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Rome
[TV : HBO - BBC]
(Michael Apted, Allen Coulter, Julian Farino, etc. -
EU-GB, 2005)
(page 14/18)
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EPISODE 10
Le triomphe de César (Triumph) (6
novembre 2005, HBO)
Réal. : Alan TAYLOR
Scén. : Adrian HODGES
Au sénat, Cicéron et Brutus demandent que César
soit nommé empereur. Dans le quartier populaire de l'Aventin,
Vorenus mène campagne dans le camp de César. De
son côté, Atia rend visite à Servilia pour
l'inviter à assister au triomphe de César. Pendant
ce temps, Octave va chercher sa sur Octavie, réfugiée
au temple de Cybèle. Quant à Pullo, il est furieux
qu'on lui refuse de défiler au triomphe de César
avec les soldats de la XIIIe légion.
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Antoine et Atia assistent au retour à
Rome de César |
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10/1. Une séance
du Sénat est en train de s'ouvrir; sur les gradins Brutus
et Cicéron conversent à voix basse. «Lugubres.
Ils sont lugubres. Ils n'ont jamais été comme ça...»,
constate avec amertume le fils de Servilia. «Ce n'est
pourtant pas tellement rare d'être triste à des funérailles
!», répond Cicéron, logique. «La
République était vieille et infirme. La mort peut
être une délivrance, dans certains cas»,
fait observer Brutus, désabusé. Le jeune homme semble
s'être définitivement rallié à la politique
de son nouveau protecteur César. «Tu ne peux pas
dire ça !, proteste Cicéron. Tu ne crois
pas un mot de ce que tu dis. Toi moins que quiconque ne devrait
plaisanter avec la tyrannie.» «Néanmoins, je
suis très sérieux ! Dans notre intérêt,
c'est maintenant qu'il faut se réconcilier avec César,
pour le bien de Rome...» Cicéron se rembrunit
et déclare attendre la fin de cette mascarade, pour filer
à la campagne, respirer l'air pur. Alors Brutus ironise
: «Mon cher ami : nous n'avons pas d'honneur. Sinon,
nous serions avec Scipion et Caton, dans l'Au-delà, nous
aussi !
César apparaît et s'assied
sur son siège curule. Deux serviteurs emportent ostensiblement
le siège du second consul, inoccupé. La séance
est déclarée ouverte; Cicéron se lève
et, flagorneur, propose cette motion : «A la veille de
son glorieux Triomphe, je demande au Sénat de nommer César
Imperator et qu'il
lui soit décerné le pouvoir absolu sur la ville
de Rome pendant une période de dix années.»
Silence gêné. Puis applaudissements outrés.
«César s'est montré aussi sage et compatissant
dans la victoire qu'il fut invincible dans la bataille. Il faut
cesser nos divisions. Je soutiens la motion proposée par
Marcus Tullius Cicéron», déclare à
son tour Brutus, en parfait duettiste.
Alors César se
lève et prend la parole : «Beaucoup parmi vous
m'ont combattu, et certains peut-être souhaitent encore
ma mort. Mais je n'en garde pas rancune. Je ne souhaite qu'une
seule chose : tous ensemble, bâtissons une nouvelle Rome.
Une Rome qui offrira justice et paix à tous ses citoyens,
et de la terre pour tous, pas seulement pour quelques privilégiés.
Soutenez-moi dans cet objectif. (Temps. D'un ton décidé
:) Opposez-vous à moi : Rome ne vous pardonnera pas
une seconde fois. (Il lève les bras :) Sénateurs,
la guerre est finie !»
Standing ovation des Sénateurs unanimes. César annonce
cinq jours de réjouissances et de jeux pour commémorer
son Triomphe.
10/2. Atia rend visite à son amie Servilia,
avide de constater de visu les effets de l'agression qu'elle
a subie. C'est une femme fragile et qui semble égarée
dans une monde étranger, que deux serviteurs portent avec
sa chaise dans l'atrium. «Ma pauvre amie... mais que
t'est-il arrivé ? Battue et dénudée sur la
voie publique... Les coupables ont-ils été retrouvés
?», demande Atia d'un air candide, faussement mondain.
Nullement dupe de la sollicitude de son «amie», Servilia
élude la réponse en demandant, placide : «Veux-tu
un peu d'eau citronnée ?»
«Je suis très heureuse que ton fils se soit soumis
à mon oncle. Les hommes sont souvent idiots quand il s'agit
de leur honneur..., poursuit Atia d'une voix suave. Beaucoup
m'ont sollicitée, mais... j'aimerais que ce soit toi, ma
meilleure amie, qui assiste au Triomphe de César à
mes côtés.» «C'est très généreux
à toi d'y avoir songé, répond Servilia.
Mais je ne me crois pas en état d'y assister. Je suis
sans nouvelles de mon amie Octavie...» Atia déguste
son eau tranquillement. «Elle a quitté la ville.
Elle est dans la villa d'un cousin, à Pæstum, où
elle se morfond pour un jeune poète», ment effrontément
la nièce de César.
10/3. Octavie, en réalité, s'est
réfugiée dans un temple de Cybèle où
les prêtres l'on accueillie parmi eux. Elle prie ardemment
la Grande Mère chaque jour en se tailladant les avant-bras,
mutilations rituelles en l'honneur de la déesse. «Je
veux être lavée de ma faiblesse et autres ordures.
Je veux renaître pure, en tant que servante de la Grande
Mère.» Son frère Octave essaie de la convaincre
de réintégrer sa famille. «Rentre, mère
te pardonne...» «Et moi, est-ce que je lui pardonne
?» «Qu'importe, ta place est à la maison !»
10/4. «Je suis Lucius Vorenus, de
la tribu Stellatina, vétéran de la XIIIe légion.
Citoyens...» «Tu es Gaulois !», crie quelqu'un
dans la foule. Vorenus fait son apprentissage de la politique.
Dûment «coaché» par Posca, et entouré
de Niobé et quelques amis, il prospecte ses voisins, les
foulons de l'Aventin, en vue des élections municipales.
«J'ai du sang gaulois, mais je suis aussi Romain que
toi, et mon épouse est née ici, dans ce quartier»,
répond-il, nerveux. J'ai rallié le parti de César,
qui veut plus de justice pour tous. (...).» Niobé
ne peut s'empêcher d'insulter l'interrupteur, sous les regards
consternés de Posca, qui souffle son discours à
son mari, guide ses inflexions de voix, force son sourire : «...
Les âges sombres sont derrière nous... César
a mis un terme à la tyrannie patricienne et s'assurera
que la voix des gens du commun soit entendue. (...) Cinq jours
de festins pour vous...» Discrètement, les gorilles
de César tirent à l'écart les contradicteurs.
10/5. Vercingétorix est tiré
de son cachot de la Mamertine, et amené devant César.
Le roi gaulois peut à peine marcher, une épaisse
couche de crasse couvre son corps. «Rendez plus présentable
mon vieil ami, il a l'air d'un mort», recommande
le consul.
Les préparatifs
du Triomphe vont bon train. On astique les statues, dispose des
cageots d'oiseaux pour les «augures». Pullo rode autour
de ses anciens camarades de la XIIIe légion, regroupés
près de leurs enseignes à l'effigie du sanglier.
Ils ont revêtu leurs plus beaux uniformes, polissent leurs
armes.
«Du large, civil. Il n'y a que les engagés qui
défilent. Tu peux rempiler et marcher jusqu'à en
crever», lui décoche venimeusement un ancien
camarade.
César essaie divers manteaux, dont la couleur le déçoit.
«Quelque chose de plus rouge», exige-t-il.
Marc Antoine, qui assiste aux essayages : «Amusant !
Tu joues à ressembler à un dieu ?» Et
César de répondre, gravement : «Jouer ?
Mais je ne joue pas. Ce n'est pas un jeu.» «Si tu
veux !», répond prudemment Antoine.
César se tourne
vers Posca : «Veille à ce que les éléphants
aient été purgés, je ne tiens pas à
ce que mon char soit ralenti par des déjections géantes»
(1).
10/6. Ces préparatifs provoquent la
consternation de Servilia, la «bonne républicaine».
A Brutus : «Non, mon fils, je ne vais pas mieux. Cesse
de traîner ici en ayant l'air de te faire du soucis. Va
rejoindre ton ami pour sa parade obscène.» «Mère...»
«Va-t'en !» Puis, plus doucement : «Va-t'en...»
10/7. Octavie est rentrée chez elle.
Mère prévenante, Atia est en train de l'aider à
se maquiller. «Ton silence est bouleversant ! C'est horrible
pour moi. Que t'ont-ils fait ? Ils t'ont laissé taillader
tes bras comme si c'était de la viande de porc...»
[Sur l'écran du téléviseur, ces propos ont
l'air cyniques; mais, dans la logique romaine, il n'est pas concevable
qu'un enfant - censé être le prolongement de ses
parents - puisse être d'un avis différent. Pas plus
qu'il n'est concevable qu'un esclave puisse penser. - N.d.M.E.]
10/8. Sur ces entrefaites, Quintus Valerius
Pompée, le proscrit, tente de se réfugier chez Brutus.
Servilia fait bon accueil à ce paria plein de haine pour
le fossoyeur de la République. «Tu n'es donc pas
un ami de César... ? Aux esclaves : Qu'on le lave
et qu'on le nourrisse.»
10/9. Comme chef des augures, Octave procède
au sacrifice propitiatoire qui va inaugurer le défilé.
De ses mains poissées du sang des victimes, il barbouille
le visage de son grand-oncle César. Un garrot autour du
cou, Vercingétorix est attaché à un poteau,
dressé sur un chariot. La foule acclame les légionnaires
qui défilent en armes. Arrive César sur son char
attelé de quatre chevaux. Derrière lui, un esclave
tient une couronne au-dessus de sa tête. Des enseignes à
tête de dragon (2).
Les tambours (3) sonnent
le glas. Sur son chariot, Vercingétorix est étranglé
devant le podium de César...
10/10. Au Forum, le crieur public annonce
que des tables pour cinq mille hommes seront dressées au
marché aux bestiaux, mais les esclaves et les affranchis
n'y auront pas accès. Chaque citoyen, a promis César,
recevra cent deniers, versés par le Trésor Public.
Vingt mille familles méritantes recevront une ferme sur
les terres arables situées autour de Capoue. Et l'année
prochaine, tous les loyers des habitations modestes seront entièrement
payés par Caius Julius Cæsar.
10/11. Brutus n'est pas du tout heureux de
l'initiative de sa mère : «Quintus va-t-il rester
longtemps ?» «Le feu brûle en lui. Il me réchauffe»,
répond Servilia.
10/12. Posca essaie d'initier aux arcanes
du droit le candidat aux élections Vorenus. La chose n'est
pas évidente, pour l'ancien soldat. «Est-ce bien
nécessaire ? Et si je ne suis pas élu ?» «Mais
tu seras élu, sourit tranquillement Posca. Les autres
candidats sont des hommes de paille. Un unique candidat de César
serait suspect !» «Mais les élections sont
sanctifiées par Jupiter Capitolin !», s'énerve
Vorenus, qui ne peut souffrir tant de désinvolture. «César
aussi a été approuvé par Jupiter Capitolin,
répond Posca, conciliant. Absolument tout ce que fait
César est sacré.» «Les élections
sont corrompues», gronde Vorenus. «Le peuple
s'en moque, rétorque Posca, fataliste. Il veut du
pain, de l'eau potable, la paix. Tu peux l'y aider.»
10/13. Pullo sollicite Vorenus : «Je
veux affranchir Eiréné... Je veux l'épouser.
Fonder une famille... Je n'ai jamais été si sûr
de quelque chose dans ma vie... Il faut que tu m'accompagnes chez
le préteur.»
10/14. Brutus rencontre Cicéron. «Encore
ici ? Je te croyais à la campagne...» L'orateur
informe son ami qu'un libelle circule, signé «Brutus»
exalte la défense des principes républicains contre
les forces de la tyrannie. L'auteur en est Servilia, aidée
de Cassius. Brutus est furieux. «César pourrait
me faire tuer, pour cela.» «Que fais-tu, toi le descendant
du fondateur de la République ?» Brutus est indigné,
car il sait ce complot ridicule; une folie !
10/15. Pullo est allé trouver le préteur
avec Vorenus pour témoin, qui lui a avancé l'argent.
Retour à la maison, il fait venir Eiréné,
qui d'abord croit qu'on l'a revendue à un autre maître.
«Non, tu es libre. C'est écrit là»,
rétorque Pullo en lui mettant sous le nez sa tablette d'affranchissement.
La jeune femme lui saute au cou. «Oh ! Je t'aime. Tu
es le meilleur des hommes.» Elle l'étreint fougueusement.
Quelques minutes plus tard, un autre esclave nommé dipe
vient le remercier à son tour. Il lui explique, embarrassé,
qu'ils comptaient prendre le nom de leur maître Vorenus,
selon l'usage, mais que tout compte fait ils prendraient celui
de Pullo. «Cela fait longtemps que nous économisions
pour nous racheter.» Pullo croit devenir fou. Il fracasse
contre un pilier le crâne de ce cancrelat. «Je
ne savais pas», balbutie-t-il à Vorenus, en guise
d'excuse. Et c'est au tour de l'ancien préfet des evocati
de s'emporter : «Cet esclave m'appartenait. Tu es chez
moi ! Tu l'as tué devant mes enfants !» «Je
te rembourserai...», affirme Pullo, penaud. «Ce
n'est pas l'argent qui compte... C'est le manque de respect !»
«Tu es beau dans ta toge, contre-attaque Pullo. Toi,
tu n'as jamais été rétrogradé, enfermé
! Avant, avec tes beaux principes, tu critiquais César.
Et maintenant, tu lui lèches le cul !» «Va-t'en,
et ne reviens jamais ici !», gronde Vorenus.
10/16. Fort ennuyé, Brutus va trouver
César pour l'informer qu'il n'est pas l'auteur d'un pamphlet.
«Ce n'est pas moi.» «Bien sûr, je te
crois, répond César apaisant. Pourquoi signer
un texte pour le renier ensuite ? (...) Mais de qui donc est-il
alors, ce texte ? Le style est bon...», ajoute, soupçonneux,
le dictateur.
10/17. Le corps de Vercingétorix est
jeté aux ordures.
Atia materne Octavie.
Des esclaves gaulois récupèrent le corps de leur
roi et l'emportent dans un petit bois, où ils le brûlent
secrètement.
Pullo traîne dans les tavernes, trop fauché pour
pouvoir se payer une pute. C'est alors qu'Erastes Fulmen l'aborde
pour lui proposer du boulot. «Trop de soldats sont rentrés.
Il n'y a plus de travail.» «J'ai plusieurs fers sur
le feu, rétorque Pullo, d'un air dégagé.
Et je suis un soldat, pas un tueur.» «Quelle différence
? Je t'offre à boire !»
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EPISODE 11
Espoirs déçus (The Spoils)
(13 novembre 2005, HBO)
Réal. : Mikael SALOMON
Scén. : Bruno HELLER
Pullo est devenu tueur à gages pour le compte d'Erastes
Fulmen, tandis que Vorenus joue son rôle de magistrat. Son
ancien camarade Mascius lui demande d'intercéder auprès
de César pour que les vétérans obtiennent
des terres en Italie. Vorenus fait part à César
de son inquiétude en cas de mécontentement des vétérans.
Il accepte de leur donner des terres... en Pannonie.
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Une des rares erreurs flagrantes de la
série : cet étrange gladiateur
armé d'une masse d'arme très heroic fantasy,
n'appartient à aucune armatura connue
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11/1. Cette nuit-là,
un homme paniqué fuit dans le quartier de l'Aventin, pisté
par le pas tranquille d'un tueur sifflotant, sûr de soi,
implacable. Bientôt l'homme est poignardé... par
Pullo, qui après avoir tranquillement essuyé sa
lame au vêtement de sa victime, laisse les mendiants détrousser
le cadavre.
11/2. Chez lui, Vorenus s'apprête à
recevoir ses clients. Il réprimande sa fille aînée
: «Trop de bijoux. Je suis magistrat romain, par un roi
d'Asie.» Dans l'atrium de Vorenus, le premier
visiteur s'avance : «Protecteur, je te salue. Mes jarres
d'urine (4)
ont toutes été brisées. Les soldats d'une
certaine légion dont je tairai le nom, ont trouvé
très amusant d'en verser le contenu sur la tête des
passants.» Mascius, un vétéran venu avec
les autres clients, l'interpelle : «Es-tu sûr que
ce n'étaient pas des gladiateurs déguisés
en soldats ?» «Je sais différencier un gladiateur
d'un soldat. Oh, il y a des gens très bien, parmi les soldats.
Mais avec toutes ces recrues étrangères... Et comment
vais-je nettoyer les vêtements sans pisse ?» «Ca
ne se reproduira plus», assure Vorenus.
S'avance alors le vétéran
Mascius, un ancien camarade d'armes. «Ah ! depuis mon
retour, je n'ai fait que manger et baiser, baiser et manger, manger
et baiser.» Réprobateur, Vorenus lui indique
d'un regard son épouse et ses filles : «Mascius,
nous ne sommes plus à l'armée. Je te verrais volontiers...
plus tard. Mais je dois m'occuper de mes clients.» «C'est
tout à ton honneur, répond Mascius, qui se tourne
vers Niobé : Excuse mes rudes manières de soldat.»
Plus tard, les deux vétérans se retrouvent en tête-à-tête.
«Où est Titus Pullo ? Vous étiez comme
Castor et Pollux !» «A mes yeux, Titus Pullo est mort»,
rétorque sèchement Vorenus. «Tu n'as pas
mal réussi, me semble-t-il, fait Mascius en pointant
du doigt la toge blanche du magistrat. Ecoute, Lucius, tes
frères [d'armes] sont mécontents... notre grand
chef nous a oubliés.» «Il y a eu un accord;
je ne peux pas donner un denier de plus.» «Oui, je
sais. D'ailleurs la somme nous suffit. Mascius exhibe une
pièce de monnaie. Il y a son effigie dessus, à
ce que j'ai vu...», insinue le démobilisé.
«Celui qui bat monnaie y grave ce qu'il veut»,
répond Vorenus, de plus en plus mal à l'aise, agacé.
«Pour mener une vie paisible, honorable, ce n'est pas
d'argent qu'il s'agit, mais d'autre chose... Quand l'argent aura
été dépensé, que ferons-nous ? Monter
un commerce, peut-être ? Non !»
L'ancien boucher Vorenus
est de plus en plus mal à l'aise (5)
: «Cesse de me poser des questions, mon frère,
et dis-moi ce que tu as à dire.» «Nous voulons
des terres... en Italie !» Signe de tête négatif
du magistrat : «Dès qu'il le pourra, César
donnera des terres, mais pas en Italie.» Mascius insiste
: «Toi, tu en as eu des terres en Italie...» «Je
suis magistrat. Je ne représente qu'un seul homme, et non
pas une légion entière. Il me faut un revenu...»
Mascius plonge ses yeux dans ceux de Vorenus, sarcastique : «Ca
ne doit pas être mal... ?» «Je n'en sais rien...,
répond Vorenus, novice en la matière. J'ai trop
à faire.» «Ah ! quel beau poste tu as,
répond Mascius patelin. Nous ne voudrions pas abuser...»
«Alors, n'abusez pas !»
11/3. Pullo, qui éprouve un appétit
croissant pour l'opium, se fait détrousser par deux prostituées.
Il lui faut se refaire financièrement. Il mendie «du
travail» chez Erastes Fulmen, occupé à déguster
des souris - les meilleures de l'Aventin. «Tu manques
de discrétion. La dernière fois, tu as courus derrière
ton «client» comme une coq au cul d'une poule, à
travers tout l'Aventin. Les gens qui me paient veulent du travail
sérieux.» Fulmen et Urbo se moquent de lui, tout
penaud. Mais finalement Fulmen consent à lui donner une
petite avance sur un prochain meurtre... toutefois, il enjoint
au sicaire d'aller boire ailleurs : «Ici, c'est un maison
respectable. Fréquentée par d'honnêtes citoyens.»
11/4. Marc Antoine et Vorenus demandent à
César de libérer des terres pour ses vétérans.
«Mais je ne puis donner ce que je n'ai pas»,
objecte le dictateur. «Il suffit de confisquer celles
d'un de tes ennemis», fait Antoine. «J'en ai
encore ?», feint César. «C'est difficile
à croire ?», s'impatiente Antoine. César
se tourne vers Vorenus : «Est-il possible que mes vétérans
se retournent contre moi ?» «Non, mais tes anciens
soldats risquent de tomber dans le banditisme et la rapine, par
déception.» «Et qui plus est en ton nom»,
rajoute Antoine. «Mes soldats sont comme mes fils. Dis
leur que je leur donnerai de la bonne terre... en Pannonie».
«La Pannonie ?, s'étonne Vorenus. C'est loin
et difficile d'accès. Mascius risque de refuser.»
«Ce Mascius a-t-il la confiance des autres ?»,
demande César. «Il a celle de ses décurions,
qui peuvent influer sur les autres», répond Vorenus.
«Fais-lui une offre personnelle, dans ce cas.»
«Dans quelle limite ?» «Je t'en laisse juge.
Oh, magistrat Vorenus... ma nièce Atia donne un banquet,
et je voudrais t'y voir avec ta femme.» «Ma femme
et moi ne sommes que des gens du peuple, César.»
«Eh bien, ainsi tu t'habitueras à la bonne société.»
Vorenus sort, laissant César et Marc Antoine seuls dans
la Curie. César s'assied dans le nouveau fauteuil qu'il
s'est fait fabriquer, une chaise curule... avec dossier. «Je
ne sais-pas si j'aurais pu supporter un autre discours de Cicéron.»
«Il avait presque l'air sincère», ironise
Antoine.
11/5. Pour rehausser le standing de sa maison,
Niobé a prit en location deux nouvelles esclaves. «Habille-les
un peu plus, veux-tu ?», suggère distraitement
son mari.
11/6. Sur le Forum, le crieur public annonce
que par décret du Sénat et du Peuple romain, «Caius
Julius Cæsar a été déclaré dictateur
à vie. Le cinquième mois de l'année sera
désormais appelé «juillet» en son honneur.»
11/7. Entourés de six licteurs (6),
Brutus et son ami Cassius déambulent dans Suburre, dont
les murs sont couverts de graffitis où on le voit tuer
César. «Efface cela», demande-t-il à
un de ses esclaves. Cassius entraîne Brutus dans la Curie
et lui montre le nouveau «trône» de César.
«Regarde ça : c'est un trône !»
Cassius essaie de convaincre Brutus que, de par le nom qu'il porte,
son destin est intimement lié à celui de la République.
Le peuple n'acceptera le meurtre de César que si c'est
la main de Brutus qui tient le couteau. Quand Cassius le traite
de lâche, Brutus se raidit. Il n'est pas aveugle au point
de ne pas voir ce que César est devenu; mais il a engagé
son amitié. «Il me fait confiance. Je ne peux
pas trahir cette confiance.» «Par amitié, laisseras-tu
la République mourir ?», demande Cassius avec
dégoût. «Je suis juste un homme !, répond
Brutus. La vie ou la mort de la République ne sont pas
entre mes mains !» Le jeune homme quitte son ami, outré.
11/8. Urbo conduit Pullo sur le lieu de sa
prochaine embuscade. «Les chattes gauloises, elles sont
comment ? Bien juteuses, je parie ?», demande l'homme
de main avec un sourire obscène. «Je t'ai dit
de te taire», répond l'ancien légionnaire,
concentré. Arrive un vieillard, Aufidius Dento, un tisserand.
Le «client» de Pullo. Posément, il lui plante
son poignard dans le ventre et se retire. Tranquillement. Quelques
vieilles sur les mollets, hurlant «meurtrier, meurtrier
!».
11/9. Vorenus et Mascius se revoient, et le
magistrat fait part de l'offre de César au porte-parole
des vétérans. «En Pannonie (7)
? Mais c'est en Germanie, et loin d'avoir été conquis.»
«La terre est noire et bien grasse, je t'assure. (...) Si
nos frères acceptent la Panonnie, insiste Vorenus, César
saura te témoigner sa gratitude.» «Je ne comprends
pas ?» «Cinq mille deniers...» «Je n'ai
pas trahi mes frères depuis que j'ai versé mon premier
sang !», s'offusque le soldat. «Sept mille...
?» «Pas même pour vingt mille ! Mon honneur
n'est pas à vendre.» «En choisissant la Pannonie,
tu ne trahis pas nos frères. Car sinon, ils n'auront rien.»
Mascius le défie : «Un homme qui tient un glaive
ignore la faim.» «Mais rien ne les empêche de
mourir...», observe sentencieusement Vorenus. C'est
très clair : à prendre ou à laisser. Mascius
réfléchit. «Quinze mille», marchande-t-il.
«Dix mille», négocie encore Vorenus,
dur en affaires, déterminé à défendre
l'escarcelle de César comme si c'était la sienne.
«12.000 ?» «12.000 !»
11/10. Atia tente de convaincre César
que Servilia est à l'origine des graffitis où l'on
voit Brutus l'assassiner. «Je me doute bien que Servilia
ne me porte pas dans son cur, mais de là à
souhaiter ma mort... ! Atia, tu dramatises.» «Je t'aurai
averti !», se résigne sa nièce.
De son côté, Marc Antoine entreprend Octavie : «Ta
mère est une créature vicieuse et sans cur,
mais sans elle, je me sens... misérable. J'ai tout fait
pour essayer de l'influencer, mais elle continue à me fuir
comme la lèpre... Peux-tu plaider ma cause ?» «C'est
inutile que je plaide : ce n'est qu'une stratégie de sa
part. Elle t'est totalement acquise.»
«C'est un mensonge ridicule», intervient à
la fois amusée et furieuse Atia, qui a tout entendu. Et
changeant aussitôt de conversation, elle désigne
du doigt Niobé, qui vient d'arriver avec Vorenus : «Quelle
est cette créature vêtue d'une robe banale ? Il se
dégage d'elle comme un parfum de rue...» Au bras
de son mari, Niobé est en extase devant le luxe de leur
hôtesse. Le couple plébéien essaye maladroitement
de se mêler aux autres invités hautains. Pour cette
occasion toute spéciale, Niobé porte une robe qu'elle
a voulu raffinée. «Un homme aussi austère
au bras d'une si jolie fleur», déclare hypocritement
Atia, qui a rejoint les nouveaux venus. Puis, prenant le bras
de Niobé : «Mais où avez-vous trouvé
cette robe magnifîîîque ?»
César prend Vorenus en aparté : «Alors
?» «Mascius est d'accord pour la Pannonie... pour
12.000 deniers.» «Très bien !, déclare
César enchanté. Je ne savais pas qu'il se laisserait
acheter à si bas prix... Je vais te charger de négocier
toutes mes corruptions.» «Je préférerais
qu'il n'en soit rien», répond Vorenus. «Plaisanterie
!», le rassure César, tout aussi ferme. Il justifie
l'action de Vorenus : «En corrompant un seul homme, tu
en as sauvé des milliers d'autres du banditisme ! Ah !,
j'aimerais parfois retourner en Gaule. Tout y paraît plus
simple.» «Vorenus !», interpelle Octave.
«Magistrat Vorenus !, corrige César. Son
rang est plus haut que le tien.» Octave acquiesce :
«Magistrat Vorenus, une rumeur m'est parvenue, selon
laquelle Pullo serait enfermé dans une geôle. Pour
meurtre. Est-ce vrai ?» «C'est vrai, confirme
Vorenus ennuyé. Il a tué un homme, en plein jour.»
«Il faut faire quelque chose !», s'exclame Octave.
«Nous ne ferrons rien du tout, déclare César.
L'homme qu'il a tué était Aufidius Dento. Il
codirigeait la confrérie des ferronniers du Cælus.
Il était très populaire, et un de mes plus violents
critiques. Si je le [Pullo] sauve, on me soupçonnera
d'être derrière tout ça.» «Ce
meurtre, l'as tu commandité ?» «Jusqu'à
ce jour, j'ignorais jusqu'à son nom, répond
César, catégorique. Je ne peux pas connaître
tous mes opposants. Mais la plèbe ne me soutiendrait plus
s'il se racontait que j'envoie mes anciens soldats tuer mes adversaires,
ajoute le dictateur. (A Vorenus :) Je suis désolé
pour ton frère d'armes. Mais les soldats ne sont pas au-dessus
des lois.»
Octave s'éclipse, et charge l'intendant Castor de convoquer
Timon le Juif pour le lendemain matin.
11/11. L'aube retrouve Marc Antoine et Atia
au lit; Niobé, rentrée chez elle, interroge son
mari : «Qu'est-ce qu'elle a cette robe ?» [...
qu'elle a faite elle-même, de ses blanches mains
!]. Dans son cul-de-basse-fosse de la Mamertine, Pullo capte indirectement
les lueurs de l'aurore.
Au Forum, Timon passe rapidement l'échoppe de Moïse,
le libraire : il doit absolument trouver un avocat pour T. Pullo.
Les avocaillons en quête de travail se récusent les
uns après les autres : «A côté, sucer
une queue pleine d'épines serait une vraie douceur.»
Finalement, un vilain petit canard lève courageusement
la main, Priscus Mævius - un avocat bègue...
L'avocat Mævius descend dans la geôle infecte, rencontrer
son «client». Pullo l'accueille en mâchant consciencieusement
un quignon de pain. «Et si tu disais qui t'as commandité
ce meurtre ?» «Désolé, j'ai donné
ma parole», répond-il paisiblement. «Peut-être
étais-tu dans le besoin... pour soigner ta mère
malade... ou un ami...», plaide l'avocat. «Non,
je voulais cet argent pour le boire.» «As-tu un ami
qui pourrait parler ta faveur ?» Pullo réfléchit,
puis hausse intérieurement les épaules. «Il
est bon ce pain. Tu en as encore ?»
11/12. Sur le Forum, on amène Pullo
enchaîné. Deux avocats se lèvent : le faible
Priscus Mævius, son défenseur, et Maius Nigidius,
l'accusateur public, qui se lance dans un brillant panégyrique
d'Aufidius Dento, citoyen estimé et respecté de
tous. Et de conclure : «Je ne prendrai pas davantage
votre temps à vous prouver sa culpabilité. Regardez-le.
Nous tous savons qu'il est coupable !» Dissimulé
dans la foule, Vorenus est venu assister, impuissant, à
la fin de son vieux camarade. Il se heurte à Mascius qui,
avec d'autres vétérans, sont accourus armés
pour défendre leur camarade, victime emblématique
de leur cause... Dans la foule, plusieurs soldats déguisés
en civils sont prêts à en découdre si Pullo
était condamné à la mort. Terrifié
par les conséquences politiques d'une telle agression,
Vorenus exige de Mascius qu'il rappelle ses gens. «Comment
en sommes-nous arrivés-là ?» César
ne peut rétablir la loi et commander, s'il permet à
des soldats de tuer impunément des citoyens, expose l'ancien
préfet. «Dans l'intérêt de la République...»,
Vorenus obtient que les anciens soldats renoncent à la
violence. Titus Pullo, lui, est condamné à périr
sous le glaive des gladiateurs.
11/13. Le soir même, sur la terrasse
éclairée aux flambeaux, César et Brutus disputent
une partie de dames. «Je t'ai toujours considéré
comme un fils, Brutus. J'ai besoin de quelqu'un en Macédoine,
pour remplacer cet idiot de Valérius. Et j'aimerais que
ce soit toi. (...) Réfléchis-y. Il me faut un homme
de confiance.» «Tu cherches à m'éloigner
de Rome. Tu te méfies de moi.» César finit
par convenir que l'implication du nom de Brutus dans la campagne
de graffitis menée contre lui, lui pose un problème.
Même si l'intéressé est complètement
innocent, il en est devenu le symbole par le nom qu'il porte.
Peut-il faire confiance à son «fils», étant
donné sa trahison passée ? Brutus affirme qu'il
n'a en rien trahi. «Si tu m'avais dit me que tu allais
marcher sur Rome, et demandé mon allégeance,
je te l'aurais donnée. Je t'aurais jugé fou, mais
je t'aurais donné mon allégeance, puisque je te
regarde comme mon père... Mais tu ne m'as pas demandé
mon allégeance : tu l'as exigée à
la pointe de l'épée.»
Ce soir-là, la totale rupture entre Brutus et César
est consommée...
11/14. Dans son cachot, Pullo capture une
blatte, qu'il broie entre ses doigts, offrant son sang en sacrifice
à «Janus, Dis et Gaia» qu'il prie d'accorder
«à Eiréné, à Lucius Vorenus
et à sa famille une vie longue et heureuse. Et pour Eiréné...
faites-lui savoir comme je regrette...» Il enterre rapidement
sa victime dans la terre meuble, quand on vient le chercher. Il
est amené dans une arène aménagée
dans un coin du Forum. Sur ce entrefaites, César confie
une mission à Posca...
11/15. Dans l'arène, Pullo dédaigne
de glaive qui lui est proposé, et s'assied dans le sable,
décidé à mourir. C'est contraire au scénario
qui prévoit qu'il doit mourir en affrontant trois gladiateurs.
«Méfiez-vous en c'est un soldat», murmure
l'un d'eux. «Tout ce que je veux, c'est mourir»,
leur déclare Pullo, qui ne souhaite pas se donner en spectacle
à la foule assemblée. Frustrés, les gladiateurs
le provoquent par des insultes. «C'est une chiffe molle
de la XIIIe.» Pullo croyait avoir atteint le fond de
la déchéance, et donc de l'indifférence.
Or, il existe encore une chose où le vétéran
se raccroche : son appartenance à la XIIIe. En moins de
temps qu'il en faut pour le dire, il transperce le premier avec
sa propre lance, décapite le deuxième avec le bord
de son bouclier et, d'un revers, tranche le bras du troisième.
Haletant, couvert de blessures, il essaie de reprendre son souffle
dans un coin de l'arène quand s'avance contre lui un quatrième
adversaire, un géant armé d'une masse d'arme en
forme de crâne humain, couturé de cicatrices, les
muscles bandés, les veines saillantes. Dans la foule, Vorenus
ne résiste plus. Il saute dans l'arène pour défendre
son camarade de la XIIIe ! Et rapidement, le gladiateur géant
s'effondre, une jambe tranchée. Vorenus lui enfonce résolument
dans la jugulaire la pointe qui termine sa masse d'arme. La foule
ravie leur fait un triomphe !
11/16. Dans son rade favori de l'Aventin,
Erastes Fulmen déguste des anguilles... quand Posca vient
lui apporter une bourse bien garnie tout en le gratifiant d'un
avertissement de la part de César : «La prochaine
fois qu'on t'engageras, tache de ne pas employer des vétérans.»
A quelque distance de là, Brutus déclare à
sa mère Servilia : «Mère, je ne dois plus
rien à César. Je dois faire mon devoir. Je parlerai
à Cassius et nous aviserons.»
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EPISODE 12
Les Ides de Mars (Kalends of February) (20
novembre 2005, HBO)
Réal. : Alan TAYLOR
Scén. : Bruno HELLER
Titus Pullo s'échappe de l'hôpital où
il était soigné et rejoint Lucius Vorenus à
Rome. Celui-ci est inquiet du sort que lui réserve César
qui l'a convoqué. Or César le nomme sénateur
et lui demande de rester près de lui. Ayant introduit des
Gaulois au Sénat, il craint la colère de certains
sénateurs romains. En effet, chez Servilia, la conjuration
contre le «tyran» se précise. |
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Le triomphe de Jules César |
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12/1. A la suite
de leur épique combat dans d'arène, Pullo et Vorenus
sont devenus les héros de la plèbe romaine : des
fresques murales, des chansons, des pantomimes rappellent leur
exploit et les célèbrent comme les incarnations
de la fraternité et de la rédemption. A grand renfort
d'accessoires obscènes, une troupe en a fait son spectacle,
au Forum. «Ils sont assez forts, mais je les trouve beaucoup
plus beaux en vrai», fait dans une moue Atia, venue
assister à une de ces représentation théâtrale.
Dans un hôpital d'Avernum, Pullo, mal en point, se remet
de ses blessures quand il surprend un artiste venu croquer son
portrait pendant son sommeil pour une fresque le représentant
avec Vorenus - une commande des teinturiers de l'Aventin. Apprenant
que toutes les femmes ont fait de lui leur idole, Pullo décide
de rentrer à Rome malgré toutes ses blessures non
encore cicatrisées. Le cheval qu'il emprunte l'abandonne
sur la voie Appienne, quand il chute épuisé.
12/2. Ayant sauvé un homme condamné
à mort par César, Vorenus s'attend à tomber
en disgrâce. Pour se préparer à l'exil, Vorenus,
Niobé, leurs enfants et les domestiques, accompagnés
d'un prêtre, visitent la terre qui leur a été
donnée. Le Pater familias parle d'y établir
une ferme et d'y mener la vie des paysans. Le prêtre psalmodie
des incantations, tandis que le couple, allongé dans un
sillon, mime l'accouplement qui doit féconder la glèbe
(8).
Retour chez eux, à Rome, on leur amène Pullo retrouvé
à moitié mort près des portes de la ville.
Ses plaies se sont rouvertes. Il doit demeurer couché,
immobile pendant dix jours, ligoté pour ne pas bouger.
«Il restera ici le temps de récupérer.
Il ne nous fera pas d'ennuis, dans cet état-là»,
plaide Vorenus. «Comme par le passé ?»,
fait Niobé avec humeur. C'est Eiréné qui
est chargée de nourrir Pullo à la cuiller; celui-ci
la regarde avec adoration même lorsque la jeune femme crache
dans son écuelle. «Content de te voir»,
lui dit Pullo. La jeune esclave brandit un couteau en tremblant.
«Je te comprends. Mais si tu n'y arrives pas, ça
m'arrange...» Heureusement, Niobé a vu le manège
et confisque l'arme.
Vorenus est convoqué chez César. «César
va te renvoyer dans l'arène... et moi avec ?»,
confie-t-il à Pullo. Niobé dissimule un talisman
dans les plis de la toge de son mari, à demi-rassuré
: «Que Junon te protège.»
12/3. Sur le Forum, le crieur public annonce
: «Aux calendes de février, César nommera
cent nouveaux sénateurs. Le troisième jour avant
les nones, il offrira un banquet public pour célébrer
leur investiture. Les esclaves et les affranchis ne peuvent être
nommés.»
12/4. César expose à Cicéron
ses projets urbanistiques. D'abord détourner le Tibre à
un certain endroit de son cours, pour prévenir ses débordements.
Ensuite un nouveau Temple à Vénus, déesse
de la fertilité. «Excellent, approuve Cicéron
avec indifférence. Mais... cette extension du Sénat
?» Marc Antoine opine : «Des Gaulois et des
Celtes.» C'est à ce moment précis qu'arrive
Vorenus. «Alors Vorenus, que vais-je faire de toi ?,
l'apostrophe César. Tu as osé t'opposer à
ma sentence. C'est un délit grave. Trahison et désobéissance.»
«Je n'ai aucune excuse», reconnaît Vorenus,
penaud. «Je devrais te faire jeter de la Roche Tarpéienne.
Mais le Peuple vous considère, toi et Pullo, comme des
héros. Et je ne veux pas provoquer sa colère. Mais
si je te punis pas, alors je dois te récompenser - sinon,
je vais passer pour un faible. Alors, à la demande du Peuple
romain... je te fais sénateur. Tu entends, Cicéron
?» Il donne l'accolade au vétéran. «Désormais,
tu m'accompagnes partout, pour parfaire ton éducation...»
Cicéron se révolte, tout en s'excusant auprès
de Vorenus («sans vouloir t'offenser...») :
«Mais César, tu ne vas pas nommer Sénateur
un simple plébéien ?» «Je veux au Sénat
les hommes les plus braves, pas des vieillards ramollis»,
rétorque le dictateur.
Avec tes Gaulois et tes plébéiens, tu devrais doubler
ta garde, conseille Marc Antoine; et Posca de renchérir
: «Il y a longtemps que je le lui dis !» «Une
garde plus importante me protégera-t-elle de mes amis ?»,
interroge César. «... Non que tu doives te méfier
de moi», proteste Antoine. «Je sais, concède
César. Ce n'est pas que j'ignore que tu puisse être
méchant et pernicieux. Mais si tu avais voulu me trahir,
il y a longtemps que tu l'aurais fait...» «Ce ne sont
pas les tentations qui m'ont manquées...», plaisante
Antoine.
César se tourne vers Posca : «Qui oserait porter
la main sur moi, alors que le féroce Vorenus est à
mes côtés ?» «Astucieux», admet
le fidèle Posca, dont le visage s'éclaire. «Après
toutes ces années à mon service, Posca, tu es encore
étonné que je sois capable de nouer mes sandales
tout seul», raille le dictateur.
12/5. Lucius Vorenus et Niobé font
des projets pour leur fille Vorena. «La fille d'un sénateur
ne doit pas rester seule.» «Je ne suis pas pressée.»
«On te trouvera un sénateur vieux et riche, sourit
sa mère. Les belles robes, les bijoux, les esclaves.»
«Mais je n'ai pas besoin de ces choses frivoles»,
proteste Vorena. «Frivoles ?, s'étonne son
père. Moi, à ton âge, je devais chercher
ma nourriture dans le caniveau. Les belles robes et les bijoux
ne sont pas des choses frivoles. Ca montre aux autres que ta famille
est riche. Que tu es aimée, protégée, estimée...»
«Mais je veux me marier avec un homme que j'aime.»
«Des époux qui s'aiment, ça se mérite,
rit Niobé. Des mariés qui s'aiment dès
le début, ça serait étrange.» «D'abord
tu seras une matrone vertueuse !, planifie Vorenus. L'amour
viendra après. Regarde. Ca n'a pas été si
simple pour ta mère et moi. Vois-nous, maintenant !
(Une petite tape amicale à sa fille :) Alors, tu es
d'accord... un vieil homme riche ?»
12/6. Cette nuit-là est une nuit blanche
pour César. Son épouse Calpurnia a fait de mauvais
rêves. César se moque bien des présages. Alors
Calpurnia lui demande s'il n'est pas las de la politique. «Oh
que oui, répond César. Mais il y a tant à
faire.»
Pendant ce temps, chez Brutus, Servilia invoque les ancêtres
des Junii pour qu'ils protègent son fils dans la
réalisation des objectifs qu'il s'est fixés. «Faites
que son but soit juste. Emplissez son cur de fureur sacrée
!»
12/7. Au Sénat arrivent les nouveaux
sénateurs, des Belges et des Celtes barbus et chevelus
(9).
«Il y en a même un qui a des boucles d'oreilles
!» «Ca y est, les Gaulois nous ont envahis !»
Les commentaires fusent. Casca, Cicéron, Brutus, Cassius,
Quintus Pompée, Cimber et d'autres se réunissent
chez Servilia. «... Et bientôt des affranchis.
Le Sénat va devenir une maison de passe. Nous, les nobles,
serons dépassés en nombre par la cohue étrangère.
Nous serons dégradés. Impuissants.» «Mais
que faire de Lucius Vorenus, qui est toujours à ses côtés
? Nous risquons de nous aliéner le Peuple si nous tuons
aussi son idole !» (10).
«On pourrait acheter son cuisinier ?», suggère
Cimber. Brutus proteste : «S'il vous plaît ! Il
ne s'agit pas d'un vulgaire meurtre, mais d'un acte honorable,
qui doit être accompli à la lumière du jour,
en plein Sénat, de nos propres mains... de ma propre
main.»
Et cette nuit-là, pleins de pressentiments, Vorenus et
Niobé auront peur. Et Servilia ne trouvera pas davantage
le sommeil. Elle tourne et retourne la question de Lucius Vorenus.
Elle a déjà entendu ce nom (11)...
Elle décide alors d'inviter Atia pour le lendemain. «Que
peut-elle me vouloir, elle me hait !», s'étonne
Atia. «Moi aussi, répond Antoine. Mais
ça n'interdit pas l'amitié !» «Je vais,
bien sûr, accepter.» «Est-ce prudent ?»,
demande Antoine. «Probablement pas. Mais sa colère
m'amuse. (A Octave :) Toi, tu vas venir avec moi. Pour
me protéger. De la part de cette sorcière, je m'attends
à tout.» «J'ai pitié d'elle»,
murmure Octavie.
A l'aube des ides de
mars, Pullo boucle ses affaires, déclarant à Eiréné
qu'il va passer la journée à la campagne pour se
dégourdir les jambes, et visiter la chapelle de la déesse
Rusina (12)
afin d'implorer sa pitié. «Crois-tu qu'elle me
pardonnera ?», lui demande Pullo, les yeux suppliants.
«Qui connaît la volonté des dieux»,
répond la jeune femme. «M'accompagneras-tu ?»
Sur le Forum, le crieur public proclame que «le Sénat
se réunit aujourd'hui. Pas de jeux d'argent, pas de prostitution.
Puissent les dieux favoriser notre sacro-saint père C.
Julius Cæsar».
12/8. Vorenus rejoint César, entouré
de ses clients et précédé de ses licteurs,
qui prennent le chemin du Forum, malgré les présages.
La populace romaine l'acclame sur son passage, et le dictateur
radieux ne cesse d'échanger des salutations avec la foule.
Surgie de nulle part, Merula - la vieille servante de Servilia
- accoste Vorenus qu'elle tire de côté. «J'ai
des nouvelles de votre épouse, lui chuchote-t-elle
à l'oreille. Lucius n'est pas votre petit-fils, le fils
de Vorena, mais celui de Niobé qui vous a trompé
avec un boucher.» Le visage décomposé
par cette révélation, Vorenus abandonne le cortège
de César et se précipite chez lui, sur l'Aventin.
12/9. Sur les marches du Sénat, César
s'étonne de la disparition de Vorenus. Un solliciteur accapare
Antoine. A l'intérieur de la Curie, César se retrouve
entouré de conspirateurs qui brandissent des poignards.
C'est Cimber qui demande à César s'il a reconsidéré
l'exil de son frère. Le dictateur retient de la main une
première lame, mais sa paume et ses doigts sont profondément
entaillés. Casca se précipite et poignarde César
dans l'estomac. Et c'est la curée. Pendant que Brutus reste
paralysé, les autres conjurés se précipitent
frappant leur victime où ils peuvent, se gênant mutuellement.
Cicéron et d'autres
sénateurs se sauvent vers les portes. Bientôt le
corps gît par terre, secoué de spasmes. Cassius invite
Brutus, toujours hésitant, à faire ce pourquoi il
est venu, cependant que César, tentant de tirer sur sa
tête un pan de la toge, le regarde fixement, se vidant de
son sang, sa conscience s'estompant. Alors Brutus se penche et
lui porte le dernier coup, enfonçant sa dague dans l'estomac.
Dans une crispation d'horreur, César meurt en silence (13).
Quintus Pompée poignarde également Posca. «Voilà
le sort des Tyrans», émet sentencieusement Cassius,
soulevant la main de Brutus «vainqueur». Mais la Curie
est quasiment vide. Arrive Antoine, atterré, qui fixe la
scène un moment, puis se retire sans mot dire - incrédule.
12/10. Fou de rage, Vorenus est rentré
chez lui, sommant Niobé de lui dire la vérité.
«Ton fils !, hurle-t-il. Dis-moi que ce n'est
pas vrai.» Niobé ne peut pas répondre.
Vorenus démolit le mobilier, fracasse l'autel familial.
«Je croyais que tu étais mort...», balbutie
Niobé, pour toute explication de son erreur de jeunesse.
Trompé, bafoué, ulcéré - Vorenus souffle
comme une chaudière, sa main glisse sur la table à
la rencontre d'un couteau de cuisine. Alors Niobé recule
vers la fenêtre, «Lucius, ne blâme pas l'enfant»,
et... bascule dans le vide.
12/11. Chez Servilia, Atia et Octave ne peuvent
dissimuler leur stupéfaction lorsque leur hôtesse
les salue chaleureusement. Les mondanités échangées,
Servilia explique calmement pourquoi elle les a invités.
«Il est important pour moi que je sois la première
à vous dire ce qui s'est arrivé. (...) Le tyran
est mort. La république est rétablie. Tu es seule.
Veux-tu du miel et de l'eau ?» «Je ne veux rien, merci.»
«Ne crains rien. Je ne te ferai pas de mal. Pas tout de
suite», se délecte Servilia. Atia se ressaisit
et, l'air candide : «Mais pourquoi me ferais-tu du mal
? Nous sommes amies. Laissons la politique aux hommes. Nos familles...»
Tel un serpent enserrant sa proie, Servilia poursuit son idée,
sans écouter Atia : «... Pas tout de suite. Je
préfères te laisser souffrir, en douceur. Et intensément.
Comme tu m'as fait souffrir. Tu vas commencer par fuir. Pour sauver
ta vie. Et te cacher dans un trou en Grèce, ou en Illyrie.
Ne t'inquiète pas. Je te retrouverai.»
12/12. Sur l'Aventin, dans la cour de son
immeuble où elle s'est fracassée, Vorenus berce
le corps de Niobé en sanglotant, embrassant son visage
sans vie - sous le regard étonné du petit Lucius.
Dans la campagne romaine, Pullo consacre une poignée de
grains à la déesse Rusina, puis s'éloigne
vers l'horizon. En compagnie d'Eiréné... |
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Fatales ides de mars...
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Suite… |
NOTES :
(1) De fait, selon Suétone,
le premier jour (ex Gallio), le char de César
avançant derrière les quarante éléphants
porteurs de torchères, rompit son essieu en traversant
le Vélabre et l'imperator faillit être jeté
bas (SUÉT., Cæs., XXXVII, 3).
Avant César, Pompée - on ne s'autoproclame pas
Magnus pour rien - avait eu l'idée saugrenue de
remplacer les quatre chevaux de son quadrige par autant d'éléphants,
lors de son Triomphe ex Africa du 12 mars 79 (il triompha
aussi sur l'Espagne en 71, et sur l'Orient en 61). Malheureusement
pour lui, la Porta Triumphalis n'était pas assez
large, et il dut bien vite rappeler ses chevaux (PLUT., Pompée,
XIV, 6). - Retour texte
(2) Ces emblèmes de la cavalerie
romaine, empruntés aux Parthes, sont prématurés
à Rome, au temps de César... - Retour
texte
(3) Utilisés dans certaines
cérémonies religieuses, les tambours ne font pas
partie des instruments de musique militaire romains. - Retour
texte
(4) L'urine servait de détergent,
pour dégraisser les lainages. - Retour
texte
(5) Faut pas être ethnologue
pour savoir que les Romains sont, essentiellement, des paysans
et des guerriers. Pas des marchands. Merci, Georges... - Retour
texte
(6) Six licteurs... à quel
titre ? - Retour texte
(7) Grosso modo : la
Hongrie actuelle. - Retour texte
(8) Dans la mythologie grecque, le
Titan Iasios et Déméter (la Déesse-Mère)
s'accouplent ainsi dans un champ trois fois labouré.
Emprunté au Rameau d'Or de J.G. Frazer,
le rite décrit dans la télésuite HBO est
au moins plausible, à défaut d'être - à
notre connaissance, du moins - attesté dans les usages
romains. (Le cinéaste Pier Paolo Pasolini a fait grand
cas de ces rites agraires dans Médée [1969].)
- Retour texte
(9) Comme pour les Egyptiens ptolémaïques,
la télésuite HBO, ici, verse également
dans le cliché conventionnel du barbare hirsute - comme
pour Vercingétorix dans les précédents
épisodes. On admet actuellement que les Gaulois étaient
plutôt glabres, aux cheveux courts. - Retour
texte
(10) La question s'est effectivement
posée aux conjurés, mais pas à propos de
Vorenus bien entendu - du reste, à côté
de celle de César, il aurait été douteux
que la populace romaine se soit formalisée du meurtre
d'un gladiateur-sénateur, fut-il l'idole du moment. Ce
genre de popularité n'a qu'un temps.
C'est à propos de Marc Antoine, qu'elle s'est posée.
Fallait-il également, se demandèrent les conjurés,
tuer le consul Marc Antoine ? La question fut résolue
en écartant Antoine de César, sous un prétexte
quelconque, le temps d'exécuter le «tyran»
!
(Par ailleurs, on aura remarqué l'analogie entre le personnage
de Vorenus et celui de Tyrannus dans le feuilleton ABC Empire.)
- Retour texte
(11) Quand, pour le compte de Servilia,
Octavie s'efforçait d'arracher des confidences à
son frère Octave, celui-ci lui avait avoué son
unique secret : l'exécution de l'amant de la femme de
Lucius Vorenus. - Retour texte
(12) Rusina (ou Rurina) est une divinité
campagnarde romaine (AUGUSTIN, Cité de Dieu, IV,
8). - Retour texte
(13) Et sans proférer de «paroles
historiques». - Retour texte
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