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Empire
[mini-série TV]
(J. GRAY, K. MANNERS, G. YAITANES - EU, 2005)

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Sur cette page :

Bluette impériale...

1. L'intrigue

2. Octave

3. L'effet Gladiator

4. A propos de quelques personnages

5. Une minisérie ABC

5.1. Casting
5.2. Réalisation

Pages suivantes :

6. Fiche technique et scénario

7. Chronologie

DVD empire

(© ABC Media)

 

Bluette impériale...

Tout amateur de péplum connaît le Jules César de Shakespeare, plusieurs fois porté à l'écran. Il reste pourtant sur sa faim. Que s'est-il passé entre l'Acte III, scène 2, où l'on voit Marc Antoine faire l'éloge funèbre de César, avec toutes les scènes d'émotion que ses propos suscitent dans la foule, et l'Acte IV, scène 1 qui lui fait suite, où on voit le même Antoine tranquillement occupé à dresser la liste des proscriptions en compagnie de ses associés Lépide et Octave ? Alors qu'en est passé de plus de la moitié, c'est ici qu'ex nihilo Octave fait sa première apparition dans cette tragédie qui compte cinq actes.

Les quelques répliques de la brève scène 3, transitoire, où la foule met en pièces Cinna, un malheureux poète dont le seul tort est de porter le même nom qu'un des assassins, nous laisse néanmoins entrevoir que la succession de César fut tumultueuse, à défaut de nous apprendre ce qui se passa au cours de ces dix-huit mois qui séparent la mort de César (15 mars) et la constitution du second triumvirat (27 novembre de l'année suivante).

Or Shakespeare ne nous dit point de quelle façon le jeune Octave, âgé de 18 ans, se positionna entre les leaders du parti césarien : le consul Marc Antoine et le maître de cavalerie Lépide.

Empire, la télésuite de Gray, Manner et Yaitanes, nous propose une reconstitution partielle des événements courant de ces Ides de mars 44 à la bataille de Mutina - sur laquelle s'achève le sixième et dernier épisode. Cette «bataille de Modène» qui, le matin, vit Antoine vainqueur d'Octave et Pansa; et, le soir, le même être mis en déroute par le consul Hirtius (14 avril 43).

Bien sûr, il s'agit d'une reconstruction davantage que d'une «reconstitution». Un peu dans l'esprit décontracté des péplums des Golden Sixties, lesquels on s'en souvient se focalisaient davantage sur des prouesses individuelles de sympathiques spadassins que sur les détails d'intrigues politiciennes et leurs enjeux géostratégiques. Octave devra s'y battre pied à pied pour conserver son statut de personnage central, que lui contestent les prouesses de son dévoué garde du corps, le gladiateur Tyrannus.
C'est que les scénaristes n'ont que faire d'une restitution scrupuleuse de tractations de banquiers ou d'intrigues sénatoriales pour le contrôle de telle ou telle province... et des légions qui s'y trouvent (1). La colossale somme d'érudition que Colleen McCullough peut - pour notre plus grand délice - mettre dans ses épais romans, ne saurait tenir dans une minisérie-TV.

Comme souvent au cinéma, il ne faut pas espérer trouver une relation très exacte des faits historiques connus (voyez notre Chronologie) - mais plutôt une ambiance, un contexte, avec un Marc Antoine plus fielleux que le vrai, et un gentil jeune homme bien comme il faut, que l'on veut spolier de son héritage. Poncif obligé, la dantesque caserne des gladiateurs d'Arkham est là pour nous rappeler la misérable condition des esclaves (la révolte de Spartacus n'est pas si éloignée dans le temps : elle a débuté exactement trente ans plus tôt).
Alternant avec quelques brèves séances au Sénat, les banquets de Marc Antoine où sont invités le gratin de la politique et de l'armée romaines permettent de faire passer l'essentiel de ce qu'il y a à savoir : une poignée de légats partagés dans leurs affections ou leurs intérêts - pour ou contre Antoine, ou Octave, ou le Sénat - monnaient leur ralliement. Toutefois, au contraire de ce que nous apprend la mini-série, ce n'est pas Octave qui aurait été victime d'une tentative d'empoisonnement par Marc Antoine. Bien au contraire, c'est ce dernier qui - vrai ou faux - prétendit que le jeune Octave aurait cherché à soudoyer quelques membres de sa garde pour l'assassiner (SUÉT., Aug., X, 5). Le scénariste s'est, bien sûr, empressé de gommer les aspérités du futur empereur Auguste.
En revanche, si César ne décima point les survivants de la légion durement étrillée à Bibracte (sept cents légionnaires et une quarantaine de centurions tués, d'après La guerre des Gaules), Marc Antoine eut bien, lui, à recourir à cette détestable extrémité quand l'argent corrupteur d'Octave détacha de lui ses soldats les plus vénaux. Dure époque.

1. L'intrigue

Elle est tout entière contenue dans le chapitre X de la Vie d'Auguste de Suétone : «(1) (...) Dès qu'il fut revenu d'Apollonie, il [Octave] résolut d'attaquer à l'improviste Brutus et Cassius; mais ils prévinrent ce danger par la fuite. Alors, s'armant de l'autorité des lois, il les accusa, en leur absence, du meurtre de César. (2) Il célébra lui-même les jeux institués en mémoire de la journée de Pharsale, parce que ceux qui en étaient chargés n'osaient pas s'en acquitter. (3) Pour assurer l'exécution de ses volontés, il se porta candidat à la place d'un tribun du peuple qui venait de mourir, et cela, quoiqu'il fût patricien, mais non encore sénateur. (4) Toutefois, éprouvant beaucoup d'opposition de la part du consul Marc Antoine qu'il avait cru devoir être son principal appui, et qui ne lui accordait rien que le droit commun, celui qui découlait des règles établies, encore en stipulant pour lui d'immenses avantages, il passa dans la faction des grands. Il savait qu'Antoine leur était odieux, surtout depuis qu'il tenait Decimus Brutus assiégé dans Modène, et qu'il voulut le chasser d'une province qu'il avait reçue de César avec l'approbation du Sénat. (5) D'après le conseil de quelques-uns, Auguste lui suscita des assassins; mais le complot fut découvert. Alors, craignant à son tour, il leva des vétérans qu'il combla de largesses pour les appeler au secours de la république et au sien. Il reçut ordre de se mettre à la tête de cette armée, comme propréteur, et d'aller avec Hirtius et Pansa, nommés consuls, soutenir Decimus Brutus. Cette expédition fut terminée en trois mois et en deux combats. (6) Dans le premier, il prit la fuite, s'il faut en croire Antoine, et ne reparut que deux jours après, sans cheval et sans cotte d'armes. On convient que, dans le second, il remplit les devoirs d'un chef et d'un soldat, et que le porte-enseigne de sa légion ayant été grièvement blessé dans la mêlée, il prit l'aigle sur ses épaules et la porta longtemps» (SUÉT., Aug., X).

2. Octave

Campé par Santiago Cabrera, un jeune acteur latino, le personnage d'Octave se doit d'être sympathique. Le genre teenager coureur de jupons. Certes Octave - qui, devenu Auguste, devait plus tard se parer du masque de la vertu romaine la plus austère - n'était sans doute pas un ange. On n'insistera pas sur ses préférences sexuelles, qui lui permettront de résister à l'appétissante vestale Camane (d'où l'a-t-on sortie, celle-là, d'un thriller genre «course à l'héritage» où elle aurait campé la gentille clerc de notaire volant au secours du pauvre orphelin dépouillé par des aigrefins ?). Blond, cheveux courts, le teint souffreteux, pas précisément l'étoffe du héros, le jeune Octave historique était plutôt du genre lucide, froid, et implacable. Et convenablement entouré de tout un état-major de conseillers (2) décidés à miser sur lui, peut-être parce qu'ils le croyaient moins finaud que Marc Antoine. N'empêche que quand Santiago Cabrera - hésitant d'abord, puis avec de plus en plus d'entêtement - s'obstine à nous répéter «Je suis César», on aimerait pouvoir le croire.

Etre chef d'armée à dix-neuf ans, ce n'est pas rien. Alexandre le Grand, qui l'était devenu à vingt, avait été élevé dans ce but. Et il était soutenu par des généraux compétents, qui avaient été formés par son père, des hommes qui le connaissaient et qu'il connaissait. Tel n'était pas le cas d'Octave, fils d'un petit banquier, qui ignorait à peu près tout de la chose militaire, et ne savait pas même - paraît-il - que son grand-oncle l'avait adopté et désigné pour être son héritier.

La télésuite Rome (HBO) donne du jeune Octave une image diamétralement opposée à celle du naïf héros d'Empire : Octave y est un personnage sérieux, studieux, perspicace. Le genre «fort en thème», à la limite : déplaisant. A la demande de sa mère Atia, Titus Pullo doit le traîner au bordel pour qu'il apprenne son «métier d'homme». Car il est encore puceau, notre Octave qui n'a guère de temps à consacrer à de telles futilités, et n'en a pas davantage pour l'escrime, dont l'ancien légionnaire s'efforce de lui inculquer les rudiments. En revanche, sa lucidité politique est sans faille, et il sait jauger les hommes avec une rigueur clinique. Les scénaristes d'HBO lui prêtent d'avoir visité son oncle César en Gaule, tout à la fin de sa campagne, où jouant de malchance il se fait en route détrousser par des brigands, ce qui - à toute chose malheur est bon - lui permettra d'aider Pullo et Vorenus à remettre la main sur l'aigle césarienne volée par un agent de Pompée. Plus tard (et ceci n'est pas une invention de scénariste), on le verra parfaire son éducation militaire en rejoignant son grand-oncle en Espagne, à la poursuite des derniers Pompéiens.
Dans Empire au contraire, Octave a tout de l'ado américain nourri au milk-shake et à la tarte aux pommes, la crinière au vent, entouré de plein de «super-copines», mais à qui il reste encore beaucoup à apprendre de la vie... et du manipulateur Marc Antoine.
Le véritable Octave devait se situer entre celui de Rome et celui d'Empire : un gringalet boutonneux, maladif, prodigieusement retors mais toujours prêt à lutiner les servantes de sa mère...

3. L'effet Gladiator

A l'évidence, dans l'esprit de ses concepteurs, cette télésuite était un hommage à Gladiator. Le sujet est identique, soit la succession d'un «empereur» (Marc Aurèle, Jules César), dont l'héritier de la vingt-cinquième heure (Maximus, Octave) doit disputer à celui que d'évidence, tout désignait comme tel (Commode, Marc Antoine).
Hanté par le souvenir de sa défunte épouse, «le» héros mûrit dans une caserne de gladiateur, véritable hall de l'horreur, et doit renoncer à un amour impossible (Lucilla, Camane). Sauf que «le» héros de Gladiator, Maximus, s'est ici dédoublé en Tyrannus et en Octave. Voici donc Brutus le fils naturel, Marc Antoine le fils spirituel et Octave le fils adoptif, donc légal, ... qui vont s'affronter sans pitié pour recueillir l'héritage de César. Marc Antoine est un concurrent particulièrement déterminé et corrompu, qui va tantôt chercher à capter la confiance d'Octave, tantôt vouloir l'assassiner, tout en essayant de rallier un maximum de légions contre la faction sénatoriale conduite par Brutus et Cassius. Il n'y a quasiment rien d'historique dans le scénario de la télésuite qui n'adhère aux faits connus que de très loin. Le jeune Octave est flanqué du gladiateur Tyrannus, son garde du corps et mentor, un ancien fidèle de Jules César. Brun, barbu, le front barré-de-la-frange-qui-fait-romain comme aurait dit Barthes, l'incorruptible Jonathan Cake-Tyrannus cultive le look de Russell Crowe-Maximus. Comme Maximus, il est étiré entre sa mission et le souci de mettre sa femme et son fils à l'abri. La musique de Richard Marvin et John Van Tongeren fait souvent référence à celle d'Hans Zimmer et nombre de plans ou scènes font explicitement allusion à Gladiator : ainsi lorsque César affranchit Tyrannus, il l'emmène dans un champ de blé ondoyant qui rappelle les premières images du film de Ridley Scott; de même celle où Tyrannus baise la figurine à l'effigie de sa défunte épouse Moïra qui l'attend dans l'Elyseum, au pays des morts. Il en va de même pour l'amphithéâtre de bois, que l'on pourrait naïvement croire être une référence archéologique au fait qu'à l'époque de Jules César, il n'y avait pas encore à Rome d'arène construite en dur, mais seulement des installations temporaires, en bois, érigées sur le Forum. Ce décor, tout compte fait, renvoie plus sûrement le spectateur à celui de Zucchabar - comme, du reste, les «Donjons d'Arkham», en réalité de sinistres cavernes, renvoient à la fruste barbarie de l'école de Proximo. C'est particulièrement évident dans l'épisode 5, lorsque Tyrannus dit «le Cypriote» (comme Maximus est «l'Espagnol»), lui aussi coiffé - si l'on veut - d'un casque «Art Deco», est envoyé affronter à mains nues trois gladiateurs armés jusqu'aux dents.

Le thème de l'«héritage impérial» détourné, le rêve d'un Empire romain universel, comme l'emblème légionnaire que se fait tatouer Octave, et jusqu'à l'humour de la harangue de Maximus (3)à laquelle fait écho Octave s'adressant à sa «légion oubliée» («Vous êtes morts depuis douze ans déjà ! Vous vaincrez car on ne peut plus vous tuer !»), enfin son aveu à Marius Je suis... gladiateur») : tout cela renvoie bien sûr à Gladiator.

Sans compter les personnages annexes comme l'orateur Cicéron jardinant, dont les manières ne sont pas sans rappeler celles du sénateur Gracchus dans Gladiator (Cicéron étant par ailleurs le nom de l'affranchi de Maximus); la figure de Rapax et son escadron de gladiateurs-mercenaires, évoque les exécuteurs de Maximus et de sa famille; ou encore la rudis, ou glaive de bois, offerte à Proximo ou à Tyrannus. Enfin, l'ambiguïté de Servilia, l'ancienne maîtresse de César, véritable double en négatif de la Lucilla de Gladiator (l'aspect positif de Lucilla étant reporté sur Camane).

4. A propos de quelques personnages

On l'a dit, la mini-série s'achève sur la bataille de Mutina (Modène) en Gaule Cisalpine, en 43. Marc Antoine y assiège son rival Decimus Brutus, l'ancien légat de César, qui avait obtenu cette province à gouverner. D. Brutus en fut dégagé par l'arrivée du consul Hirtius et du propréteur Octave qui battirent Marc Antoine et l'obligèrent à se retirer. Dans le film, on oublie Decimus Brutus, Hirtius etc. (et aussi le riche Mécène, qui avait soutenu sa carrière) pour les remplacer par des personnages imaginaires tel ce général pro-césarien Magonius, commandant la IVe légion : un nègre (4), désopilante naïveté yankee ! Comme dans Gladiator, cette bataille de Mutina se déroule en pleine forêt et non sous les murs de la ville, mais avec beaucoup moins de moyens, partant moins de souffle que dans le modèle de Ridley Scott.

Marc Antoine, qui avait déjà réussi à extorquer à Octave la précitée IVe légion, avait compté sans le ralliement à la cause de son rival d'une «légion perdue» retrouvée, la IIIe, une légion d'élite de César que celui-ci avait néanmoins été contraint de décimer suite à sa lâcheté à la bataille de Bibracte douze ans plus tôt. Les survivants avaient déserté en bloc et, depuis, se terraient dans la forêt où Octave alla les chercher. Inutile d'ajouter que le contexte de la vraie bataille de Mutina n'est ici guère respecté.

Autre passage croquignol, le séjour d'Octave dans une école de gladiateurs, authentique camp de concentration ou préfiguration de l'Enfer de Dante, dénommé Arkham (sic). Le scénariste de service a dû confondre «caverne» et «caserne de gladiateurs». Ca peut arriver aux meilleurs ! En tout cas, reflétant quelques réflexions-bateau sur la société esclavagiste, l'épisode trahit une totale méconnaissance du monde de la gladiature.

Enfin, reflets de préjugés judéo-chrétiens, les approximations sur les vestales romaines. Camane, la vestale amoureuse d'Octave, qui sauve des griffes sénatoriales le testament de Jules César. Bonne fille ! Heureusement, elle ne faute qu'en rêve. Sinon...
Bien sûr, les vestales peuvent avoir des sentiments de femmes et manquer à leurs vœux, comme nous le confirment les textes. Dans l'ensemble - abstraction faite de ce qui est nécessaire au «roman» -, ce que le téléfilm dit d'elles est assez juste : elles ont été choisies enfants, et leur pureté est indissociable de l'équilibre cosmique de Rome, etc.

Il nous faut encore parler d'un personnage assez étonnant : Fulvia (Fiona Shaw), l'épouse de Marc Antoine. Une mégère passablement revêche qui passe son temps à faire des remontrances à son mari, de préférence lorsqu'il cherche à se détendre dans ses thermes privés.
Veuve du fameux chef de bande populiste P. Clodius Pulcher, elle était-donc la belle-sœur de la sulfureuse Clodia, celle qui fit le désespoir de Catulle. Fulvia était une femme à poigne, qui déclencha des émeutes à la mort de son premier mari (incendie de la moitié du Forum Romain : à propos de ces événements, Steven Saylor a dressé d'elle un portrait assez pittoresque dans un de ses polars-peplums, Meurtre sur la voie Appia). Fille d'une affranchie, elle fut la farouche ennemie de Cicéron (que la télésuite nous présente comme un ami de Jules César, sans déconner). Et elle obtint la tête de l'avocat, qu'elle ficha sur la pointe d'une lance, perçant d'un poinçon sa langue fielleuse.
Quand, après sa victoire à Philippes, Antoine fila le parfait amour avec Cléopâtre, Fulvia - jalouse - voulut pousser Octave à illico déclarer la guerre à son mari infidèle. N'y étant pas parvenue, elle réussit néanmoins à dresser Lucius Antonius, frère de Marc Antoine, contre l'indocile Octave. Alors on la vit revêtue d'une cuirasse à la tête des légions antoniennes. Finalement, Octave l'assiégea dans Pérouse qu'il réduisit par la famine, expédiant la virago en exil en Grèce.
Mais ceci est une autre histoire; Empire laisse seulement entrevoir que Fulvia n'était pas quelqu'un de facile à vivre.

 
fulvia fulvia fulvia - poppee

Fulvia a laissé le souvenir d'une dame de tempérament, non point érotique mais politique. En vérité, cela ne l'empêchera pas l'éditeur français de Messalina, un fumetti per adulti, désireux de dérouter la censure hexagonale, d'utiliser son nom comme titre alternatif de Poppée et autre Vénus de Rome

5. Une minisérie ABC

Drame de l'été 2005, Empire est une série de six heures contant l'ascension du neveu de Jules César, Octave, obligé de trouver son salut dans l'exil après le meurtre de son oncle le dictateur - flanqué d'un gladiateur déshonoré, Tyrannus (personnage de fiction), qui a fait à César le serment de le protéger. L'élévation d'un héros face à la corruption, l'intrigue, et les ambitions de la Rome antique.

La minisérie a été entièrement filmée à Rome et en Italie centrale et méridionale. Empire est considéré comme la série la plus somptueuse et techniquement la plus complexe jamais entreprise par ABC. Initiée par Thomas Wheeler (The Prometheus Project, The Mission), qui en est le créateur, elle fut menée à bien par les producteurs exécutifs de Chicago, titulaires de l'Academy Award, Craig Zadan et Neil Meron (Life with Judy Garland : Me and My Shadows; The Beach Boys : An American Family; Brian's Song; ABC's Annie, Rodgers & Hammerstein's Cinderella), Tony Jonas (Queer as Folk, Leap Years), titulaire de plusieurs Oscars, et Chip Johannessen (24, The X-Files). La série est produite par Taranus Ltd., en association avec Storyline Entertainment, et est distribuée par Touchstone Television.

miniserie empire ABC

(© ABC Media)

 

5.1. Casting
Fils d'un diplomate chilien, Santiago Cabrera (Haven), campe le jeune Octave, héritier de Jules César interprété par Colm Feore (Chicago; And Starring Pancho Villa as Himself) qui jouera aussi le rôle de l'envieux Cassius dans Jules César, à Broadway. Octave est entouré de Tyrannus, alias Jonathan Cake, qui fut sire Gareth dans First Knight et Japhet dans Noah's Ark (TV) d'Hallmark, et du centurion Agrippa, Chris Egan, déjà remarqué dans Alpha Male et dans la série australienne Home & Away.
Enfin, déjà vue dans un rôle antique, celui de la Bretonne Isolda dans Boudica - Warrior Queen (Bill Anderson, TV, 2003), il y a là Emily Blunt. Emily interprète le rôle de Camane (My Summer of Love), la vestale qui refuse de livrer le testament de César aux sbires du Sénat qui veulent le détruire. Nous avons déjà eu, ailleurs, l'occasion de gloser sur ce personnage et le rôle des vestales à Rome.

Coté «méchants», il y a d'abord les représentants du Sénat, la noblesse arrogante et corrompue : Brutus, James Frain vu dans 24, qui incarna aussi le gladiateur David dans Spartacus (TV) et le prince Schahzenan dans Arabian Nights (Hallmark (TV)); et Cassius, Michael Maloney (Kenneth Branagh's Hamlet; Painted Lady). Trudie Styler (Friends; Confessions of an Ugly Stepsister) incarne Servilia, la mère de Brutus et ancienne maîtresse de César.

Quand à l'impitoyable et ambitieux Marc Antoine, Vincent Regan - qui lui prête ses traits - semble bien parti pour se spécialiser dans les rôles antiques : après avoir été dans Troy Eudorus, le lieutenant d'Achille, et un homme d'armes britannique dans la Jeanne d'Arc de Luc Besson, il tient le rôle d'un capitaine spartiate à la bataille des Thermopyles dans 300, tourné à Montréal d'après la BD de Frank Miller.

jonathan cake - tyrannus jonathan cake - tyrannus

Jonathan Cake incarne le gladiateur Tyrannus, fidèle garde du corps d'Octave, le futur empereur Auguste (© ABC Media)

 

5.2. Réalisation
La réalisation d'Empire a été assurée par John Gray (Brian's Song; Helter Skelter; Martin and Lewis), Kim Manners (X-Files) et Greg Yaitanes (Line of Fire; Cold Case; CSI Miami).

La production a filmé les extérieurs dans le centre et le sud de l'Italie, notamment sur la voie Appienne et l'Aqua Appia - l'aqueduc bimillénaire qui apporta à Rome la première eau courante -, le tombeau du Romulus (IVe s.), des paysages plantés de pins et les environs d'Ostia Antica, ainsi que les rivages d'Antium (Anzio, célèbre par le débarquement pendant la Deuxième Guerre mondiale)

 

gladiateurs - forum

Au temps de Jules César, les combats ont encore lieu sur le Forum, dans une arène de bois démontable (© ABC Media)

 

Au temps de Jules César, les combats avaient encore lieu sur le Forum, dans une arène de bois démontable (César innovera en construisant deux théâtres de bois qui, pivotant sur eux-mêmes, formaient un amphithéâtre). En 65, il avait offert 320 paires de gladiateurs - soit 640 combattants - pour les jeux funèbres de son père, décédé... vingt-deux ans auparavant. Mais à l'automne 45, quelques mois avant d'être assassiné, le grand Jules disposait d'une véritable milice privée que - dans la foulée de ses quatre triomphes - il produisit pour honorer la mémoire de sa fille Julia morte neuf ans plus tôt, en 54.
Dans un premier temps, César n'entretenait pas ses gladiateurs dans une caserne (ludus), mais les logeait chez des sénateurs ou chevaliers de ses amis, tous bons escrimeurs, qui les formaient eux-mêmes (SUÉT., Cés., 26). Il finit par en posséder un millier, qu'il installa alors dans des casernes à Ravenne et à Capoue.

Le dimachère et le rétiaire que l'on voit ici s'affronter (photo) feront grincer les dents aux puristes, car si l'on ne sait à peu près rien du dimachère, sinon qu'il combattait peut-être avec deux épées. Quant à ce rétiaire corseté et pourvu de deux jambières, il perd sa spécificité de «poids plume». Mais sans doute les Romains ont-ils «tout essayé» comme possibilités avant de fixer les armaturæ définitives. On peut rêver. Les glaives surdimensionnés qu'on leur voit ici en mains sont ceux qu'utilisaient à la guerre les légionnaires et nous rappellent qu'à l'origine les gladiateurs étaient le plus souvent des prisonniers de guerre combattant avec leurs armes nationales. Quelques décennies plus tard, ils offriront une toute autre allure...

Sur 270 acres à Cinecittà, la production a recréé une arène de bois pour les combats de gladiateurs, le Forum romain (y inclus le Sénat), et divers autres décors comme l'intérieur de la villa d'Antoine, dont la construction nécessita 72.000 briques «romaines», 11.000 tuiles et, le revêtement du sol, 16.000 pieds carrés de mosaïque.

Renouant avec les techniques de l'antiquité romaine, plus de 6.000 yards de tissu ont été importés d'Inde, d'Allemagne et d'Italie et teintés avec 320 livres de colorants végétaux. La petite armée des costumiers et accessoiristes a également fourni 150 ensembles de bijoux faits mains, 700 paires de chaussures et sandales confectionnées à Pompei (5) et en Tunisie, et quantité d'accessoires récupérés de productions comme Cléopâtre et Ben Hur.

Les combats de gladiateurs et leurs techniques ont été reconstitués par les maîtres d'armes Jan Bryant et Dan Speaker, titulaires d'un Award, mari et femme dans la vie (Master and Commander : The Far Side of the World; Hidalgo; Hook). Ceux-ci entraînèrent plus particulièrement Jonathan Cake, interprète du champion gladiateur Tyrannus.

Suite…

NOTES :

(1) Dans la télésuite, ce sont les généraux qui individuellement se rallient ou non à Marc Antoine. - Retour texte

(2) Selon VELLEIUS PATERCULUS (II, 60) et APPIEN (G. civ., III, 11) de nombreux anciens partisans de César s'empressèrent de se rallier à lui, mais aussi des banquiers comme C. Rabirius Postumus, L. Cornelius Balbus de Gadès et C. Oppius; son beau-père L. Marcius Philippus (au départ fort timoré) qui lui fit également bénéficier de ses largesses; C. Claudius Marcellus son beau-frère; ses petits-cousins Q. Pedius et L. Pinarius; et ses camarades M. Vipsanius Agrippa et Q. Salvidienus Rufus.
N'oublions pas non plus le riche et influent descendant des rois étrusques, C. Clinius Mæcenas, que nous nommons Mécène, qui le conjura de ne pas restaurer la république anarchique, mais de conserver les rênes du pouvoir. - Retour texte

(3) «Et si vous vous retrouvez tout seul dans un champ verdoyant, n'en soyez pas étonnés. C'est que vous avez atteint l'Elysée... et vous êtes morts.» - Retour texte

(4) Si tant est qu'ils aient eu la peau noire (c'étaient plutôt le cas des Maures), César avait eu des mercenaires Numides en Gaule; et il dut en recruter d'autres encore en Afrique du Nord, pendant la Guerre Civile. Mais un général romain à la peau couleur de chocolat... O mos maiorum ! Laissez-nous rire un tantinet. - Retour texte

(5) Hmmm... la traduction du communiqué de presse nous pose problème. Rien n'empêche, bien sûr, qu'il y eut à Pompéi des ateliers de chaussures. Mais il serait plus logique de penser que ce nom désigne en réalité la célèbre Maison Pompei, spécialiste de la chaussure de cinéma et de théâtre, dont le nom figure au générique de la plupart des péplums italiens et même américains (N.d.M.E.). - Retour texte