clodius se défendit contre ses accusateurs en affirmant qu'il ne se trouvait même pas à Rome à ce moment-là et séjournait très loin de la ville sur ses terres. Mais Cicéron déposa contre lui et déclara que Clodius était venu dans sa maison et l'avait entretenu de certaines affaires. Cela était vrai; néanmoins l'on crut que ce n'était pas par amour de la vérité que Cicéron faisait cette déposition, mais pour se justifier aux yeux de sa femme Terentia. Elle détestait Clodius parce qu'elle s'imaginait que sa sœur
Clodia voulait épouser Cicéron. [...] De caractère difficile et habituée à gouverner Cicéron, elle l'excita à se joindre à ceux qui attaquaient Clodius et à témoigner contre lui. Beaucoup de notables aussi attestèrent que Clodius était un parjure et un fourbe, qu'il avait acheté des foules de citoyens et débauché des femmes. Lucullus produisait même des servantes qui déposèrent que Clodius avait eu des relations intimes avec la plus jeune de ses sœurs, au temps où elle était la femme de Lucullus. On croyait généralement aussi que Clodius avait eu des rapports avec ses deux autres sœurs, dont l'une, Tertia, était la femme de Marcius Rex et l'autre, Clodia, celle de Metellus Celer. [...] Clodius, ayant échappé au péril, fut élu tribun du peuple. Il s'acharna aussitôt sur Cicéron, lui suscitant toute sorte de tracas, liguant et ameutant tout le monde contre lui» (PLUT., Cic., 28-29).

Traîné en justice pour cette «violation des lois divines et humaines» Claudius, malgré l'accablant réquisitoire de son «ami» Cicéron, s'en sortit en corrompant ses juges.
Pompée, à qui l'on demanda son avis, évita de se mouiller en révoquant en doute la légalité du jury : il se borna à déclarer que le Sénat savait ce qu'il faisait.

Selon Gérard Walter, Cicéron aurait par vengeance téléguidé son ami P. Claudius - qui l'avait si bien soutenu l'année précédente, dans l'affaire Catilina - alors que César s'était opposé à son senatus consultum ultimum illégal.
Claudius étant l'amant de Pompeia ou voulait le devenir, Cicéron aurait utilisé la passion de ces deux jeunes écervelés pour déclencher un scandale au cours de fêtes religieuses et ainsi discréditer le Pontifex Maximus et préteur urbain César, dans la maison duquel - la Regia, sur le Forum, à côté de la Maison des Vestales - se déroulait ce rite interdit aux hommes. La description minutieuse que, plus tard, dans une lettre à son ami Atticus, Cicéron fera de Claudius se déguisant en femme a un parfum de vécu, fait remarquer Walter, qui pense que Cicéron assista lui-même à la mascarade. Par ailleurs, nous savons également que Claudius se trouvait justement chez Cicéron juste avant de partir pour son expédition sacrilège chez Pompeia. Si nous le savons, c'est parce que Cicéron en témoignera, enfonçant ainsi son ami Claudius qui se prévalait d'un alibi - avoir été absent de Rome la nuit des faits (CIC., Ad Att., I, 13, 14, 16, 17). Mais pourquoi Cicéron trahit-il son ami Claudius, alors qu'il aurait été le complice, voire l'instigateur de son sacrilège ? Pour complaire à sa terrible épouse Terentia qui, selon Dion Cassius, soupçonnait son mari d'avoir des vues sur Claudia, la sœur de Claudius... !
John Maddox Roberts dans Sacrilège à Rome a donné une toute autre «explication» à cette affaire - mais ici nous quittons la spéculation de l'historien pour entrer dans le fantasmatique domaine du romanesque. Selon le romancier, donc, le cadre des Mystères de la Bonne Déesse aurait été choisi pour une entrevue discrète - pas d'homme admis ! - entre Jules César himself, maître des lieux, Cn. Pompée dont les légions campaient sous les murs de la ville (et qui n'avait pas le droit de pénétrer dans le pomœrium tant qu'il n'aurait pas célébré son triomphe et, ensuite, démobilisé ses légions), P. Clodius l'agitateur populiste et quelques autres complices. Hélas, Clodius déguisé en joueuse de lyre fut découvert par une servante.

61 [Clodius a 31 ans] P. Claudius est questeur en Sicile; il brigue l'édilité.
60 [Clodius a 32 ans] (Juin) P. Claudius déclare vouloir passer au parti plébéien et en être un tribun.
59 [Clodius a 33 ans] Le consul Bibulus s'efforce de contrer P. Claudius, «l'homme de César». Briguant le tribunat de la plèbe, qui lui est interdit en tant que patricien, Publius Claudius se fait adopter par un plébéien et change donc son nom en «Clodius». «Cicéron déplorant dans un plaidoyer le malheur des temps, le même jour et à la neuvième heure, César fit passer son ennemi Publius Clodius de la classe des patriciens dans celle de la plèbe, faveur que depuis longtemps ce dernier s'efforçait en vain d'obtenir» (SUÉT., Cæs., XX).
Pseudo conspiration de Vettius, instiguée par César et Vatinius contre eux-mêmes (Vettius sera assassiné en prison).
58

[Clodius a 34 ans - Clodia en a 36] Le proconsul César est parti rejoindre sa province, la Gaule. Clodius, tribun de la plèbe depuis le 10 décembre 59, et le consul Pison condamnent Cicéron à l'exil sous prétexte qu'il a fait exécuter sans jugement des partisans de Catilina. Clodius fait raser sa maison sur le Palatin où, à la place, il fait ériger un Temple consacré à la Liberté ! De toute évidence, il n'a pas digéré le coup des Mystères de la Bonne Déesse.
Clodius a donc été «chargé par César d'empêcher les deux triumvirs restés à Rome de nuire au triumvir absent», comme l'écrit le R.P. Van Ooteghem, tout en tenant le Sénat en respect - spécialement Caton et Cicéron. Profitant de l'absence de son ami César, parti guerroyer en Gaule, Clodius va donc pendant six années soumettre Rome à un régime de terreur grâce à ses bandes armées, et notamment se déclarer l'adversaire de Pompée : «Voyant que c'était à lui-même que le peuple s'attachait, parce que tous ses actes et toute sa politique visaient à lui plaire, il entreprit aussitôt de faire casser quelques-unes des ordonnances de Pompée, il enleva son prisonnier Tigrane et le garda avec lui, puis fit poursuivre en justice des amis de Pompée, pour mesurer sur eux jusqu'où allait le crédit du grand homme. Enfin, un jour que Pompée était sorti pour paraître à un procès, Clodius avec une bande de gens pleins d'impudence et d'impertinence qu'il avait sous ses ordres, se plaça dans un endroit bien en vue, et lança des questions comme celles-ci : «Qui est l'imperator aux mauvaises mœurs ? Qui est l'homme qui cherche un homme ? Qui est celui qui se gratte la tête avec un seul doigt ?» Et tous, comme un chœur exercé à donner la réplique, répondaient à grands cris à chaque question, lorsque Clodius secouait sa toge : 'C'est Pompée !'» (PLUT., Pompée, 48).
Dans ce sens, Clodius va faire ratifier par la plèbe dix lois connues sous le nom de Clodia lex :
Les quatre premières, le 4 juin 58 :
frumentaria : le blé jusqu'alors vendu au peuple six as pour un tiers de boisseau sera distribué gratuitement pendant un mois;
de censoribus : les censeurs ne peuvent exclure du Sénat un citoyen, ni lui infliger aucune peine infamante qu'après l'avoir accusé et fait condamner publiquement;
de auspiciis : interdiction de prendre les auspices et d'observer le ciel lorsque le Peuple serait assemblé pour les affaires publiques. Abrogation de la lex Ælia Fufia qui autorisait l'empêchement de tenir les comices lorsque les augures étaient défavorables, ce dont un précédent magistrat conservateur avait abusé;
de collegiis : les anciennes corporations ou associations (collegia) d'ouvriers abolies depuis Numa seront rétablies, et l'on en créera d'autres du même genre, noyaux des «milices» populistes.
Ensuite :
de insula Cypro : Ptolémée roi de Chypre est déchu de sa royauté, et son île devient une province romaine. Le but visé étant de se débarrasser de Caton le Jeune en l'envoyant conquérir l'île (sans lui en donner les moyens : pas de légions !), avec l'espoir qu'il échouera. Clodius sera déçu dans son attente car Caton sera parfaitement à la hauteur.
Début mars :
de judiciis : tout individu qui, sans condamnation antérieure et sans jugement, aurait attenté à la vie d'un citoyen, sera privé du feu et de l'eau. Cette loi visait spécialement Cicéron (CLICK et CLICK), ce qui incita ce dernier à prendre d'initiative le chemin de l'exil (19 mars) sans attendre une condamnation. Il prit la route de la Macédoine ignorant que son ennemi Pison allait, le lendemain, en recevoir le gouvernement. Les biens de Cicéron sont néanmoins confisqués, sa maison du Palatin est détruite et le terrain qu'elle occupait, mis aux enchères, est acquis par Clodius grâce à un homme de paille;
de prouinciis consulum : (20 mars) les consuls Pison et Gabinius recevraient le gouvernement de la Grèce et de la Macédoine pour le premier, de la Syrie pour le second. Tous deux avaient soutenu Clodius dans ses desseins et en recevaient la récompense.
Enfin :
de ui : quelques habitants des villes municipales seront protégés contre les injustices publiques et les violences de leurs concitoyens;
de sacerdotio : le prêtre de Cybèle à Pessinonte sera destitué de sa charge, laquelle sera confiée au galate Brotigone;
10­ de tribunis : les tribuns de la plèbe auront le pouvoir de proposer et de faire librement les lois.

Aidé de son frère Sextus, P. Clodius libère Tigrane, prisonnier de Pompée à Rome où il a été confié à la garde du préteur L. Flavius (8), et le mettent sur un bateau en partance pour l'Orient. Au cours de cette spectaculaire évasion, il y aura des morts romains - des hommes de Pompée envoyés à leur poursuite, que ceux de Clodius mettront en déroute les armes à la main.
(9-11 avril ?) Décès du consul de 60, Q. Cæcilius Metellus Celer, époux de Clodia, qu'elle trompait avec M. Cælius Rufus. La rumeur parlera d'un empoisonnement.

57 [Clodius a 35 ans] Les consuls Lentulus et Q. Metellus Nepos (bien que ce dernier soit un ennemi de Cicéron) et le sénateur L. Cotta votent une loi rappelant Cicéron de son exil (volontaire) et désavouent Clodius. Grogne des partisans de Clodius groupés autour du tribun de la plèbe Sext. Atilius Serranus.
(23 janvier) Le tribun de la plèbe Q. Fabricius convoque l'Assemblée du Peuple pour entériner le retour de Cicéron, mais les gladiateurs du préteur Appius Claudius, frère aîné de Clodius, attaquent les partisans de Cicéron et en tuent quelques uns.
fin 57-début 56 ? — Sextus Clodius, âme damnée de son frère, comparaît en justice, mais est tiré d'affaire par sa sœur Clodia

56

[Clodius a 36 ans - Clodia en a 38] Clodius édile curule. Cicéron rentre d'exil grâce au soutien du nouveau tribun de la plèbe T. Annius Milon. Il obtient la restitution de son terrain et des dédommagements pour faire reconstruire sa demeure. Les bandes armées de Clodius saccagent le chantier, agressent physiquement l'orateur dans la rue, incendient la demeure de son frère Q. Tullius Cicero. Pompée intervient en faveur de l'orateur.
(entre le 2 et le 17 février) Devant l'Assemblée du Peuple, Clodius fort de sa lex Clodia de ui intente un procès à Milon pour violences avec ses bandes armées alors que l'on débattait du retour de Cicéron - procès perdu d'avance car, à travers Milon, il attaque de front le parti sénatorial, Pompée et Cicéron en tête (procédure qui finira en eau de boudin, en raison du climat de violence entre bandes rivales).
Il s'agit de déstabiliser Pompée, accusé d'affamer le peuple en trafiquant sur l'annone, et d'envoyer à sa place Crassus restaurer Ptolémée XII Aulète (9) sur le trône d'Egypte - le grenier à blé de Rome.
Caton prend parti contre Pompée, mais fait l'éloge de Cicéron.
(4 avril) Cicéron plaide Pro Cælio. M. Cælius Rufus est accusé d'avoir - en janvier de la même année - suscité des troubles à Naples, commis un vol à l'encontre d'une certaine Palla, molesté des membres d'une délégation diplomatique alexandrine et, surtout, d'avoir reçu de l'argent de son ancienne maîtresse, Clodia Quarta, pour assassiner Dion, l'ambassadeur de la reine Bérénice dont il avait la charge de plaider la cause auprès du Sénat, et d'empêcher le retour de l'Aulète. Finalement, ce crime fut attribué à l'hôte de Dion, L. Lucceius - un ami de Pompée. (Ce procès a inspiré à Steven SAYLOR, Un Egyptien dans la ville, quatrième aventure de l'enquêteur Gordien.)
(16 avril ? [10]) Entrevue de Lucques à laquelle assistent deux cents sénateurs et cent vingt faisceaux de magistrats; Cicéron y est absent. Les agissements de Clodius contre Pompée - à l'instigation de César ou malgré lui - creusent un fossé entre les triumvirs. César comprend qu'il est urgent de resserrer ses liens avec son associé. Il est convenu que Pompée et Crassus seront les consuls de 55.
(15 mai) Dans De haruspicum responso, Cicéron répond à Clodius et à sa lex Clodia de auspiciis.
(juin) Dans De prouinciis consularibus, Cicéron dresse un réquisitoire contre la lex Clodia de prouinciis consulum et les proconsuls de Syrie, Gabinius, et de Macédoine, Pison - qui ont approuvés son exil. Puis il fait l'éloge de Jules César dont il soutient la prorogation du mandat dans les deux Gaules.
(novembre) Pompée et Crassus ayant négligé de faire enregistrer leur candidature pour le consulat de 55, le consul C. Cornelius Lentulus Marcellinus s'oppose à leur élection. Pompée et Crassus provoquent l'ajournement des élections, soutenus par... l'édile Clodius (qui s'est réconcilié avec Pompée !) et les tribuns C. Porcius Caton et Sufenas.
55 [Clodius a 37 ans] (mi-février) Avec l'accord de Pompée et de Crassus, Clodius brigue une rogatia libera - une lucrative mission à Byzance et/ou auprès de Brogitaros : Crassus invite Cicéron à ne pas lui mettre des bâtons dans les roues. Cicéron, qui s'est assagi, laisse faire.
54 [Clodius a 38 ans] Appius Claudius Pulcher, le frère aîné de Clodius, consul. «Conservateur, partisan des Meilleurs; il a une volonté de fer et louvoie habillement entre les clans et les partis. Rusé, sans scrupule, il a le plus souvent un pied dans chaque camp. En 54, il obtient le consulat, en rendant des petits services aux dynastes et, comme son père, marie ses filles cette année-là. Il donne l'une au fils aîné de Pompée, l'autre à Marcus Brutus, une des figures du parti des Meilleurs. Il a le goût des œuvres d'art, fait venir de Grèce tableaux et statues. Comme son ancêtre, le grand Appius, il a peu de religion. Cicéron aime à plaisanter son «appiété»; l'orateur parte d'expérience, ils ont été collègues dans le collège des augures. Appius a en commun avec beaucoup de nobles patriciens une attirance pour les cultes étrangers. Il a été initié aux mystères d'Eleusis, il est dévot d'Isis et s'adonne à la nécromancie. (...) [Frères et sœurs, les Claudii resteront indéfectiblement soudés, celles-ci intercédant auprès de leurs époux pour pousser ceux-là.] A ses moments les plus fous, Appius n'abandonnera jamais Publius» (11).
53 [Clodius a 39 ans] Marc Antoine est, à la demande de César, momentanément réconcilié avec Cicéron. Clodius doit se cacher dans la boutique d'un libraire, près du Forum, poursuivi par Antoine l'épée au poing.
Clodius brigue la préture pour 52, et Milon le consulat. C'est la guerre ouverte entre leurs bandes respectives, ce qui retarde la tenue des élections.
52 [Clodius a 40 ans] (18 janvier) Sur la voie Appienne, près de Bovillæ, Clodius est assassiné par Birria et Eudamus, deux gladiateurs-gardes du corps appartenant à son ennemi T. Annius Milo. Excités par son épouse Fulvia, ses partisans érigent son bûcher funéraire devant la Curie, qu'ils incendient ensuite, ainsi que la demeure de l'interrex.
Huit ans plus tard, dans sa seconde Philippique, son vieil ennemi de Cicéron dira de Clodius, en manière d'épitaphe [il s'adresse à Marc Antoine] : «Tu as dit que P. Clodius avait été tué à mon instigation. Qu'en penserait donc le public, s'il avait été tué le jour où, dans le Forum, sous les yeux du peuple romain, tu le poursuivais l'épée à la main, et tu aurais terminé l'affaire, s'il ne s'était jeté dans l'escalier d'une librairie et n'avait, en l'obstruant, arrêté ton attaque ? Que j'aie approuvé cette action, je l'avoue, mais, que je l'aie conseillée, personne, pas même toi, ne le dit. Quant à Milon, je n'ai pas même pu approuver son dessein, car il a terminé l'affaire avant que personne eût pu soupçonner qu'il en avait formé le projet. Mais c'est moi, dis-tu, qui l'avais conseillé. Apparemment un homme comme Milon avait besoin de conseiller pour servir l'Etat ! Mais je m'en suis réjoui. Quoi donc ? dans une telle allégresse de la cité tout entière, devais-je être le seul à m'affliger ?» (CIC., Philippiques, II, 21-22).
(27 février) Pompée fait afficher deux projets de loi : l'un, ui, fait mention de l'assassinat de Clodius et de l'incendie de la Curie suite aux émeutes lors des funérailles du démagogue - l'autre, de ambitu, relatif aux tentatives de brigue illicites.
Traîné en justice, Milon est maladroitement défendu par Cicéron et exilé à Marseille.
(Cet épisode est raconté par Steven Saylor dans Meurtre sur la voie Appia, enquête policière de Gordien le Limier.)
47 [Clodia a 47 ans] Dans une lettre à son ami Atticus, Cicéron déclare vouloir racheter les jardins de Clodia, en bordure du Tibre. «Ce sont les plus beaux, mais voudra-t-elle les vendre ? Elle est très riche...»
(C'est cette Clodia désenchantée, vieillissante dans ses jardins, que Steven Saylor met en scène en 48 - elle a alors 47 ans - dans
La dernière prophétie, enquête policière de Gordien le Limier.)
44 [Clodia a 49 ans] (15 avril) Dans une autre lettre à son ami Atticus, Cicéron demande des nouvelles de Clodia. Ensuite la sulfureuse sœur de Clodius disparaît de l'Histoire... suivie moins de deux ans plus tard par Cicéron lui-même, qui est assassiné par les proscripteurs d'Antoine (7 décembre 43).
 

rome hbo - saison 2

Rome : coffret de la Saison 2

Suite…

NOTES :

(1) QUINTILLIEN, VIII, 6, 53 - cité par R.P. J. VAN OOOTEGHEM, s.j., Les Cæcilii Metelii de la République, Académie royale de Belgique, 1967, p. 277. - Retour texte

(2) On a également conservé quelques lettres de la correspondance Cicéron-Cælius. - Retour texte

(3) Fulvia, qui ensuite se remariera avec Marc Antoine. - Retour texte

(4) Fulvia épousera Marc Antoine en 45. - Retour texte

(5) Nous suivons ici la reconstitution de la famille Clodius dans l'ordre défini par Florence DUPONT, L'affaire Milon. - Retour texte

(6) F. DUPONT, op. cit., pp. 238-239. - Retour texte

(7) Ancien questeur de Sylla, Lucullus (ca. 117-56) vainquit Mithridate qu'il contraignit à se réfugier chez Tigrane d'Arménie. Lucullus conquit alors sa capitale Tigranocerte, mais ses troupes finirent par se révolter. Pompée reprit le commandement de la guerre en 66.
Le très curieux péplum gothique de Giuseppe Vari, Rome contre Rome (en Belgique : Le sorcier de l'Arménie; aux Etats-Unis War of the Zombies) est censé se passer pendant les opérations menées en Arménie par Lucullus, lequel toutefois n'apparaît guère dans le film (heureusement pour l'historien, qui s'accomode mal de ces histoires de légionnaires morts-vivants !). - Retour texte

(8) Il n'y avait pas de prison à Rome. Les prisonniers de marque étaient assignés à résidence chez des particuliers qui en avaient la responsabilité. - Retour texte

(9) Il le sera finalement en 55, par Aulus Gabinius gouverneur de Syrie, une créature de Pompée. Pour se faire reconnaître roi d'Egypte par le Sénat romain, l'Aulète avait versé à César un pot de vin énorme - 6.000 talents - ce qui lui avait d'ailleurs valu de se faire chasser de son pays par les Alexandrins las d'être pressurés. - Retour texte

(10) On ne connaît pas la date exacte de l'entrevue de Lucques. Le R.P. Van Ooteghem la situe après le 11 avril, mais avant le 15 mai : probablement le 16 avril. - Retour texte

(11) F. DUPONT, L'affaire Milon, op. cit., pp. 238-239. - Retour texte