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MAI
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15 Mai 2006 |
À
LA RECHERCHE DU ROI ARTHUR |
David
a écrit : |
Je suis
passionné des légendes arthuriennes. Peut-on
être tenu au courant des disponibilités en
matière vidéo sur les anciens feuilletons
et les films sur le sujet ? |
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RÉPONSE
: |
N'étant pas distributeur
de DVD, il m'est difficile de vous répondre quant
à l'état des disponibilités. Une
fois que j'ai acquis un film intéressant, je
ne le cherche plus, bien entendu.
Ont été édités en DVD français
: Le Roi Arthur (Fuqua), Merlin (Barron),
Excalibur (Boorman), Les brumes d'Avalon...
Monty Python's Sacré Graal... Perceval le Gallois...
Lancelot, le Premier Chevalier...
Je ne pense pas que le film intitulé Avalon
se raporte à la geste Arthurienne, sinon de très
loin. En fait, je ne sais rien de précis sur
ce film.
Knights of the Round Table (Thorpe) existe de
DVD VO [et, depuis, a été édité
en VF+VO Les Chevaliers de la Table Ronde chez
Warner, coll. «Légendes du Cinéma»
(2007)].
Le roi des Celtes (Arthur Warlord of the Britons)
n'existe pas en DVD à ma connaissance. Mais il
y a eu une VHS, remontage de quelques épisodes.
EvidDead 3 fait référence à
un certain roi Arthur, sans grand rapport avec celui
du cycle du Graal.
Une curiosité : Le Dieu d'Osier, imagine
une survivance religieuse païenne celtique liée
au culte du dieu-soleil Nuada. Dans le mythe irlandais,
Nuada-Main-d'Argent est le roi des Tuatha Dé
Danann (les amateurs de rap celtique connaissent la
chanson de Manau, «La tribu de Dana» !)
et s'illustre à la bataille de Mag Tured, où
il perd sa main qu'il remplacera par une prothèse
d'argent.
Vaste question que la vôtre, qui déborde
un peu sur l'heroic fantasy. Songiez-vous à
des titres précis ? |
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DAVID
RÉÉCRIT : |
Je
vous remercie de votre réponse. En fait, c'est
principalement le feuilleton des années 1972/73
que je recherche : Arthur, roi des Celtes. D'après
mes recherches, il n'est pas encore disponible en DVD.
Il faut certainement encore patienter; du moins, je l'espère. |
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17 mai 2006 |
ALISE-SAINTE-REINE,
CHAUX-DES-CROTENAY ET AUTRES CROTTES-DE-NEZ :
HARO SUR BADINGUET, LE PAUVRE NAPOLÉON III |
Jean
a écrit : |
Je
viens de découvrir avec intérêt
votre page sur Vercingétorix,
bien documentée.
Avez-vous des actions à
Alise ? Ou contre Chaux-des-Crotenay ? Vous parlez de
la stratégie incompréhensible de Vercingétorix
à Alésia.
Si on situe cette dernière à Chaux, ce
qui me paraît aller de soi, cette stratégie
est claire : Chaux se trouve sur l'itinéraire
naturel le plus direct menant de Langres, à travers
la Séquanie, jusqu'au pays allobroge (ça
commence à Genève), ce qui est le plan
de marche expressément donné par César.
De plus, même avec une simple carte routière
on se rend compte que Chaux est le meilleur point stratégique
pour couper cet itinéraire. Alise, au milieu
de nulle part et même pas dans la bonne région,
ne coupe rien du tout. |
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RÉPONSE
: |
Je vous ferais remarquer
que je n'ai qualifié d'«incompréhensible»
que la stratégie de Vercingétorix telle
qu'elle est exposée dans le
film de J. Dorfmann. Avez-vous vu le film, et
son délire baba-cool ? Je doute que le
véritable Vercingétorix ait été
ce personnage zen qu'interprète Christophe Lambert,
et ait éprouvé le moindre remord à
faire couler le sang ennemi.
A décharge,
notez quand même que les réflexions sur
l'inanité de la guerre, et la défaite
qui est en réalité une victoire, ont été
empruntées mot pour mot au Mahabharata
- dialogue du héros Arjunta avec son conducteur
de char Krishna, le dieu de la guerre. Voyez aussi le
monologue désabusé de Robert E. Lee (Martin
Sheen), au soir du 3 juillet 1863, après l'échec
de la charge de Pickett : «Il faut que nous
nous reprenions, général (1).
Le moral de cette armée est bon. Très
bon encore. Nous ferons mieux un autre jour. Ils ne
sont pas morts, pour nous (2).
Pas pour nous. Non. En cela nous sommes bénis.
Si cette guerre continue - et elle va durer. Elle va
durer... [Il hoche la tête, pensif :] Que
pouvons-nous faire d'autre, tous les deux ? C'est toujours
la même question qu'on se pose tous : que peut-on
faire d'autre ? [Avec détermination :] S'ils
veulent se battre, nous nous battrons avec eux...
Et qu'importe après tout qu'ils gagnent. Est-ce
là même question importante ? Dieu
nous la posera-t-il à notre dernier jour ?»
(Gettysburg, Ronald F. Maxwell).)
Pour le reste, je me suis surtout intéressé
au déroulement du siège tel que César
(et Dorfmann) l'ont raconté, non à la
localisation du site - ce en dépit des nombreuses
photos et cartes d'Alise-Sainte-Reine qui illustrent
mon dossier. Son conservateur Michel Reddé, et
consorts, font état de vestiges celtes et romains;
en a-t-on trouvé à Chaux-des-Crotenay
(3)
?
Sans être détenteur d'actions à
Alise, je me suis rallié à la «thèse
officielle» et n'ai pas cru devoir prendre position
pour ou contre, ni m'exprimer au sujet des nombreuses
anti-Alises, dont certaines tout de même sont
assez croquignoles (en revoici la liste : Alès
dans le Gard (!), Izernore dans l'Ain, Novalaise en
Savoie, Aluze en Saône-et-Loire, Auxonne en Côte-d'Or,
Luxeuil dans la Haute-Saône et Salins dans le
Jura). Entre la mauvaise foi politique et l'archéologie
de brasserie, celle dont se gargarisent les «imbéciles
heureux qui sont nés quelque part»
chantés par le Grand Georges, l'hystérie
anti-napoléonienne est un domaine où je
me garderai bien de poser le pied. Il y a, en France,
des gens plus compétents que moi pour en débattre.
Mais j'irai jeter un coup d'il sur le
site que vous citez. Et je vous remercie de l'intérêt
que vous apportez au mien.
NOTES :
(1) Il s'adresse
à Longstreet. - Retour
texte
(2) Les Confédérés
ont essuyé 40 % de pertes ! - Retour
texte
(3) Chaux-des-Crotenay
est un hameau faisant partie de l'entité de
Syam-Cornu, en Franche-Comté. Depuis
1962, André Berthier soutient pouvoir y localiser
Alésia (N.d.M.E.). - Retour
texte
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JEAN
RÉPOND : |
CITATION
«Je n'ai qualifié d'incompréhensible
que la stratégie de Vercingétorix
telle qu'elle est exposée dans le film de J.
Dorfmann.»
Dont acte et désolé
pour la confusion.
CITATION
«Je doute que le véritable
Vercingétorix ait été ce personnage
zen qu'interprète Christophe Lambert, et ait
éprouvé le moindre remord à faire
couler le sang ennemi.»
Il n'était déjà
pas tendre avec les siens. Cela dit, non, je n'ai pas
vu ce film et vous ne m'en donnez pas autrement envie.
CITATION
«Michel Reddé et consorts font
état de vestiges celtes et romains à
Alise-Sainte-Reine; en a-t-on donc trouvé à
Chaux-des-Crotenay ?»
Oui, en quantité, y compris
une enceinte cyclopéenne, donc pré-celtique,
ce qui corrobore Diodore qui parle d'une fondation avant
les Celtes. A Alise, rien d'avant l'époque gallo-romaine.
Pour ma part, je n'ai fait que réfuter Alise
puisque ça entre dans un ensemble
de pages sur la désinformation (qui valent
ce qu'elles valent mais au moins sur Alésia je
pense que c'est du béton). Etant membre d'une
association soutenant Chaux, j'ai renvoyé au
site de cette association (lien à la fin de ma
page).
CITATION
«Sans être détenteur
d'actions à Alise, je me suis rallié
à la thèse officielle et n'ai
pas cru devoir prendre position pour ou contre, ni
m'exprimer au sujet des nombreuses anti-Alises, dont
certaines tout de même sont assez croquignoles
(j'en ai donné la liste, quelque part).»
Certaines candidatures sont effectivement
très farfelues (Novalaise...). |
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RÉPONSE |
«Il [Vercingétorix]
n'était déjà pas tendre avec
les siens. Cela dit, non, je n'ai pas vu ce film et
vous ne m'en donnez pas autrement envie»,
m'écrivez-vous. Eh oui ! Vercingétorix,
et c'est certainement vrai même si c'est César
qui le raconte, a fait mettre à mort ou supplicier
(yeux crevés, bûcher etc.) tous ceux des
Gaulois qui refusaient de marcher avec lui...
Deux remarques : |
1. |
C'était qui les siens ?
Les Gaulois, ou seulement les Arvernes ?
Les républicains oligarques ou les
populistes monarchistes. Ah, la guerre civile.
La pire de toutes...
Jean Lartéguy
a placé en exergue de Tout Homme
est une Guerre civile (1969), son «roman
soixante-huitard», cette provocatrice
citation de Montherlant, que je ne résiste
pas au plaisir de citer ici in extenso.
Moi, elle me fait froid dans le dos. «Je
suis la Guerre civile. Et j'en ai marre
de voir ces andouilles se regarder en vis-à-vis
sur deux lignes, comme s'il s'agissait de
leurs sottes guerres nationales. Je ne suis
pas la guerre des fourrés et des
champs. Je suis la guerre du forum farouche,
la guerre des prisons et des rues, celle
du voisin contre le voisin, celle du rival
contre le rival, celle de l'ami contre l'ami.
Je suis la Guerre civile, je suis la bonne
guerre, celle où l'on sait pourquoi
l'on tue et qui l'on tue : le loup dévore
l'agneau, mais il ne le hait pas : tandis
que le loup hait le loup. Je régénère
et je retrempe un peuple; il y a des peuples
qui ont disparu dans une guerre nationale;
il n'y en a pas qui ait disparu dans une
guerre civile. Je réveille les plus
démunis des hommes de leur vie hébétée
et moutonnière; leur pensée
endormie se réveille sur un point,
ensuite se réveille sur tous les
autres, comme un feu qui avance. Je suis
le feu qui avance et qui brûle, et
qui éclaire en brûlant. Je
suis la Guerre civile. Je suis la bonne
guerre» (Henri de MONTHERLANT,
La Guerre civile [Gallimard]). |
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2. |
Je ne vous ai pas donné envie
de voir le film ? Je le regrette bien. J'ai
une certaine tendresse pour lui, malgré
ses contradictions. Vous, vous allez vous
priver d'une partie de franche rigolade.
C'est un peu ça le péplum.
On est toujours en équilibre instable
entre l'enthousiasme et la déception.
La réussite et l'échec. Le
cliché ou l'anachronisme. Mais parfois
on mise juste... |
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17 mai 2006 |
HONTE
À CET EFFRONTÉ QUI PEUT CHANTER QUAND ROME
BRÛLE ! |
Jocelyne
a écrit : |
Je suis
professeur de lettres classiques et j'ai préparé
une séquence de latin, en troisième, à
partir du remarquable docu-fiction Brûlez
Rome. Ce travail pourrait éventuellement
faire l'objet d'une publication à but pédagogique.
Pourriez-vous m'indiquer à qui je pourrais m'adresser
pour publier ce travail ? |
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RÉPONSE
: |
N'étant pas moi-même
enseignant, ni même Français, je suis assez
mal placé pour vous indiquer comment éditer
semblable dossier. Vous devriez vous adresser, je pense,
à une ARELA (Association régionale d'enseignants
de langues anciennes, membre de la CNARELA [Confédération
Nationale des Enseignants de Langues Anciennes]), mais
ce sont des tirages artisanaux... et j'ignore quelles
sont vos attentes exactes en matière d'édition.
Voyez tout de même avec mon vieux complice Claude
Aziza, qui préside la CNARELA, et dont je vous
communique l'adresse électronique (...). Il vient
lui-même d'achever un Néron qui
sort [qui est sorti] chez Découverte-Gallimard
en septembre.
Claude AZIZA, Néron,
Gallimard, coll. «Découverte»,
2006 |
Je serais intéressé de consulter votre
travail. L'incendie de Rome m'intéresse beaucoup,
en effet. En particulier la prétendue relation
entre ce désastre et les lois néroniennes,
auxquelles il est toujours fait référence,
mais dont le texte n'est jamais parvenu aux spécialistes
du droit romain. Elles ont soi-disant juridiquement
fondé la persécution, mais sont inconnues
des auteurs contemporains qu'ils soient païens
ou chrétiens. Furent-elles jamais été
rédigées, ces fameuses lois ? Ou faut-il
les ranger à côté des accessoires
destinés à faire peur aux petits enfants,
comme le Père Fouettard, le monstre du Loch Ness
ou les OVNI ? Ou le prétendu anathème
misogyne de l'Eglise selon lequel les femmes n'auraient
pas eu d'âme (et pourquoi les baptise-t-on, dans
ce cas ?).
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Jocelyne
réécrit : |
Un
grand merci pour votre réponse, si rapide, et
pour vos suggestions. Mon attente, c'est surtout de
partager ce travail.
Je serais ravie si Claude Aziza acceptait de me répondre.
Je vous enverrai mon travail quand il sera totalement
achevé.
Pour
les chrétiens, on s'appuie sur ce texte de Tacite.
Je ne pense pas que l'on ait un texte plus «officiel»
:
XLIV. La prudence humaine
avait ordonné tout ce qui dépend de
ses conseils : on songea bientôt à fléchir
les dieux, et l'on ouvrit les livres sibyllins. D'après
ce qu'on y lut, des prières furent adressées
à Vulcain, à Cérès et
à Proserpine : des dames romaines implorèrent
Junon, premièrement au Capitole, puis au bord
de la mer la plus voisine, où l'on puisa de
l'eau pour faire des aspersions sur les murs du temple
et la statue de la déesse; enfin les femmes
actuellement mariées célébrèrent
des sellisternes et des veillées religieuses.
Mais aucun moyen humain, ni largesses impériales,
ni cérémonies expiatoires ne faisaient
taire le cri public qui accusait Néron d'avoir
ordonné l'incendie. Pour apaiser ces rumeurs,
il offrit d'autres coupables, et fit souffrir les
tortures les plus raffinées à une classe
d'hommes détestés pour leurs abominations
et que le vulgaire appelait chrétiens. Ce nom
leur vient de Christ, qui, sous Tibère, fut
livré au supplice par le procurateur Pontius
Pilatus. Réprimée un instant, cette
exécrable superstition se débordait
de nouveau, non-seulement dans la Judée, où
elle avait sa source, mais dans Rome même, où
tout ce que le monde enferme d'infamies et d'horreurs
afflue et trouve des partisans. On saisit d'abord
ceux qui avouaient leur secte; et, sur leurs révélations,
une infinité d'autres, qui furent bien moins
convaincus d'incendie que de haine pour le genre humain.
On fit de leurs supplices un divertissement : les
uns, couverts de peaux de bêtes, périssaient
dévorés par des chiens; d'autres mouraient
sur des croix, ou bien ils étaient enduits
de matières inflammables, et, quand le jour
cessait de luire, on les brûlait en place de
flambeaux. Néron prêtait ses jardins
pour ce spectacle, et donnait en même temps
des jeux au Cirque, où tantôt il se mêlait
au peuple en habit de cocher, et tantôt conduisait
un char. Aussi, quoique ces hommes fussent coupables
et eussent mérité les dernières
rigueurs, les curs s'ouvraient à la compassion,
en pensant que ce n'était pas au bien public,
mais à la cruauté d'un seul, qu'ils
étaient immolés (TACITE, Annales,
XV).
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RÉPONSE |
Ben oui, Tacite ! Mais
le livre XV n'est connu que par une copie du XIIe s.,
aussi soupçonne-t-on les braves moines d'avoir
interpolé tout ce qu'ils voulaient. C'est qu'elle
est forte la tentation de prouver, à tout prix,
que Jésus-Christ et ses petits camarades était
bien connus des Romains, qui pourtant s'en soucièrent
comme d'une guigne lorsqu'ils le clouèrent sur
la croix ! Le fait est qu'à part Tacite et Suétone
(tout aussi suspect), personne avant le IVe s. ne mettra
la persécution des chrétiens en relation
avec l'incendie de Rome !... Autrement dit : pas avant
l'édit de tolérance de Constantin. Même
des «romans chrétiens» comme les
Actes de Paul et les Actes de Pierre (1),
qui parlent de leur martyre à Rome, sous Néron,
passent l'incendie sous silence. Paul et Pierre sont
condamnés à mort parce qu'ils critiquent
les murs relâchées des puissants...
et dissuadent les prostituées de se prêter
à leurs jeux (!). Paul ressuscite des morts,
argument imparable de sa prédication, et se veut
plus puissant que l'empereur romain !
Si Suétone et Tacite avaient, dans le texte
d'origine, contenu ces affirmations qui désignent
les chrétiens comme suspects d'être des
incendiaires et persécutés à ce
titre, comment expliquer qu'entre mettons 120/150 et
300 - époque des grandes persécutions,
aucun auteur chrétien (ils n'y avaient pas vraiment
intérêt, bien sûr) ou païen
(or les polémistes païens comme Celse y
auraient trouvé tout avantage) n'aient relayé
une aussi grave accusation ?
Les Actes de Pierre, qui situent l'exécution
de l'apôtre entre 65 et 67, ont dû
être composés au plus tôt dans
le courant du IIe s. (ainsi, au lieu d'être
le fondateur de communautés chrétiennes
- comme dans les Actes des Apôtres
- Paul les trouve déjà constituées,
ce qui correspond à l'état du christianisme
dans le courant du IIe s., c'est-à-dire
cent trente ans plus tard.
Selon les Actes de Pierre, prêchant
la chasteté, Pierre aurait converti nombre
de prostituées romaines, que la traduction
«Pléiade» nomme «concubines».
Le préfet Agrippa (?), un familier de César
nommé Albinus et d'autres citoyens se voyant
ainsi privés des services de leurs concubines
favorites, voulurent le faire périr. C'est
pourquoi Pierre décida de fuir Rome; mais,
ayant sur le chemin rencontré le Christ
disposé à se faire recrucifier -
Quo Vadis, Domine ? -, il revient dans
la ville et se livre à ses bourreaux lesquels,
à sa demande, le crucifient tête
en bas.
Dans les Actes de Paul,
le «treizième apôtre»
ressuscite l'échanson Patrocle, que Néron
aimait beaucoup. Or l'empereur a la désagréable
surprise d'entendre celui-ci se proclamer, désormais,
disciple du Christ, le «Roi Eternel»...
conversion qui en entraîne d'autres, parmi
ses esclaves. Néron voue alors les chrétiens
aux flammes... du bûcher et ordonne aux
centurions Longus et Cestus le décapiter
le prêcheur.
Paul les convertit aussi et leur prédit
que, le col tranché, il ressuscitera. De
fait, le lendemain de son exécution, Paul
réapparaît. Ebranlé, Néron
fait libérer les chrétiens encore
emprisonnés. Selon cette version Paul fut
exécuté le troisième jour
des calendes de juillet (29 juin), soit - jour
pour jour - trois ans après le martyre
de Pierre. Aucun de ces «romans chrétiens»
ne fait allusion à l'incendie de Rome,
ni à une quelconque accusation de responsabilité
des chrétiens. Quittant Corinthe pour Rome,
Saül-Paul fait néanmoins cette prophétie
apocalyptique : «Frères (...)
je m'en vais vers une fournaise - c'est de
Rome que je parle -, et je n'en aurai pas la force
si le Seigneur ne me [revêt] pas de puissance»
(Actes Paul, XII, 2). Fait-il ici quand
même allusion à l'incendie de Rome
ou, comme c'est plus probable, aux supplices qui
les y attendent, ou à cette Fin des Temps
en prévision de laquelle les |
Vous aurez noté que le docu-fiction
de Robert Kéchichian innocente Néron.
Enfin la révision du procès ?...
Loin de moi l'idée de faire du «révisionnisme».
J'ai encore tout à apprendre de ces merveilleux
Pères de l'Eglise qui pratiquèrent ce
périlleux exercice bien avant nous.
Question plus technique : les vigiles, ces pompiers
de la Rome antique. Avez-vous songé à
consulter la thèse de Robert Sablayrolles - qui
était le conseiller historique du docu-fiction
Brûlez Rome - sur les vigiles romains ?
(R. SABLAYROLLES, Libertinus Miles - Les cohortes
de vigiles, Coll. Ecole française de Rome,
n 224, 1996.)
Addendum
Dans le même sens que nous, on consultera aussi
avec profit (en dépit des scories du scannage)
Polydore HOCHART, «La
persécution des chrétiens sous Néron
- Etude historique» sur le site Méditerranée-antique.info.
NOTE :
(1) Actes
de Paul et Actes de Pierre, in Ecrits
apocryphes chrétiens, NRF, Pléiade,
1997. - Retour texte
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18 Mai 2006 |
ARCHÉOLOGIE
EXPÉRIMENTALE ET RECONSTITUTIONS ANTIQUES |
Claude
Aubert a écrit : |
Puis-je
vous suggérer de consulter le site
www.gladiateur.ch ? Bien sûr, ce n'est pas
à proprement parler du péplum, mais je
trouve que ce qui y est présenté [je ne
suis en rien impliqué, et c'est par hasard que
j'ai découvert ce site] semble très intéressant.
Dans le but de «buster
les synergies des antiquitophiles» (tiens, tiens
! comment dirait-on cela en grec ancien ou en latin
?), on pourrait peut-être imaginer que vous demandiez
à votre web-magister de créer un
lien entre votre site et celui de la manifestation octodurienne.
Qu'en pensez-vous ? |
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RÉPONSE
: |
J'intégrerai ceci dans
un prochain courrier : www.gladiateur.ch
Ca a l'air amusant, mais le drapé des manteaux
est factice, de même le cingulum heu, bon,
je m'égare... Mais je suis très maniaque
pour les équipements militaires, étant en
correspondance avec des gens qui font de la reconstitution. |
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CLAUDE
AUBERT RÉPOND |
Un
tout grand merci de votre courriel. Je dois dire que cela
m'intéresserait d'entrer en contact avec des personnes
qui font de la reconstitution. C'est une variante très
intéressante de l'«archéologie expérimentale». |
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RÉPONSE |
Sur
ma page d'accueil
il y a la couverture d'un bouquin sur les gladiateurs,
publié chez Errance par Eric Teyssier et Brice
Lopez. Cliquez
dessus et vous trouverez ma recension, ainsi que l'accès
à leur site ACTA
Experimentation. Brice est professeur de jiu-jitsu
et Eric un historien (Université Nîmes)
spécialiste de... la Révolution française.
Ils se sont mis à réfléchir sur
ce que nous savons des armements de l'Antiquité,
et de la manière de les utiliser. Dans le courrier
de mon site, il y a plusieurs échanges avec Eric
Teyssier, allez les lire. (CLICK
& CLICK)
Je crains un peu que les cascadeurs suisses dont vous
m'avez communiqué l'URL (bien sûr, je ne
les ai pas vu à l'uvre, mais rien qu'à
voir les costumes... Hmmmm...) soient du même
niveau que ceux de Puy-du-Fou
en Vendée (il paraît qu'ils font la
tortue avec des boucliers accrochés sur une
structure en tubes d'acier, j'entends encore mes amis
s'esclaffer).
Inauguré
en juin 2001 près de Rennes, en Vendée,
la préparation du Stadium de Puy-du-Fou (1),
prit quatre ans. Avec ses 3.500 m de gradins, cette
arène hybride dont la structure - tant pis pour
les puristes - télescope l'amphithéâtre
(ovale) et le cirque (spina centrale) peut recevoir
6.500 spectateurs et propose deux spectacles par jour.
Toutes les précautions électroniques ont
été prises pour que ce cirque forain en
dur, mais patiné à l'antique, offre un
maximum de sécurité aux visiteurs. Son
directeur, Philippe de Villiers y accueille le cascadeur
équestre bien connu Mario Luraschi (Astérix
et Obélix contre César; Vercingétorix;
et le Ben Hur
de Robert Hossein) qui a formé des auriges
locaux; des gladiateurs... tchèques; et, enfin,
le dompteur Thierry Leportier, sa fille Karen (dans
le rôle de Sainte Blandine (!)) et sept lions
aux sourires impressionnants. Ses fauves ont déjà
été vus dans Fort Boyard et Gladiator.
Au long de cinq tableaux de huit minutes chacun, c'est
le frisson et les pop-corn garantis !
Tiens, en parlant de cascadeurs
suisses, il me revient d'avoir lu un article consacré
à Roland Carey, prenant la pose dans l'amphithéâtre
d'Avenches. Ce cascadeur helvétique, qui tourna
notamment avec Riccardo Freda, aurait ouvert une d'école
de cascadeurs-gladiateurs. Article publié après
la sortie du film de Ridley Scott (2).
Ce cascadeur et comédien lausannois (il a suivi
à Paris les cours René Simon et Maurice
Escande, puis le Conservatoire au début des années
'50) fut avec son confrère cascadeur Gil Delamare,
ainsi que l'haltérophile Gordon Scott, l'un des
rares «acteurs» dont Freda parlait avec
respect ! Sa carrière cinématographique
ne se résuma pas aux seuls péplums. Rappelons
tout de même qu'on l'a vu incarner Jason dans
Le Géant de Thessalie (Freda, 1960) et
tenir le premier rôle dans L'épée
du Cid (1962) et La Rivolta dei Barbari (1964).
Il semble avoir eu aussi un petit rôle dans La
Chute de l'Empire romain (1964), mais j'ignore lequel.
Sa carrière fut brisée par la politique
des coproductions franco-italiennes qui imposaient un
certain quota d'acteurs nationaux : plus de rôle
intéressant, désormais, pour le titulaire
d'un passeport à croix-blanche - ainsi se vit-il
éjecté du médiéval La
révolte des mercenaires.
|
A part ça, je
suis aussi très pote - et depuis plus de vingt
ans - avec le tribun Claudius Marcellus de la cohorte
hollywoodienne de la Louve, pardon, la Coh
VII Prætoria Lupæ belge [photo ci-dessus],
qui est un peu l'antithèse d'ACTA Expérimentation,
mais n'en est pas moins composée de joyeux compagnons
que j'adore rencontrer à l'Archéosite
d'Aubechies (près de Ath) ou à Malagne
(Rochefort) devant une bière artisanale de notre
belle Wallonie...
Enfin, si les questions
de reconstitution vous interpellent, je ne saurais trop
vous recommander les trois forums consacrés à
Rome, de
la Royauté au Haut-Empire, du Bas-Empire
et Grandes invasions, et des Gladiateurs.
NOTES :
(1) Cf.
Christophe BUCHARDT (photos Hubert FANTHOMME), «Ben
Hur arrête son char en Vendée»,
Paris-Match, 10 mai 2001 et, à la TV,
l'émission «Reportages» (RTL-TVI,
29 juillet 2002). - Retour texte
(2) Cf.
Frédéric NEJAD (photos Claude GLUNZ),
«Roland Carey. Gladiateur Romand», L'Illustré
(Lausanne), 9 août 2000, pp. 26-29. - Retour
texte
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22 mai 2006 |
JULES
CÉSAR, Y METTAIT PAS D'FALZAR, POUR QU'ON VOIE
SES BELLES JAMBES... |
Sylvie
a écrit : |
Bravo
pour votre site très intéressant.
Quelqu'un parmi vous a-t-il
connaissance des paroles chantées dans le générique
final (Pontifex Maximus...) du film d'Uli Edel
Jules César sur un thème emprunté
à la VIIe de Beethoven ? |
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RÉPONSE
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Distingué ou pas
(en l'occurrence, mieux vaut pas), tout péplologue
belge connaît la rengaine du Grand Jojo - «de
Lange Jojo», de l'autre côté de la
frontière linguistique, alleï ! -
qui nous apprend que «Jules César /
On l'appelait «Jules César» / Y mettait
pas d'falzar / Pour qu'on voie ses belles jambes / Ses
jolies jambes / Ses jambes de «Super-Star»...
Un 45t qui a connu son petit quart d'heure de gloire
dans les années '80.
Mais... Non. Désolé. Je ne possède
pas de transcription des paroles du générique
final du téléfilm d'Uli Edel. Si jamais
vous les obtenez, je serais heureux de les connaître.
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[mai 2006] |
NOUS
AVONS REÇU : ALEXANDRE DUMAS, MÉMOIRES
D'HORACE |
Alexandre
DUMAS, Mémoires d'Horace (édition,
préface et commentaires de Claude AZIZA),
Les Belles Lettres, 2006.
Un roman inédit, déroulant l'histoire
de la Rome républicaine sous les yeux d'Horace,
témoin immortel. Ce roman paru en feuilleton
dans Le Siècle du 16 février
au 19 juin 1860 n'a jamais été édité.
C'est donc un véritable inédit ignoré
des biographes de Dumas.
Sous une forme romancée : la vie du poète
latin Horace (65-8 av. n.E.) racontée par
lui-même. Dumas fait un tableau haut en
couleurs d'un demi-siècle de la Rome républicaine,
période cruciale qui voit la fin de la
République, minée déjà
par des luttes intestines (Catilina, Clodius,
Cicéron, Pompée, Crassus, César)
et les débuts de l'Empire (Auguste). Le
récit s'arrête avec le triomphe d'Octave
en 29 av. n.E. Il s'y révèle prodigieux
conteur et pédagogue inspiré. Une
suite fût annoncée; elle ne sera
jamais écrite.
Dans ce roman, Alexandre Dumas donne un portrait
vivant des hommes et des institutions de l'époque.
On ne peut pas dire que le nom d'Alexandre Dumas
- l'immortel auteur des Trois Mousquetaires
et du Comte de Monte-Cristo - s'impose
à l'esprit, lorsque l'on parle de l'Antiquité
romanesque. Et pourtant ! La Muse de l'auteur
d'Acté (1839), d'Isaac Laquedem
(1853) et de Caligula (1848), qui fut aussi
- pendant quelques mois - le directeur du site
de Pompéi (1860), n'a pas boudé
le péplum romanesque, théâtral
ou feuilletonnesque. En témoigne cet inédit
exhumé par Claude Aziza. |
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Suis
et ipsa Roma viribus ruit
(«Et Rome s'écroule par ses propres
forces.»)
Epodes, XVI, 2 |
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(...) 1809 : le jeune Dumas - il a sept ans - commence
à lire. Deux ouvrages vont marquer à jamais
son imaginaire : La Bible, et surtout ces Lettres à
Emilie sur la mythologie écrites par Demoustiers
dont Dumas lui-même nous rappelle qu'il naquit
à Villers-Cotterêts. Les années
passent, il est temps de se plonger dans les humanités.
Pour le jeune garçon, elles se résumeront
à un peu de latin à domicile. Il passera
d'ailleurs plus de temps à chercher des traductions
qu'à traduire des textes !
Premières émotions esthétiques
: en ce mois de novembre 1822, Dumas fait une escapade
à Paris. Le 4 août au soir, avec son ami
Adolphe de Leuven, il va vibrer à la Comédie-Française
devant le Sylla de De Jouy avec, dans le rôle-titre,
l'illustrissime Talma. Lequel, sublime et familier à
la fois, baptise «poète» le jeune
homme timide qui est venu le voir dans sa loge. Mars
1823 : Dumas a pris sa décision : il va s'installer
à Paris. Il vibrera encore devant le Régulus
d'Arnault, toujours joué par Talma. Il faudra
dix ans pour que Dumas retrouve une telle émotion,
à la fois esthétique et affective. En
août 1835, l'Antiquité est toujours là,
à Naples et à l'opéra. On y donne
la Norma de Bellini, où triomphe Caroline
Ungher, dont lui-même, passionnément épris,
triomphera quelques jours plus tard lors d'un voyage
en mer.
1840. Dumas serait-il devenu sérieux ? Le
père se réveille en lui, lorsqu'il écrit
à son fils Alexandre - il a dix-sept ans - un
vaste programme pédagogique. Il faut apprendre
le grec, connaître l'histoire de Rome, et surtout
lire les poètes latins, Horace et Virgile en
tête. Sans oublier les écrivains contemporains
: Hugo, Lamartine et... Dumas. Mais quoi de Dumas ?
Le récit de Stella dans Caligula, joué
en 1837.
Cinq ans plus tard, il place le Théâtre
Historique qu'il vient de construire sous les auspices
des grands tragiques grecs. Sans cesse, par ailleurs,
apparaissent dans son uvre historiens et poètes
latins : Salluste, Tacite, Suétone, Catulle,
Ovide, Horace.
Il s'est entouré d'un bestiaire antique
: César, son coq, Lucullus, son faisan doré,
et Jugurtha, le vautour qu'il a rapporté de Tunisie.
C'est toujours sous le signe du monde antique qu'il
voyage. Sa curiosité est insatiable. Est-il,
en 1834, en Suisse, qu'il se passionne pour la légende
de Ponce Pilate portée par le Juif errant. Vingt
après ce sera Isaac Laquedem. Est-il,
cette même année, en Provence, qu'il se
fait archéologue amateur et visite les monuments
romains.
Mais il est de plus féconds séjours
antiques. Si Dumas profita de son voyage de 1846 pour
visiter Carthage, c'est dans les ruines de Pompéi
qu'il rêva sur le sort des cités antiques.
Il y fut en 1835, pour préparer son Caligula.
Un an après la publication des Derniers jours
de Pompéi, de Bulwer-Lytton. L'a-t-il lu ?
rien ne permet de l'affirmer. Rien, en revanche, n'interdit
de penser qu'il a pu contempler à Paris, en 1834,
l'immense toile du Russe Brioulov, Le dernier jour
de Pompéi. S'en souvenait-il en 1860 lorsqu'il
devint pour un temps le maître des lieux de la
cité disparue ?
Si l'homme et le voyageur ont été
à ce point pénétrés de l'esprit
antique, qu'en fut-il de l'écrivain ?
En 1826 il écrit, pour un ouvrage de luxe
sur la galerie du Palais-Royal, quelques vers (89 !)
au lyrisme déjà tout virgilien ou... horacien
:
«Il est une heure plus brûlante/ Où
le char du soleil au zénith arrêté,/
Suspend sa course dévorante/ Et verse des torrents
de flamme et de clarté.»
Parmi ses gammes théâtrales, une tragédie
qu'il brûle, sans doute vers 1827 : Les Gracques.
Dans le même domaine, la suivante, Caligula,
le 26 décembre 1837, sera mieux venue. Pourtant,
malgré le faste de sa mise en scène, elle
n'emportera pas toutes les adhésions. Onze ans
plus tard, en 1848, Catilina, ne sera qu'un demi-succès.
Quant au Testament de César, joué
l'année suivante, en 1849, il semble bien que
Dumas y ait juste imprimé sa patte. Voilà
pour le théâtre.
Qu'en est-il du domaine romanesque ? Acté,
en 1839, a une double singularité : il comporte
la première course de chars de la littérature
romanesque et donne, pour la première et pratiquement
l'unique fois, du personnage de Néron une image
positive. On a déjà cité Isaac
Laquedem, que la censure impériale interrompit
en 1853. N'oublions pas enfin que parmi ses Grands
hommes en robe de chambre figurent César (1849,
disponible chez le même éditeur, Les Belles
Lettres), Auguste (1857, resté à l'état
de feuilleton), et peut-être Néron dont
le manuscrit, s'il existe, doit dormir dans quelque
grenier.
Ainsi donc la Rome antique est partout présente
dans l'uvre de Dumas. Dumas, fils de la Révolution,
n'ignore pas que l'Urbs y a projeté les ombres
fantasmatiques des deux Brutus, des deux Catons et des
deux Gracques. Soit. Mais pourquoi Horace ? Retournons
à la préface de Caligula :
«Il y a cinq ans que l'idée de cette
tragédie m'est venue, et, depuis cinq ans,
il ne s'est point passé un jour sans que je
m'en occupasse. [...] C'était toute une époque
inconnue, ou, qui pis est, mal connue; une époque
que, arrivés à un certain âge,
nous ne revoyons plus qu'à travers les souvenirs
fastidieux du collège [...].
Ajoutez à cela que l'Antiquité [...]
était tombée dans un si merveilleux
discrédit, que l'ennui qu'elle traînait
à sa suite était devenu proverbial;
c'était donc plus qu'une innovation que je
tentais : c'était une réhabilitation.
[...] Je partis pour l'Italie, afin de voir Rome;
car, ne pouvant étudier le cadavre, je voulais
au moins visiter le tombeau.
Je restai deux mois dans la ville aux sept collines,
visitant le jour le Vatican, et la nuit le Colisée;
mais, après avoir tout rebâti dans ma
pensée, depuis les prisons Mamertines jusqu'aux
bains de Titus, je m'aperçus que je n'avais
qu'une face du Janus antique; face grave et sévère
[...].
C'était Naples, la belle esclave grecque, qui
devait m'offrir ce second visage, voilé, pour
nos grands maîtres, sous la lave d'Herculanum
et la cendre de Pompéi; visage gracieux comme
une élégie de Tibulle, riant comme une
ode d'Horace, moqueur comme une satire de Pétrone.
Je descendis dans les souterrains de Résina,
je m'établis dans la maison du Faune; pendant
huit jours je vécus, m'éveillant et
m'endormant dans une habitation romaine touchant du
doigt l'Antiquité [...]. Alors la nation
togée commença pour moi à
descendre de son piédestal, à revêtir
une forme palpable, à prendre une allure vivante.»
Rendre la Rome antique vivante, charnue, colorée,
quel beau projet ! Et quel meilleur peintre pour le
mener à bien que le poète Horace, l'homme
des Satires, railleuses et piquantes, mais aussi
des Odes, lyriques et parfumées ?
Dumas, on l'a vu, en a déjà conseillé
la lecture à son jeune fils. Le petit Alexandre
est devenu grand, il triomphe au théâtre
le 30 novembre 1859 avec Le père prodigue.
Hugo, toujours en exil, envoie une lettre de félicitations
à son ami, lettre qu'il conclut par :
«Vous allez donc partir ! Si j'étais
Horace [c'est nous qui soulignons], comme je chanterais
au vaisseau de Virgile ! Vous allez au pays de la
lumière, à l'Italie, à la Grèce,
à l'Egypte, vous allez faire le tour de l'eau
de saphir; vous allez voir la mer heureuse; - moi
je reste dans la mer sinistre. Mon océan envie
votre Méditerranée. Allez, soyez heureux,
soyez grand, et revenez.»
C'est là, croyons-nous, qu'il faut trouver
le déclencheur immédiat d'un projet que
Dumas caressait depuis longtemps.
Pourtant, que de différences entre le petit homme
rondouillard qu'Auguste appelait affectueusement «mon
petit tonneau», dont la vie arbora les couleurs
d'un épicurisme de salon : honnête aisance
(aurea mediocritas) et confort douillet, et le géant
tonitruant qui parcourut le monde et son siècle
en éclatante majesté.
Mais que de ressemblance aussi - par-delà les
siècles - entre deux hommes dont la vie et l'uvre
ne furent qu'une longue ode au bonheur.» |
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