courrier peplums

MARS - AVRIL 2004

 

 

 
28 Mars 2004
Florent Pallares a écrit : 
 

Je suis étudiant en histoire de l'art et archéologie, ainsi qu'en art du spectacle mention études cinématographiques et j'ai décidé de faire mes deux mémoires sur La chute de l'Empire romain d'A. Mann et Gladiator de R. Scott. Je vous écris car au fur et à mesure que mes recherches avancent, vos connaissances sont celles qui m'éclairent le plus souvent. Je cherche le maximum d'information sur ces deux films, surtout concernant le premier.
Quel site me conseiller, quelle lecture etc. Avez vous des information sur les erreurs historiques du film de Mann ?

En fait mes axes de recherches portent sur l'analyse de ces deux films, sur leur réalité historique, sur l'évolution de la recherche sur l'antiquité, sur l'évolution de la production du système Hollywoodien (le virtuel...) et sur le discours politique de ces deux films, le but étant de mettre en évidence les ressemblances et dissemblances des deux films, montrant ainsi l'évolution historique, économique et politique dans le système de production cinématographique Hollywoodien entre 1963 et 2000. Je vous remercie encore une fois pour votre aide.

 
 
RÉPONSE :
 

J'ai un peu envie de dire que Gladiator comme La Chute de l'Empire romain sont des uchronies, car à part Marc Aurèle, Lucilla et Commode, tous les autres personnages de ces films sont romanesques. Il faut rappeler que, justement, le mot «uchronie» a été inventé par le philosophe français Charles Renouvier (1876) dans une sorte de roman philosophique précisément intitulé Uchronie et réédité en 1988 chez Fayard. Renouvier postulait qu'Avidius Cassius avait succédé à Marc Aurèle, non Commode...

Je vous recommande la bio de Marc Aurèle par Charles Parain (rééd. chez Complexe) et celle de Pierre Grimal (chez Fayard), sans oublier l'Histoire Auguste, rééditée chez Bouquins.
Il y a aussi les excellents romans de François Fontaine centrés sur les Antonins, en particulier L'Usurpation, ou le roman de Marc Aurèle (à propos d'Avidius Cassius - Fayard, 1979) et D'Or et de Bronze - Les Mémoires de T. Pompeianus (Pompeianus, second mari de Lucilla - Julliard, 1986) ainsi que La Pourpre et l'Olivier de Gilbert Sinoué (Orban, 1987) sur Marcia, la célèbre concubine chrétienne de Commode, et le Pape Calixte... Enfin, de François Fontaine encore, Douze autres Césars (Julliard, 1985), de Nerva à Alexandre-Sévère, qui se présente comme une «reconstitution» des oeuvres perdues de L. Marius Maximus (qui a effectivement existé). Ces quatre romans vous donneront une idée de ce qu'on aurait pu faire sur cette période et dans le respect de l'histoire. La novélisation de La Chute de l'Empire romain par Harry Whittington a été publiée chez Marabout (Géant, n° 205, 1964) à l'époque, et celle de Gladiator par Dewey Gram, chez J'Ai Lu (n° 5743).
Mais si votre mémoire porte sur l'archéologie, il me semble que c'est le Forum romain que vous devriez forer... Celui du film - superbe, au demeurant - est celui du IVe s. de n.E., inspiré de la maquette d'Italo Gismondi (1937) qui se trouve au Musée de la Civilisation romaine, à Rome (E.U.R.), où du reste on a tourné pas mal de péplums dans les années '50-'60, mais c'est une autre histoire ! Sur ce sujet, je vous signale deux articles de ma plume : 1) «Architecture et péplum. La cité antique, ou Le pouvoir de l'imaginaire», in «Architecture et cinéma», CinémAction, n° 75, 2e trim. 1995, et 2) «La vision critique du péplum : le problème de la reconstitution», in «Revivre le passé grâce à l'archéologie / L'archéologie expérimentale», Les dossiers d'archéologie, n° 216, septembre 1996.

Vous savez, en matière d'anachronisme... comment y échapper, au cinéma ? Ca va des bouchons de gourde que l'on dévisse (comme si l'antiquité produisait industriellement des pas filetés) aux plastrons de légionnaire formés de trois disques (vieux modèle samnite parfaitement anachronique au IIe s. de n.E.) pour La chute... jusqu'au casque de gladiateur à masque facial rentrant (inspiré des modèles contemporains pour pilotes) et au clin d'oeil aux grand-messes nationales-socialistes dans Gladiator. Paraît même que, dans ce dernier film, le panorama de Rome serait en réalité celui de Malte dans lequel on aurait injecté par infographie des monuments néo-classiques londoniens - mais je n'ai pas vérifié.

J'ai naguère publié sur Cinerivage.com (qui n'existe plus) une analyse de Gladiator : actuellement, vous pouvez la consulter sur le site fanique du film de Ridley Scott, animé par Dominique Charlier, qui publie des romans dont Maximus est le héros (écrits par des jeunes femmes, fans de Russell Crowe).

J'envisage de mettre un épais dossier sur mon site PEPLVM-IMAGES, consacré à ces deux films, mais pour l'instant je planche sur d'autres projets.

Ce type de cuirasse à trois disques, inspiré des anciens guerriers Samnites des Guerres sociales de la République, est anachronique au IIe s. de n.E

 
 

 

 
18 Mars 2004
Labid Badr a écrit
 

Cher Monsieur ELOY,
Bonsoir
Ouf ! Je vous ai enfin localisé au beau milieu de la jungle de la Toile, après tant de recherches inespérées, et ce, depuis la fin tragique du regretté Cinerivage.com et ses «Nouvelles du Fronton», suite à la disparition de Françoise De Paepe, que Dieu ait son âme en sa miséricorde. Amen.

Je ne veux pas visiter complètement votre nouveau site avant de vous écrire d'abord, car ma joie est immense, c'est une énorme surprise de vous retrouver je vous le jure, allez y continuez. Excusez-moi de vous parler ainsi car je suis fou de joie.
Celui qui vous parle est un ancien passionné des péplums italiens qui a eu l'occasion de voir dans les salles de cinéma des années 1960 à 1965, alors qu'il avait onze à seize ans, les films qui lui plaisaient dans ce temps jadis - ceux qu'on appelait à l'époque, et quelle époque !, «les films des gros bras».
En cette belle occasion je tiens à vous faire une petite remarque, concernant quelques titres que vous venez de négliger je ne sais pas pourquoi, car vous avez fait mieux au Cinerivage.com, à savoir : La filmographie de Maciste - Samson, le Renverseur de colonnes - Goliath, la Revanche du Philistin - Atlas - Emiliano (Dernier titre présenté aux Nouvelles du Fronton, du défunt Cinerivage.com).
Et, sans vouloir être long, je vous demanderais de bien vouloir me faire connaître dans la mesure du possible les dates de sorties en France des films désignés ci-après et qui manquent à mes connaissances, à savoir : Les Travaux d'Hercule 1958 ? - Les Amours d'Hercule - Le Géant de la vallée des rois - Le gladiateur de Rome - Goliath contre les Géants - La vengeance d'Ursus - Toto contre Maciste - Les Trois Stooges contre Hercule - La fureur d'Hercule - Maciste dans la vallée des Lions - Goliath et l'Hercule noir - La Fille des Tartares - Ursus le Rebelle - Samson l'Invincible.

 
 
RÉPONSE :
 

En ce qui concerne «Les Héros du Samedi Soir» j'ai bien l'intention de rééditer tout ce qui se trouvait sur Cinérivage ainsi que les chapitres encore inédits. Certains de ces inédits sont déjà en ligne; pour le reste : un peu de patience, Rome ne s'est pas bâtie en un jour !

Pour les dates de sortie en France dans les années '60-'70, je me base d'ordinaire sur la Saison cinématographique, hélas cette précision ne figure pas toujours. Après vérification, je trouve néanmoins ceci - les dates italiennes proviennent en général du «Gremese», Dizionario del cinema italiano (I Film dal 1960 al 1969) :

  • Les Travaux d'Hercule (1958) : sortie à Paris, 22 avril 1959
  • Les Amours d'Hercule (1960) : sortie en France, février 1961
    (à Rome, avril 1960 ?)
  • Le Géant de la vallée des Rois (1960) : sortie à Paris, 3 mars 1961
  • Le gladiateur de Rome (1962) : sortie à Paris, 19 décembre 1962
  • Goliath contre les Géants (1961) : ?
    (à Rome, mai [ou octobre] 1961; à Madrid, novembre 1963 (1) ; à New York, 14 avril 1963)
  • La vengeance d'Ursus (1961) : ?
    (en Italie, avril 1962 ?)
  • Toto contre Maciste (1961) : inédit en France
    (en Italie, courant 1962)
  • Les Trois Stooges contre Hercule (1961) : ?
    (sortie à New York, 1er février 1962)
  • La fureur d'Hercule (1960) : sortie à Paris, 19 mai 1961
    (aux U.S.A., avril 1962; à Rome, mars 1961)
  • Maciste dans la vallée des Lions (1961) : sortie à Paris, 18 juillet 1962
  • Goliath et l'Hercule noir (1963) : sortie à Paris, avril 1964
    (en Italie, ... 1963)
  • La Fille des Tartares (1961) : ?
    (en Italie, avril 1962 ?)
  • Ursus le Rebelle (1962) : sortie en France, ... 1964
  • Samson l'Invincible (1963) : ?
 
 

 

 
1er Avril 2004
Francis Moury a écrit :
 
Un lien supplémentaire vers une «news» de dvdrama contenant des commentaires annexés sous ladite nouvelle du refus de MK2 de diffuser le film dans ses salles en France

Un petit bémol à votre article : je ne crois pas que la religion catholique «méprise» la chair comme on le dit souvent. Ce n'est pas un platonisme mais son contraire : une incarnation fondatrice. D'où les méprises gnostiques constamment combattues par l'Eglise... sur les rapports entre christianisme et philosophie grecque, une excellente source : le R.P. A.J. Festugière (membre de l'Institut) dont les études très sérieuses sont éditées chez Vrin notamment mais aussi Aubier Montaigne, etc. mais il y en a bien d'autres... Quant à la mortification des mystiques, c'est un peu différent : ici je crois qu'il faudrait relire la très volumineuses Histoire littéraire du sentiment religieux en France depuis la fin des guerres de religion jusqu'à nos jours de l'abbé Brémond (le fameux contemporain de Paul Valéry qui avait aussi lancé un débat sur «la poésie pure» !) et aussi les études sur les mystiques allemands, français, espagnols replacés dans leurs contextes avec commentaires d'époques et mise en perspective théologique... enfin cela dit, votre travail est toute manière très suggestif et fournit les tenants et aboutissants du débat en cours avec une très louable précision.
 
 
RÉPONSE :
 

Merci pour cette mise au point, cher Francis. J'ai peut-être été un peu vite en la matière (voir article "De Saint-Sulpice aux saints supplices"), mais les processions de flagellants et autres malades... volontaires pour la crucifixion (très en vogues dans les pays hispanophones), sans oublier les cilices, mortifications, voeux de célibat et compagnie, m'ont toujours fait un peu froid dans le dos, à moi qui serais plutôt pétri d'idéaux gréco-romains, et des joies charnelles en général...
N'oublions pas qu'il y a moins d'un siècle, dans les classes supérieures de notre belle société, on enfermait pour «hystérie» des femmes dont le seul crime était d'avoir librement disposé de leur corps (ce dont leurs maris ne se privaient pas, de leur côté), allant jusqu'à procéder à l'ablation médicale du clitoris. Comme ça se pratique de nos jours encore dans certaines régions d'Afrique, pour notre indignation. Heureusement, nous avons tout de même fait quelques progrès depuis...

Vous évoquez une «incarnation fondatrice». Moi je parlerais plutôt - dans une perspective freudienne - du «meurtre du Fils» et de cannibalisme sublimé au cours d'un festin totémique appelé «Eucharistie». Le mérite de Mel Gibson aura été, au moins, de le rappeler. Ah ! le choc pour ces braves gens qui ne voyaient les Pâques que comme une collecte d'oeufs en chocolat et de petits lapins roses. Même si l'agnostique, que je suis, se sent lié à la civilisation judéo-chrétienne, il y a dans le christianisme de lourds symboles qui ne l'enthousiasment pas, et que les gens ont tendance à refouler dans un coin de leur mémoire, à occulter.

 
 

 

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20 Avril 2004

Nous avons reçu :

Medusa Fanzine, nĀ 21, avril 2004
Un zine-papier dévoué au cinéma-bis (horreur, western, thriller, érotisme) mais faisant un large accueil au péplum. Dans le présent numéro : La bataille de Corinthe (Il conquistatore di Corinto) / Tarzan contre les coupeurs de têtes (Maciste contro i cacciatori di teste) / Marchands d'esclaves (Anthar. Il Mercato di Schiave) / Toryok, La Furie des Barbares (La Furia dei Barbari) / Les légions de Cléopâtre (Le legioni di Cleopatra) / Le siège de Syracuse (Archimede. L'assedio di Siracusa) / La fureur des gladiateurs (I due gladiatori) / Carthage en flammes (Cartagine in fiamme) / Le Géant de Thessalie (I Giganti della Tessaglia) / Les Vikings attaquent (I Normanni) / Sémiramis, déesse de l'Orient (Io, Semiramide) / L'esclave de Catthage (Le schiave di Cartagine) / L'art d'aimer (Ovidio, Ars Amandi). Découvrez sur le site de Medusa tous les détails utiles sur ces publications.

Vous pouvez vous procurer ce numéro de Médusa pour 10 EUR (frais de port compris) en écrivant à :
Didier Lefevre
499 rue Edouard Vaillant
Résidence Les Mésanges, Appt. 6
59450 SIN LE NOBLE

... ou adressez un courriel à l'éditeur : Lmedusafan@aol.com

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COURRIER Janvier - Mars 2004 - NOTES :

18 Mars 2004

(1) Curieux, pour une coprod. italo-espagnole. - Retour texte